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La ministre canadienne des Sports, Pascale St-Onge, s'engage à mettre en place un mécanisme indépendant pour signaler les mauvais traitements dans le sport, au milieu d'un concert grandissant de voix d'athlètes exigeant des changements.
La ministre canadienne des Sports, Pascale St-Onge, s'engage à mettre en place un mécanisme indépendant pour signaler les mauvais traitements dans le sport, au milieu d'un concert grandissant de voix d'athlètes exigeant des changements.
Dans la foulée d'une histoire qui a attiré l'attention de la juge américaine Rosemarie Elizabeth Aquilina, qui a présidé l'affaire d'abus sexuels de Larry Nassar, plus de 70 gymnastes canadiens actuels et anciens ont adressé une lettre ouverte à Sport Canada, lundi, appelant à une enquête indépendante sur la culture toxique de leur sport.
Ce nombre a grimpé à plus de 150.
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St-Onge a déclaré qu'un mécanisme indépendant de signalement des abus et du harcèlement sera opérationnel d'ici la fin du printemps par l'intermédiaire du Centre de règlement des différends sportifs du Canada (CRDSC). Sport Canada a l'intention de rendre le mécanisme obligatoire pour tous les organismes nationaux de sport financés par le gouvernement fédéral.
«Soyons clairs: il n'y a pas de place pour le harcèlement, les abus, la discrimination ou les mauvais traitements dans le sport, a déclaré St-Onge dans le communiqué. Je tiens à souligner le courage des athlètes qui se sont manifestés.»
La gymnastique est connue pour ses histoires d'abus. Nassar purge une peine d'emprisonnement à perpétuité après avoir agressé sexuellement des dizaines de jeunes femmes et de filles sous couvert de soins médicaux. L'enquête et le procès ont été racontés dans le documentaire de Netflix Athlete A.
Dans un communiqué publié mardi, la juge Aquilina a mentionné qu'elle encourageait fortement Sport Canada à lancer une enquête par un tiers.
«L'importance de permettre à 150 femmes et filles, qui ont été abusées par Larry Nassar et les dirigeants de USA Gymnastics, de présenter un témoignage personnel sur leurs abus ne peut être sous-estimée, a déclaré la juge Aquilina dans un communiqué. Les athlètes et les victimes doivent être entendues, doivent être crues et doivent être protégées... Les vrais dirigeants accepteront la vérité et l'utiliseront pour protéger les victimes innocentes d'abus dans le sport.»
Les gymnastes canadiens affirment que les plaintes d'abus émotionnel, physique et même sexuel d'athlètes, dont beaucoup de mineurs, sont répandues dans leur sport.
«Lorsque vous grandissez dans ce genre d'environnement toxique, cela a des effets durables sur votre vie, a noté la gymnaste rythmique à la retraite Rosie Cossar à La Presse canadienne. Ce sont des stades de développement où vous n'avez aucun sentiment d'identité ou de confiance ou de ce qui est bien et mal. Vous êtes extrêmement vulnérable.»
Cossar, une Olympienne de 2012 et ancienne capitaine d'équipe, a précisé qu'elle avait documenté et signalé à Gymnastique Canada (GymCan) de nombreux incidents de mauvais traitements dont elle avait été témoin.
Dans leur lettre à Sport Canada, les athlètes ont déclaré que la peur des représailles les avait empêchés de s'exprimer pendant près d'une décennie.
«Cependant, nous ne pouvons plus rester assis en silence, ont-ils écrit. Nous racontons nos expériences d'abus, de négligence et de discrimination dans l'espoir de provoquer le changement.»
Cette initiative des gymnastes s'ajoute au concert grandissant de plaintes d'athlètes de bobsleigh et de skeleton, d'aviron, de rugby, d'athlétisme, de natation artistique, de lutte et de soccer féminin.
St-Onge a demandé une vérification financière de Bobsleigh Canada Skeleton après qu'une lettre similaire signée par plus de 90 athlètes demandait la démission de la présidente par intérim et du directeur de la haute performance de leur organisation nationale de sport.
«Les organisations sportives, les entraîneurs et les athlètes ont souligné la nécessité d'un mécanisme indépendant permettant aux athlètes de signaler les cas de maltraitance, a poursuivi St-Onge. La lettre ouverte (de lundi) nous rappelle que nous devons agir pour créer un changement de culture dans le sport à tous les niveaux.»
«Tous les athlètes ont le droit de pratiquer leur sport dans un environnement sain, sécuritaire, éthique et respectueux. Il s'agit d'une responsabilité collective de tous ceux qui sont dans l'entourage des athlètes.»
Le conseil d'administration de GymCan a nié dans un communiqué, mardi, avoir reçu la lettre, qui était adressée au président-directeur général de l'organisation, Ian Moss, ainsi qu'à la présidente du Comité olympique canadien, Tricia Smith, et à la présidente d'À nous le podium, Anne Merklinger.
«Bien que nous soyons attristés d'apprendre que des dizaines d'athlètes estiment que nous n'avons pas réussi à résoudre ces problèmes, nous nous engageons à continuer à éduquer et à plaider en faveur de réformes à l'échelle du système qui aideront à garantir que tous les participants se sentent respectés, inclus et en sécurité à l'entraînement et en compétition dans le sport, a déclaré le conseil d'administration dans un long communiqué. Nous sommes en phase avec les signataires de la lettre que nous faisons partie de la solution pour superviser les plaintes.»
De nombreux entraîneurs de gymnastique à travers le Canada ont fait face à des suspensions et même à des arrestations pour diverses formes d'abus émotionnel, physique et sexuel.
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Kim Shore, ancienne membre du conseil d'administration de GymCan, a déclaré avoir reçu plus de 100 plaintes de parents au cours des cinq dernières années. Elle a décrit un entraîneur qui aurait giflé des athlètes au visage, leur aurait tiré les cheveux, aurait procédé à des étirements physiques au point de les blesser et leur aurait dit qu'elles étaient 'grosses, stupides, laides'. L'entraîneur travaille toujours au Canada.
«Les histoires sont si cohérentes... et ce n'est pas il y a 20 ans, c'est aujourd'hui, a affirmé Shore, dont la fille a quitté le sport à 13 ans dans ce que Shore a appelé un environnement abusif. Il y a un aspect de violence sexiste. Ce sont de très jeunes enfants, je parle d'enfants de six, huit à 10 ans, cela semble être le début d'un traitement vraiment dur et cruel qui les aide à devenir plus conformes et faciles à contrôler et à manipuler.»
«Les enfants commencent à craindre davantage l'entraîneur qu'ils ne redoutent les aptitudes physiques que tout le monde trouve si effrayantes.»
De récentes plaintes dans plusieurs sports ont suscité de plus en plus d'appels à un examen approfondi du système sportif canadien dans son ensemble.
Rob Koehler, directeur général de Global Athlete, un mouvement international dirigé par des athlètes et fondé pour trouver le juste équilibre des pouvoirs entre les athlètes et les administrateurs, a suggéré une enquête similaire au rapport McLaren qui a révélé le dopage à l'échelle de l'État en Russie en 2016.
«Nous verrons sûrement un certain type de leadership, du moins je l'espère, a confié Koehler à La Presse canadienne. Je ne suis jamais sûr à 100%, mais un certain type de leadership dit que nous devons faire une pause ici et évaluer le paysage actuel de notre système au Canada pour corriger les actes répréhensibles afin de s'assurer qu'ils ne se reproduisent plus jamais.»
«Mais le sport semble être plus intéressé à s'isoler et à se tenir loin de tout scandale plutôt qu'à l'exposer pour le rendre meilleur. Je ne pense pas que cette vague d'activisme des athlètes va ralentir.»