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L'ex-juge Jacques Delisle, 86 ans, est libre et n'aura pas à subir un deuxième procès pour le meurtre de son épouse, Nicole Rainville, trouvée morte en 2009.
L'ex-juge Jacques Delisle, 86 ans, est libre et n'aura pas à subir un deuxième procès pour le meurtre de son épouse, Nicole Rainville, trouvée morte en 2009.
Le juge accueille la demande de Jacques Delisle. Il ne subira pas de nouveau procès. Les procédures sont arrêtées. #noovoinfo
— Laurence Royer (@laurenceroyer4) April 8, 2022
Le juge Jean-François Émond, de la Cour supérieure, a ordonné vendredi matin un arrêt des procédures pour abus et délais déraisonnables, tel que le réclamait la défense.
«Les procédures sont terminées pour lui. C'est ce qui compte. À 86 ans, depuis plus de dix ans, il fallait que ça cesse», a déclaré son avocat, Me Maxime Roy, à la sortie du tribunal.
Jacques Delisle avait été condamné à la prison à perpétuité en 2012 pour le meurtre prémédité de son épouse puis libéré en avril dernier après avoir passé neuf ans derrière les barreaux, après que le ministre fédéral de la Justice, David Lametti, eut ordonné un nouveau procès.
Nicole Rainville est décédée d'une balle dans la tête en novembre 2009 et l'ex-juge Delisle avait été trouvé coupable de meurtre prémédité, alors qu'il soutenait de son côté qu'elle s'était suicidée.
Il avait porté sa cause en appel jusqu'en Cour suprême, mais sans succès.
Dossier juge Delisle. Réaction de son avocat : bien heureux que les procédures, qui ont duré plus de 10 ans, soient terminées. Jacques Delisle ne réagira pas. #noovoinfo pic.twitter.com/QMJadlXelD
— Laurence Royer (@laurenceroyer4) April 8, 2022
De nouveaux éléments de preuve avaient toutefois amené le ministre Lametti à poser le rare geste d'ordonner la tenue d'un nouveau procès: «Le critère pour que le ministre ordonne un nouveau procès est très élevé et il n'a pas, lui, le pouvoir d'ordonner l'arrêt des procédures. Donc le ministre n'aurait pas pu ordonner l'arrêt des procédures, mais du fait qu'il ordonne un nouveau procès, c'est forcément qu'il y a quelque chose de très sérieux qui a été relevé par l'équipe ministérielle», a précisé Me Roy.
Une part importante de la preuve reposait sur l'angle d'entrée du projectile, ce qui pouvait démontrer la possibilité ou l'impossibilité d'un suicide, et c'est cette portion de la preuve qui a été mise en cause et qui a amené le ministre à intervenir.
«Le pathologiste qui a fait l'analyse du cerveau de Mme Rainville n'a pas suffisamment colligé le travail qu'il a fait, n'a pas gardé de photos. Il aurait dû garder les coupes du cerveau pour permettre aux experts subséquents, que ce soit les experts de la poursuite ou les experts de la défense, de se prononcer», a expliqué Me Roy.
Dossier juge Delisle. Bref réaction de la Couronne : prend acte de la décision et décidera de la suite des choses après la lecture du jugement de 99 pages. #noovoinfo
— Laurence Royer (@laurenceroyer4) April 8, 2022
«Heureusement, certains éléments qui avaient été conservés ont permis de démontrer qu'il n'avait pas bien évalué la direction du projectile dans le cerveau de Mme Rainville, ce qui changeait tout entre la théorie est-ce que c'est un meurtre ou un suicide. Ces informations n'ont pas pu être présentées au jury lors du premier procès et le verdict aurait fortement pu être très différent lors du premier procès si ces informations avaient pu être présentées aux membres du jury.»
Si la défense avait eu cet élément de preuve en main lors du premier procès «ça aurait pu faire une différence névralgique au verdict», croit le juriste.
Cette décision envoie un message très clair, selon lui: «Lorsqu'il y a des scientifiques qui sont chargés de se prononcer sur un dossier, ils doivent conserver la preuve, surtout dans des infractions aussi graves qu'une accusation de meurtre.»
Me Roy n'a pas voulu se prononcer quant à savoir si c'est le pathologiste ou le Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale qui devait être blâmé, mais une chose est certaine à la lecture du jugement, a rappelé Me Roy, c'est l'obligation de conserver les éléments de preuve: «Lorsqu'on analyse, surtout une pièce comme le cerveau, qui n'est pas reproductible, on ne peut pas le reproduire, c'est ce qu'il faut comprendre. Il a été le seul à pouvoir analyser le cerveau. S'il le fait mal ou s'il ne conserve pas ce qu'il a fait, la défense est dans l'incapacité de vérifier ce qu'il a fait.»
Phil Couture s’est entretenu avec le criminaliste Rénald Baudry afin de décortiquer l’affaire. Voyez son reportage.
Me Baudry souligne qu'il est très rare qu'un ministre fasse une demande de révision : «La demande de révision du ministre, c’est arrivé 20 fois en 23 ans. C’est rarissime. Moi-même qui ait enseigné au-delà de 15 ans à l’École du Barreau, quand on passait sur cette question-là, je disais aux étudiants ‘’sachez que ça existe, mais que je ne l’ai jamais vue!’’»
Il relève également qu'«à partir du moment où la preuve est détruit ou n'existe plus, un nouveau procès deviendrait inéquitable».