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Un peu plus de 1200 soldats de 10 pays, dont 700 du Canada, s'entraînent comme un groupe de combat unifié au camp Adazi pour défendre la Lettonie.
La Russie risque la déroute si elle s'aventure à attaquer les troupes canadiennes et celles de leurs alliés postées pour défendre les frontières de la Lettonie: «nous pourrions gagner par une bonne marge», a assuré leur commandant, le lieutenant-colonel Jesse van Eijk.
Il est à la tête du groupement tactique de la présence avancée renforcée en Lettonie (GT eFP Lettonie) de l’OTAN, installé dans ce petit pays balte qui partage une longue frontière avec la Russie.
La menace est constante, dans le contexte de l’invasion de l’Ukraine et d’une frappe de missile qui a fait deux morts en Pologne, un autre membre de l’OTAN, sans qu’il n’y ait aucune indication que ce missile était tiré intentionnellement – il proviendrait de l’Ukraine en fait.
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Le lieutenant-colonel Jesse van Eijk a accordé mercredi après-midi une entrevue à La Presse Canadienne dans son modeste bureau situé dans un bâtiment temporaire sur la base du groupement tactique, le camp Adazi, au beau milieu de la forêt, à 45 minutes de route de Riga, la capitale lettonne.
Le petit pays balte a fait partie de l’empire russe et de l’URSS et a dû gagner deux fois son indépendance, la dernière fois en 1991. Or la Russie convoite toujours ses anciennes terres aux confins de l’empire, a confié à La Presse Canadienne le colonel Didzis Nestro, chef intérimaire de la composante Terre de l'armée lettonne.
Un peu plus de 1200 soldats de 10 pays, dont 700 du Canada, s'entraînent comme un groupe de combat unifié au camp Adazi pour défendre la Lettonie.
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Le lieutenant-colonel van Eijk est convaincu que ses troupes sont bien mieux préparées et aguerries que leurs adversaires potentiels.
«Les attentes ont changé», a-t-il dit par rapport à l'idée qu'on se faisait antérieurement de l'armée russe, une des armées les plus imposantes et mieux équipées du monde pourtant. Mais depuis il y a eu l’invasion de l’Ukraine et c'est maintenant l'impasse: les troupes russes sont embourbées.
«Nous avions une impression initiale que les Russes seraient plus rapides, or ils ont sous-performé par rapport à ce qu'ils pensaient qu'ils pouvaient accomplir en Ukraine», a-t-il analysé.
«Mais leur cadence dépendrait de ce qu'ils déploieraient face à nous», a-t-il poursuivi.
Par contre, le commandant n'a aucun doute sur la supériorité de ses effectifs, leur meilleure instruction et préparation.
«Je pense que nous pourrions gagner et par une bonne marge», a-t-il lancé.
Il fait valoir que les soldats sous sa houlette ont tous dû suivre un entraînement national exigeant et qu'ils ont travaillé fort pour pouvoir être intégrés à ce groupement tactique.
Ce sont de soldats professionnels de l'armée de métier, leur compréhension de la tactique et de l'usage optimal de leurs ressources est bien meilleure que ce que peut leur opposer le soldat russe, a ajouté le commandant van Eijk.
L’OTAN possède des renseignements assez précis sur les forces qui se trouvent de l’autre côté de la frontière avec la Russie, située à 200 km à peine du camp Adazi.
Les alliés possèdent une «compréhension» des forces, de leur état de préparation, de leurs activités quotidiennes même, a expliqué le lieutenant-colonel.
L’offensive russe en Ukraine «a réduit la capacité de la Russie de faire quelque chose rapidement ici», au nord-est, dans la région des pays baltes, a estimé l’officier.
Ces renseignements sont confirmés aussi par l’armée lettonne, qui a remarqué l’affaiblissement des bases militaires de l’armée de terre russe dans la région, à Pskov par exemple.
Cependant, «la Russie reste une menace réelle, on voit ce qui se passe en Ukraine», a soutenu le lieutenant van Eijk.
«Ce qui va se passer dans l’avenir est entre les mains (du président russe) Poutine, mais la menace est vraiment réelle.»
Le groupement tactique de la présence avancée renforcée en Lettonie (GT eFP Lettonie) sert donc de force de dissuasion, mais aussi de rempart pour la Lettonie en cas d’attaque.
Ce groupement tactique multinational est plus gros qu’un groupement de combat tactique régulier de l’armée canadienne et est «à la limite d’être un peu trop gros», selon son commandant.
Donc il ne manque pas de moyens pour manœuvrer efficacement sur le territoire letton, avec sa propre artillerie, ses chars de combat, sa propre logistique, ses propres troupes du génie, etc.
Des exercices de tirs étaient d'ailleurs programmés mercredi et des concours de chars jeudi.
Des soldats de plusieurs nationalités, des Italiens, des Allemands, des Espagnols, entre autres, s'exerçaient mercredi sur un vaste polygone dans une forêt lettonne. On entendait sporadiquement des détonations d’armes lourdes au loin et des observateurs avec des jumelles surveillaient l’exercice dans un bunker.
D’autres soldats dans une tente devaient s’exercer à identifier rapidement des cibles, soit des véhicules de combat russes, et décrire leurs caractéristiques en une minute.
Le «GT eFP Lettonie» a mené pas moins de quatre exercices en trois mois mobilisant tout le groupement tactique : «c’est phénoménal», de l’avis de l’officier, qui assure que les troupes ne sont pas fatiguées, car elles bénéficient d’une rotation tous les six mois.
Le lieutenant-colonel van Eijk convient que c’est un défi de commander une unité multinationale. C’est du «travail humain».
«Mon travail, c’est de m'assurer comment on peut utiliser les forces du mieux qu’on peut afin d’obtenir le résultat recherché.»
Il est maintenant un habitué des missions à l'étranger. Ce natif de la Colombie-Britannique a été déployé en Afghanistan. Il a passé la plus grande partie de sa carrière posté à Shilo (Manitoba), au 1er Groupe-brigade mécanisé du Canada (1 GMBC).
A-t-il le mal du pays? Qu’est-ce qui lui manque?
«Être à la maison», répond-il. Cela ne tardera pas : il pourra rentrer à la maison en décembre, au terme de son déploiement en Lettonie.