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Aux yeux de l'Association québécoise pour le droit de mourir dans la dignité (AQDMD) et du Collège des médecins du Québec, le qualificatif «neuromoteur» n'a pas lieu d'être dans le nouveau projet de loi.
Deux visions se sont fait entendre mardi sur la pertinence de réserver l'élargissement de l'aide médicale à mourir (AMM) aux handicaps seulement qualifiés de «neuromoteurs».
Plusieurs intervenants ont pris part à l'Assemblée nationale au début des consultations publiques sur le projet de loi du gouvernement Legault visant à étendre les soins de fin de vie.
D'une part, des groupes, comme le Collège des médecins, demandent sans détour le retrait de l'adjectif «neuromoteur» afin d'englober plusieurs types de handicaps, et ainsi s'arrimer avec le fédéral. De l'autre,l'ex-députée péquiste Véronique Hivon, considérée comme la «mère» de la loi actuelle sur l'AMM, appelle à la prudence et un débat de fond alors que la définition du mot «handicap» est «extrêmement large».
La ministre déléguée à la Santé et aux Aînés, Sonia Bélanger, a présenté le mois dernier le projet de loi 11, qui, si adopté, permettra à une personne atteinte d'une maladie grave et incurable menant à l'inaptitude, comme l'Alzheimer, de faire une demande anticipée pour l'AMM.
Il donnera également accès à l'AMM aux personnes souffrant d'un handicap neuromoteur grave et incurable (paraplégie, paralysie cérébrale, amputation après un accident, etc.).
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Aux yeux de l'Association québécoise pour le droit de mourir dans la dignité (AQDMD) et du Collège des médecins du Québec, le qualificatif «neuromoteur» n'a pas lieu d'être. Ils font valoir que son utilisation va dans le sens contraire du Code criminel sur les conditions d'admissibilité relatives à l'AMM qui excluent un tel adjectif depuis 2016.
«Toute maladie amène à un handicap qu'il soit léger ou important, qu'il soit temporaire ou transitoire. Et tout handicap vient d'une maladie», a plaidé devant les députées le président de l'AQDMD et neurochirurgien, le Dr Georges L'Espérance.
Aux inquiétudes soulevées quant à de possibles dérives en l'absence du mot `neuromoteur', le Dr L'Espérance répond que plusieurs balises sont déjà prévues telles que les critères de maladie incurable et grave.
«Mettons que j'ai un handicap parce que je me suis coupé le majeur. Bien, c'est peut-être incurable, mais ce n'est pas une maladie grave et ça ne mène pas à un déclin irréversible», a-t-il donné en exemple.
Le Dr L'Espérance a par ailleurs précisé que le handicap intellectuel sévère doit être exclu de la loi en raison de la question de l'aptitude au consentement.
La principale préoccupation du Collège des médecins est de priver de nombreuses personnes lourdement affectées par leur handicap, mais ne répondant pas au qualificatif de neuromoteur.
«La notion de handicap est claire partout au Canada, sauf ici. À notre connaissance, il n'y a pas eu de dérive nulle part au Canada à ce sujet-là», a soutenu le président du Collège, Dr Mauril Gaudreault, appelant à regarder l'état global de la personne et non l'origine de son handicap.
Selon lui, les balises pour éviter les dérapages sont claires et suffisantes. «À vouloir clarifier davantage (la notion de handicap), je pense que l'on complique les choses», a-t-il dit.
Mme Hivon estime que toute la notion de handicap ne représente «pas une mince affaire» ou «de petits débats».
«Qui peut juger en vertu de quel principe? Serait-il plus souffrant, par exemple, de perdre l'usage de ses jambes que de perdre l'usage de sa vue ou de son ouïe? Qui va déterminer ça?», s'est-elle questionnée, invitant les parlementaires à pousser leurs consultations en ligne.
Mme Hivon s'inquiète que l'absence de définition ou de restrictions autour du terme handicap ouvre la porte à l'AMM pour des cas de handicaps intellectuels graves et incurables où les personnes sont toujours aptes à consentir.
L'ancienne députée de Joliette estime que le Québec se tendrait un piège s'il décide de s'harmoniser avec le gouvernement fédéral et le Code criminel.
«On n'aurait jamais bougé en 2009, le Code criminel n'était pas ouvert à l'aide médicale à mourir. Et là on ne bougerait pas sur la demande anticipée», a affirmé Mme Hivon.
Le président de la Commission sur les soins de fin de vie, Dr Michel Bureau, croit que de retirer le qualificatif de «neuromoteur» risquerait d'inquiéter «98%» des gens avec un handicap qui ne se sentent pas concernés actuellement.
«Ils ne demanderont pas l'aide médicale à mourir, ils n'y ont jamais pensé, leur entourage n'y a jamais pensé. Et là vous allez leur demander. Je trouve que nous questionnons des gens qui ne veulent pas entendre la question», a-t-il mentionné.
La ministre Bélanger a reconnu au bout de la première journée de consultations que la notion de handicap neuromoteur était loin de faire consensus.
Sa mouture législative reprend l'intégral du projet de loi 38 de son collègue de la Santé, Christian Dubé, dont l'adoption avait échoué en juin dernier.
L'opposition lui a reproché de l'avoir présenté trop tard et d'y avoir inclus justement une disposition surprise sur les handicaps neuromoteurs graves. Cette disposition avait été larguée, dans une tentative d'accélérer l'adoption de la pièce législative.
Mardi, des intervenants ont aussi incité les législateurs à clarifier les dispositions entourant le refus de recevoir l'AMM et de l'implication des proches.
Les consultations doivent se poursuivre mercredi.