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Le service Internet par satellite semble également prête à décoller au Canada.
Lorsqu'un violent cyclone a frappé la Nouvelle-Zélande en 2023, des milliers de personnes sur l'île du Nord se sont retrouvées sans Internet ni service de téléphonie mobile pendant près d'une semaine, les principales routes transportant des câbles de fibre optique ayant été emportées par les eaux.
Parmi les résidents qui ont réussi à conserver une connexion Internet pendant le cyclone Gabrielle, beaucoup comptaient sur une bouée de sauvetage qui n'existait même pas quelques années plus tôt: le service Internet par satellite de SpaceX, connu sous le nom de Starlink.
L'entreprise, qui fournit un service Internet via une constellation de milliers de satellites en orbite autour du globe, a connu une adoption significative en Nouvelle-Zélande depuis son lancement dans ce pays en 2021, en particulier dans les communautés rurales, ce qui a permis aux utilisateurs de rester connectés après la tempête tropicale.
Selon Bronwyn Howell, chercheuse en politique des télécommunications à l'Université Victoria, à Wellington, 14 % des ménages ruraux de la Nouvelle-Zélande sont connectés au satellite, presque uniquement grâce à Starlink.
«Le satellite est un cadeau. Les règles du jeu changent», se réjouit-elle.
La technologie semble également prête à décoller au Canada.
Alors que l'avenir de la connectivité par satellite continue de prendre forme, les observateurs de l'industrie estiment que sa croissance pourrait avoir des répercussions importantes sur la résolution des problèmes de résilience, l'amélioration de la connectivité dans les communautés rurales et éloignées et l'augmentation de la concurrence dans le secteur des télécommunications au Canada.
Des universitaires, des dirigeants de l'industrie et des responsables de la réglementation se sont réunis à Toronto le 16 octobre pour une conférence organisée par l'Ivey Business School, qui a examiné le rôle que la technologie satellite peut jouer dans les télécommunications canadiennes.
«Le satellite n'est pas une technologie de niche. Ce n'est pas seulement la technologie qui comble certaines des parties difficiles à atteindre, c'est une technologie qui touche à l'ensemble des télécommunications», a déclaré le vice-président du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC), Adam Scott, lors de la conférence.
«Plus la technologie satellite s'améliore, plus elle pourrait être une option attrayante pour les clients. Peut-être pas pour tout le monde, mais pour certains, dont ceux qui ne sont pas habitués à avoir beaucoup de concurrence ou de choix du tout», a-t-il ajouté.
Mme Howell a déclaré que l'introduction du satellite en Nouvelle-Zélande a marqué «la fin du monopole naturel» pour la connectivité dans les communautés rurales.
«En fait, de nombreuses zones rurales ont désormais une meilleure concurrence que certaines zones périurbaines et suburbaines, car elles ont un choix réel et viable de services par satellite qui fonctionnent. Les options stratégiques sont désormais beaucoup plus vastes», a-t-elle affirmé.
En juin, le gouvernement fédéral a lancé une consultation sur l'expansion des services sans fil grâce à la technologie satellite. Le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, François-Philippe Champagne, l'a alors saluée comme «la prochaine frontière où les Canadiens pourront utiliser leur téléphone pour avoir une connectivité absolue».
M. Champagne a également déclaré qu'avec la multiplication des catastrophes naturelles, les connexions par satellite pourraient servir de secours lorsque les réseaux traditionnels tombent en panne.
L'étude du gouvernement devrait se terminer ce mois-ci, et de nouvelles règles réglementaires devraient être annoncées dans les mois à venir et mises en place d'ici avril 2025, a fait savoir André Arbour, directeur général des politiques des télécommunications et d'Internet à Innovation, Sciences et Développement économique Canada.
«Il peut s'agir d'une solution inestimable, voire de la seule option, après une catastrophe naturelle, lorsque l'infrastructure traditionnelle est endommagée ou en cours de réparation», a-t-il déclaré. En attendant, certains opérateurs canadiens travaillent déjà sur son développement.
Rogers Communications a annoncé l'année dernière des partenariats avec SpaceX et Lynk Global pour offrir une connectivité satellite par téléphone partout au Canada. En décembre dernier, Rogers a franchi une étape clé en effectuant un appel test en utilisant les satellites en orbite terrestre basse de Lynk et son propre spectre sans fil.
Telus a également testé avec succès la technologie à la fin de l'année dernière en partenariat avec le fournisseur de télécommunications montréalais TerreStar Solutions et le fournisseur de services de réseau non terrestre Skylo.
Le mois dernier, Ottawa a annoncé un prêt de 2,14 milliards $ à l'opérateur de satellites Telesat pour l'aider à construire sa constellation de satellites à large bande, appelée Lightspeed. Le gouvernement a déclaré que Lightspeed permettrait aux habitants des régions les plus reculées du pays, notamment dans les communautés autochtones, les mines et les entreprises forestières, d'accéder à un réseau Internet moins cher et plus fiable.
Le premier des 198 satellites devrait être lancé en 2026.
Michèle Beck, vice-présidente principale des ventes canadiennes à Telesat, a soutenu que la technologie «crée un niveau de résilience que nous n'avons jamais vu auparavant».
«Elle peut être utilisée n'importe où au Canada, à condition que vous ayez une antenne. C'est fongible. Vous pouvez la configurer là où vous en avez besoin à tout moment. Cela assure d'avoir une continuité», a-t-elle affirmé.
Elle a souligné un autre avantage de la technologie lorsqu'il s'agit d'essayer d'éviter les pannes massives: les satellites individuels sont répartis dans une constellation.
«Vous n'avez pas de grosse cible dans le ciel, vous avez de très nombreux satellites qui créent ce réseau. Si un ou deux sont détruits ou brouillés, vous en avez des centaines d'autres pour compléter les liens», a indiqué Mme Beck.
Dans le nord du Canada, où certaines communautés éloignées ont des antécédents de problèmes de connectivité, tels que des vitesses lentes ou peu fiables, des prix élevés et des plafonds de données, beaucoup ont souligné que les satellites étaient une solution potentielle, a affirmé Rob McMahon, professeur associé de médias et de technologie à l'Université de l'Alberta.
À la conférence organisée par l'Ivey Business School, il a partagé des recherches sur les expériences des clients de deux communautés des Territoires du Nord-Ouest, qui ont montré que les utilisateurs de Starlink avaient tendance à signaler moins de problèmes que les clients d'autres services à large bande.
Mais M. McMahon a aussi observé certaines limites de la technologie. Starlink, en particulier, a actuellement une base de clients limitée — il est devenu disponible au Canada en 2021 — et pourrait voir sa vitesse ou sa qualité de service diminuer à mesure que son adoption augmente, a-t-il donné comme exemple.
Les coûts pour les consommateurs sont également encore relativement élevés. L'entreprise facture 140 $ par mois pour le service et 499 $ pour le matériel au Canada.
«La fiabilité est quelque peu floue. Il n'y a pas de techniciens locaux pour fournir une assistance en cas de panne du service, par exemple», a déclaré M. McMahon.
M. Arbour a ajouté que le satellite ne devrait pas être considéré comme un substitut complet au 4G ou au 5G. Il a indiqué que le ministère avait reçu des plaintes concernant des «zones mortes» où l'Internet par satellite ne semble pas fonctionner, même dans des endroits centralisés.
«Ce n'est pas au milieu de la baie d'Hudson. Ce n'est pas trop loin de la région du Grand Toronto, en fait», a-t-il spécifié.
Selon Mme Howell, ces préoccupations font écho à certaines des leçons tirées jusqu'à maintenant de l'expérience en Nouvelle-Zélande.