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Dans son rapport d'enquête rendu public jeudi, Me Kamel note tout de même certaines lacunes le soir du drame et fait une série de recommandations à différentes instances, dont au SIM et au ministère de la Sécurité publique.
Le décès du pompier de Montréal Pierre Lacroix lors d'une opération de sauvetage dans les rapides de Lachine, en octobre 2021, est «accidentel», a conclu la coroner Me Géhane Kamel.
Dans son rapport d'enquête rendu public jeudi, Me Kamel note tout de même certaines lacunes le soir du drame et fait une série de recommandations à différentes instances, dont au Service de sécurité incendie de Montréal (SIM) et au ministère de la Sécurité publique. Elle invite notamment à s'assurer de la formation des pompiers en matière de sauvetage nautique.
Le 17 octobre 2021, le pompier Lacroix et trois de ses collègues ont tenté de venir en aide à deux plaisanciers en détresse sur le fleuve Saint-Laurent.
En effectuant des manoeuvres pour préparer le remorquage du bateau à la dérive, l'embarcation des pompiers s'est retrouvée dans un creux de vague et a chaviré alors que l'eau s'engouffrait à l'intérieur de l'habitacle, rappelle le rapport d'enquête de la coroner.
Les quatre secouristes sont ainsi tombés à l'eau. Trois d'entre eux ont pu être repêchés dans les minutes qui ont suivi, mais le pompier Lacroix n'a été retrouvé qu'après plusieurs heures de recherche sous l'embarcation. Le corps de la victime a été récupéré le lendemain matin de l'événement tragique. Selon l'autopsie, le décès du pompier Lacroix est attribuable à une noyade.
Dans ses constats, Me Kamel évoque plusieurs lacunes concernant le SIM. Elle souligne qu'«aucun pompier n’est muni de balises de localisation personnelles et le dispositif de localisation visuelle n’était pas à tout son potentiel».
«Un dispositif lumineux de type Strobe de forte luminosité, activé manuellement, aurait sans doute été un outil plus approprié afin de localiser un pompier à l’eau», écrit la coroner.
Me Khamel note aussi que le bateau des pompiers, nommé le 1864, a quitté seul en mission de sauvetage, alors qu’«au moins deux embarcations devraient être mises à l’eau simultanément pour parer à d’éventuels chavirements».
Qui plus est, le 1864, de modèle Hammerhead, ne disposait pas de radiobalise de localisation de sinistre ou de radio VHF «portative et étanche avec fonction permettant de transmettre des appels sélectifs» sur le réseau maritime.
La coroner déplore aussi des initiatives «sans coordination avec les partenaires, dont l’utilisation d’un drone», dans les recherches pour retrouver Pierre Lacroix. Et «certains chefs aux opérations du SIM ne connaissent pas l’entente opérationnelle pour assistance (conjointe) en cas d’incident nautique», ajoute-t-elle.
Me Kamel pointe également les «contraintes liées aux heures de service des marinas», qui ont mis «de la pression sur les secouristes en bateau qui devaient trouver du carburant alors que les points de ravitaillement étaient tous fermés».
Le rapport de la coroner découle d'une enquête publique menée l'automne dernier. L'exercice ne visait pas à déterminer la responsabilité criminelle ou civile d'une personne, précise le Bureau du coroner.
Me Kamel dresse une liste d'une vingtaine de recommandations pour éviter qu'un tel drame se reproduise.
Pour le SIM, elles portent principalement sur la formation nautique.
«Le soir du 17 octobre 2021, aucun des pompiers n'avait de formation en eaux vives et le poste de commandement ne comptait pas d'officiers qualifiés en sauvetage nautique. Il y a eu une victime, il y aurait pu en avoir six», souligne Me Kamel.
«On ne répétera jamais assez que la pierre angulaire de protection est la formation et la spécialisation. Plus on répète un exercice, plus on se qualifie comme expert», ajoute la coroner dans ses conclusions.
Me Kamel recommande, entre autres, que le syllabus de la formation théorique et pratique soit «suivi de manière uniforme par l'ensemble des pompiers» et qu'il inclue les techniques de sauvetage, d'autosauvetage et de nage en eaux vives.
Elle demande aussi une simulation annuelle pour le sauvetage nautique et aux trois ans avec la Garde côtière canadienne, le Service de la police de la Ville de Montréal et les services d'incendies limitrophes.
Également, chaque bateau devrait être muni d'un cellulaire de service afin que les pompiers puissent joindre un officier en cas de défaillance technique. Les pompiers nautiques devraient aussi avoir une balise GPS à leur équipement de protection individuelle , indique la coroner.
Le SIM devrait par ailleurs se procurer au moins deux motomarines pour couvrir les zones plus à risque, suggère la coroner.
Au ministère de la Sécurité publique, Me Kamel recommande notamment de réviser le guide relatif aux opérations des services de sécurité incendie pour y ajouter «des orientations précises en matière d'interventions nautiques afin de baliser les normes et les bonnes pratiques à l'échelle provinciale».
À l'ensemble de l'agglomération de Montréal, comprenant les arrondissements et les villes liées, la coroner propose de mieux identifier les zones à risque sur le fleuve pour les plaisanciers.
Me Kamel demande d'ailleurs à la Garde côtière canadienne de mettre «des balises pour prévenir des risques près des rapides de Lachine».
Elle termine ses recommandations en invitant Transports Canada à réviser l'encadrement pour obtenir la carte de compétence de plaisanciers, ainsi que le contenu de la formation et de l'examen qui y sont associés.
La Ville de Montréal a affirmé de son côté que le SIM avait «pris acte» des conclusions formulées dans le rapport de la coroner.
On rappelle qu'un comité formé d'instructeurs a été mis sur pied afin de «revoir l’offre de service, la formation et le maintien des compétences des pompières et pompiers faisant partie de l'équipe de sauvetage nautique.»
On confirme également que les recommandations dans le rapport seront incluses dans les «réflexions et propositions» de ce comité.
Au moins 12 embarcations dites de «hautes performances» ont été acquises depuis le drame qui a coûté la vie à Pierre Lacroix. «Cette nouvelle flotte entrera progressivement en service dès mai 2023», précise-t-on.