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Le film a été bien accueilli lors de sa première à Cannes en mai dernier, mais il a eu du mal à trouver son distributeur, après ces menaces juridiques de la part de Donald Trump, qui n'est pas heureux du contenu.
Le film controversé sur l'ascension de Donald Trump sort cette semaine en Amérique du Nord, malgré les déclarations de l'équipe de campagne du candidat républicain, qui l'a qualifié d'«ingérence électorale des élites hollywoodiennes» — et qui menace de poursuivre.
«Ça me fait un peu rire, parce que je ne me vois vraiment pas comme une "élite hollywoodienne", ici, au Canada», déclare le producteur principal du film «The Apprentice», Daniel Bekerman, dont les bureaux sont à Toronto.
Le film a été bien accueilli lors de sa première à Cannes en mai dernier, mais il a eu du mal à trouver son distributeur, après ces menaces juridiques de la part de Donald Trump, qui n'est pas heureux du contenu. La coproduction Canada-Irlande-Danemark, tournée en Ontario, sort en salles vendredi via le distributeur national Mongrel Media.
Le drame, réalisé par le cinéaste danois d'origine iranienne Ali Abbasi («À la frontière»), met en vedette Sebastian Stan dans le rôle d'un jeune Donald Trump au tout début de sa carrière dans l'immobilier, sous la direction du célèbre avocat new-yorkais Roy Cohn (Jeremy Strong, qui était Kendall Roy dans la série «Succession»).
Le film contient de nombreuses scènes controversées, où l'on voit par exemple Donald Trump prendre des pilules amaigrissantes, subir une chirurgie de réduction du cuir chevelu et, plus troublant encore, violer sa femme de l'époque, Ivana Trump, interprétée par Maria Bakalova.
Les avocats de M. Trump ont envoyé une mise en demeure menaçant de poursuivre les producteurs du film et tout éventuel distributeur. Mais Daniel Bekerman soutient que le film est davantage une «étude de caractère» sur Donald Trump qu’une «charge» contre le milliardaire ou même un film politique.
«Nous avons continuellement invité [l’équipe Trump] à visionner le film, M. Trump y compris. Et qui sait, peut-être qu’il serait surpris et qu'il l’aimerait», a déclaré le producteur torontois en entrevue. «Beaucoup de gens ont trouvé, je crois, que c’était étonnamment juste envers lui, même si cela n’édulcore rien de l’histoire.»
M. Bekerman assure que la scène d’agression sexuelle a fait l'objet d'une «recherche méticuleuse» et qu’il s'agit d'«une représentation fidèle de ce qu’Ivana elle-même a raconté sous serment».
Ivana Trump, décédée en 2022, a accusé son mari de l’avoir agressée sexuellement dans une déposition pour sa demande de divorce en 1989. Mais quatre ans plus tard, elle a clarifié ses propos, précisant que même si elle s'était sentie «violée» à l'époque, elle n'avait pas l'intention de sous-entendre qu'elle avait été violée «au sens littéral ou criminel» du terme.
Bien que l'équipe de M. Trump n'ait pas encore engagé de poursuites judiciaires contre «L'apprenti», M. Bekerman admet que la seule menace a eu «un effet dissuasif» sur de nombreux distributeurs.
«On a là quelqu'un de puissant, qui est simplement mécontent du portrait qu'on en a fait, et il est capable d'intimider une industrie», a déclaré le producteur. «Ce qui m'inquiète, en fait, c'est l'émergence d'une culture potentielle de la peur, où les entreprises ne risquent tout simplement pas même de dire des vérités importantes si cela devient trop risqué.»
M. Bekerman assure que «The Apprentice» bénéficie d’une «perspective clairement non américaine» et d’un tournage en dehors du système hollywoodien. «Je pense que l’industrie américaine est incroyablement conservatrice et incroyablement peu disposée à prendre des risques sur des projets qui soulèvent de grands enjeux», dit-il. «Je pense donc qu'un projet audacieux peut être mieux adapté au système indépendant en dehors des États-Unis.»
L’un des principaux financiers du film, la société Kinematics, soutenue par le milliardaire Dan Snyder, partisan de Donald Trump, s’est retiré du projet en septembre, invoquant des «divergences créatives». Briarcliff Entertainment, dirigée par le vétéran des grands studios Tom Ortenberg, a ensuite acquis les droits américains du titre auprès de Kinematics.
«C’est encourageant de trouver quelqu’un comme lui, qui croit en un bon récit et qui ne croit pas à l’intimidation de l’industrie ou aux menaces proférées par des personnes puissantes», a déclaré M. Bekerman à propos du partenaire Ortenberg, qui a produit des films tels que «Spotlight: Édition spéciale» en 2015, sur la dissimulation d’agressions sexuelles sur mineurs au sein de l’archidiocèse catholique de Boston.
M. Bekerman ajoute que Mongrel Media n’a pas hésité non plus à reprendre le film au Canada, puisque ce distributeur est reconnu pour «son audace et son soutien aux artistes qui ont leur propre point de vue unique».
Les producteurs du film ont également lancé une campagne de sociofinancement en septembre pour contribuer aux coûts de promotion du film, récoltant plus de 400 000 $ US.
M. Bekerman n’a «aucune idée» si une poursuite de M. Trump est toujours en cours, mais indique l’ancien président a finalement échoué à bloquer la sortie du film vendredi.
«Il est resté silencieux à ce sujet ces derniers temps. Je pense qu'il sait probablement qu'il ne veut pas lui donner d'oxygène maintenant», a estimé le producteur torontois.
Et même si la date de sortie du film est certainement opportune, à quelque 25 jours de l'élection présidentielle américaine, M. Bekerman estime que l'impact qu'il aura sur le scrutin est «totalement imprévisible». Il espère néanmoins que le film donnera aux électeurs une image plus complète de Donald Trump.
«Ce que nous essayons de faire avec ce film, c'est de comprendre comment nous en sommes arrivés là et de vraiment regarder derrière le rideau comment ce personnage nommé Donald Trump a été créé.»