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Selon de la Cour du Banc de la Reine, la nomination de Brenda Murphy, une unilingue anglophone, ne respectait pas la Constitution.
Le gouvernement fédéral soutient toujours que la nomination d'une lieutenante-gouverneure unilingue anglophone au Nouveau-Brunswick - la seule province officiellement bilingue au Canada - en 2019 n'était pas inconstitutionnelle.
Ottawa a décidé de porter en appel la décision du mois dernier de la juge en chef de la Cour du Banc de la Reine, Tracey K. DeWare, qui avait tranché que la nomination de Brenda Murphy, une unilingue anglophone, ne respectait pas la Constitution.
C'est la Société de l'Acadie du Nouveau-Brunswick qui, en 2019, s'était adressée au tribunal pour faire annuler la nomination de lieutenante-gouverneure du Nouveau-Brunswick, puisqu'elle ne maîtrisait pas, au moment de sa nomination, le français.
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«Le lieutenant-gouverneur du Nouveau-Brunswick doit être bilingue et capable de s'acquitter de toutes les tâches requises de son rôle en anglais et en français», avait écrit la juge DeWare dans son jugement daté du 14 avril.
Or, dans sa requête en appel, obtenue par La Presse Canadienne, Ottawa soutient que le pouvoir de nomination du lieutenant-gouverneur du Nouveau-Brunswick ne contient «aucune exigence de bilinguisme» et que ni la Constitution, ni la Charte canadienne des droits et libertés ne peuvent l'assujettir à telle exigence.
«Le pouvoir de nomination des lieutenants-gouverneurs par le gouverneur général en conseil laisse à Sa Majesté un pouvoir discrétionnaire complet quant au choix de la personne qu'elle nommera.
«Ce pouvoir n'est assujetti à aucune condition de bilinguisme, non plus qu'à aucune autre», peut-on lire dans la requête du gouvernement fédéral déposée vendredi à la Cour d'appel du Nouveau-Brunswick.
En affirmant que le lieutenant-gouverneur de la province doit être bilingue, la juge DeWare impose des conditions de nomination du lieutenant-gouverneur du Nouveau-Brunswick, ce qu'Ottawa considère être une modification à la Constitution qui nécessite l'approbation de toutes les provinces et du gouvernement fédéral.
Le gouvernement Trudeau défend aussi que la Charte canadienne des droits et libertés exige le bilinguisme d'institutions plutôt que de personnes, ce qui fait en sorte que la nomination de Mme Murphy, qui a pris ses fonctions en septembre 2019, n'était pas inconstitutionnelle.
«Si l'institution du lieutenant-gouverneur du Nouveau-Brunswick a ceci de particulier qu'elle est personnifiée par un seul individu qui joue un rôle unique sur les plans exécutifs et législatifs, il n'en demeure pas moins qu'il faut distinguer l'institution de l'individu. Un individu n'est pas une institution», martèle le fédéral.
La juge DeWare avait cependant estimé que le cas du lieutenant-gouverneur dans la seule province bilingue du Canada est particulier.
«La Charte n'exige pas que tous les employés du gouvernement, ministres, juges ou premiers ministres provinciaux et fédéral soient bilingues. Toutefois, ces personnes peuvent toutes être remplacées par une autre personne pour l'exécution de leurs fonctions, contrairement à un lieutenant-gouverneur», a expliqué la juge.
Malgré cela, Ottawa considère que «le lieutenant-gouverneur du Nouveau-Brunswick peut très bien promouvoir le statut, les droits et les privilèges des membres des deux communautés linguistiques par son engagement, ses actions, ses communications écrites, les initiatives qu'il promeut et les paroles qu'il prononce, le tout en étant appuyé du personnel de son bureau dont certains membres sont bilingues ou francophones.»
Dans sa décision, la juge DeWare n'a pas réclamé l'annulation de la nomination de Brenda Murphy, puisqu'une crise constitutionnelle et législative pourrait s'en suivre, notamment puisque cela minerait les lois, décrets et nominations qui ont été promulgués légalement.
La Cour d'appel devra donc statuer à savoir si, oui ou non, la juge DeWare avait raison de déclarer inconstitutionnelle la nomination d'une personne unilingue anglophone comme lieutenant-gouverneur du Nouveau-Brunswick.
En réaction, le Bloc québécois a indiqué que Justin Trudeau et les libéraux s'entêtent à vouloir nommer des personnalités qui ne parlent pas français aux postes de lieutenant-gouverneur et gouverneur général malgré l'avis de la Cour.
«Les Québécois, comme les communautés francophones et acadiennes, doivent prendre acte de cette décision, emblématique de l'action libérale vis-à-vis la langue française», a écrit le porte-parole du parti en matière de Langues officielles, Mario Beaulieu.