Début du contenu principal.
Un traitement plus simple, moins invasif et moins exigeant que celui qui est actuellement offert aux patients qui présentent des troubles de l’usage d’opioïdes semble tout aussi efficace, a constaté un chercheur montréalais.
Un traitement plus simple, moins invasif et moins exigeant que celui qui est actuellement offert aux patients qui présentent des troubles de l’usage d’opioïdes semble tout aussi efficace, a constaté un chercheur montréalais.
À lire également - Les jeunes seront formés à réagir à une surdose
Actuellement, on peut par exemple demander à ces patients de se présenter à la pharmacie tous les jours, pendant deux ou trois mois, dans le cadre de l’initiation de leur thérapie à la méthadone ou à la morphine.
«Ça prend un niveau de motivation élevé pour suivre ces traitements-là, a dit l’auteur de l’étude, le docteur Didier Jutras-Aswad, qui est psychiatre au CHUM. Mais on a aussi des gens qui étaient très motivés, ou des gens qui seraient très motivés, à être traités, mais qui ne voulaient pas s’embarquer dans ce type de traitement-là en sachant que c’est tellement demandant.»
La situation devient encore plus complexe quand on se souvient qu’il s’agit d’une population qui est souvent en situation de précarité et de vulnérabilité, a-t-il ajouté.
Le docteur Jutras-Aswad et ses collègues de l’Initiative canadienne de recherche sur l’abus de substances démontrent dans la plus récente édition de l’American Journal of Psychiatry qu’il est possible d’offrir à ces patients un traitement plus souple, sans pour autant réduire les chances de succès.
Ce traitement repose sur l’utilisation de buprénorphine-naloxone, aussi connue sous le nom commercial suboxone, qui est lui aussi un agoniste des opioïdes.
L’équipe de recherche a recruté entre octobre 2017 et mars 2020 plus de 270 volontaires dans sept hôpitaux et cliniques au Québec, en Ontario, en Alberta et en Colombie-Britannique.
L’âge moyen des participants, dont 35 % étaient des femmes, était de 39 ans. Ils présentaient tous des troubles de l’usage d’opioïdes de prescription ou produits illégalement, comme l’hydromorphone, la morphine, l’oxycodone ou le fentanyl.
Les sujets ont été répartis aléatoirement en deux groupes: on a donné au premier de la méthadone dont la prise était supervisée en pharmacie, et au second le suboxone, qui pouvait être le plus souvent pris à domicile.
Les participants ont été suivis pendant 24 semaines, notamment afin de comparer l’efficacité de chacun des traitements à réduire leur consommation d’opioïdes.
«(Le suboxone) est un peu moins puissant que la méthadone et c’est associé à un risque moins élevé de surdose, a dit le docteur Jutras-Aswad. On a misé sur le profil de sécurité de la buprénorphine qui est avantageux pour tester un modèle de soins où on allait diminuer la charge de supervision, l’intensité de la supervision directe en début de traitement.»
On recommandait ainsi qu’après les deux premières semaines de traitement, le patient puisse prendre jusqu’à une semaine de doses non supervisées à la maison, ce qui implique une seule visite à la pharmacie. Après deux semaines, on recommandait d’espacer encore plus ces visites, à raison de deux par mois.
Le but de l’étude, a dit le docteur Jutras-Aswad, était de déterminer si un modèle de soins beaucoup plus flexible, avec beaucoup moins supervision, serait tout aussi efficace pour diminuer l’usage de substances que le modèle habituel avec la méthadone.
«Notre étude nous a montré que la buprénorphine (...) était non inférieure au traitement avec la méthadone chez les gens qui prenaient le traitement non supervisé à la buprénorphine, avec une tendance à ce que la buprénorphine soit même un peu plus efficace que la méthadone», a-t-il souligné.
Les chercheurs en viennent à la conclusion qu’il est possible d’utiliser un modèle de soins plus flexible, qui demande moins de supervision étroite, tout en obtenant des résultats équivalents à ceux obtenus lors de l’utilisation de méthadone sous supervision très étroite.
La buprénorphine offre aussi au patient une plus grande flexibilité que la méthadone si jamais un changement de traitement s’avère nécessaire.
«Ce n’est pas rien de devoir aller tous les jours à la pharmacie, a dit le docteur Jutras-Aswad en conclusion. Je pense que c’est vraiment un modèle gagnant-gagnant (...) qui permet vraiment de répondre à une situation qui est catastrophique.»
Quelque 27 000 Canadiens sont décédés d’une intoxication liée à la consommation d’opioïdes entre janvier 2016 et septembre 2021. On estime que plus de 350 000 personnes ayant utilisé des médicaments antidouleur contenant des opioïdes en ont fait un usage problématique.
Seulement au Québec, 339 personnes ont perdu la vie entre janvier et septembre 2021 à la suite d’une intoxication liée aux opioïdes, selon les dernières données de l’Agence de la santé publique du Canada.