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«La situation n'a jamais été aussi grave».
Une organisation à but non lucratif a demandé mardi au gouvernement haïtien de libérer certains détenus alors que le système carcéral fait face à une augmentation rapide des cas de choléra dans le pays qui est aussi touché par une diminution des réserves en eau potable.
L'organisation Health through Walls, qui fournit des soins médicaux aux prisonniers en Haïti, a noté que non seulement les détenus sont à risque, mais aussi les agents de sécurité, les employés de cuisine et le personnel de santé.
«Une action immédiate est nécessaire pour éviter davantage de décès évitables dans les prisons, a déclaré l'organisme. La situation n'a jamais été aussi grave».
Cet appel au gouvernement intervient alors qu'Haïti reste largement paralysé par des gangs et des manifestants antigouvernementaux, entraînant de graves pénuries de carburant, d'eau et d'autres approvisionnements de base, et que le gouvernement demande l'intervention immédiate de troupes étrangères.
Le porte-parole du département d'État américain, Ned Price, a indiqué mardi que le gouvernement examinait la demande d'aide d'Haïti en coordination avec les partenaires internationaux.
«Nous condamnons fermement tous ceux qui font obstacle à la distribution équitable et immédiate des fournitures humanitaires indispensables, a-t-il dit. Il s'agit d'un statu quo qui ne peut pas persister, et nous continuerons à travailler et à discuter avec des partenaires internationaux sur les moyens de faciliter la livraison d'une aide humanitaire vitale au peuple haïtien, y compris un soutien médical essentiel pour faire face à l'épidémie de choléra».
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Haïti a signalé plusieurs décès dus au choléra et plus de 100 cas suspects après avoir annoncé la semaine dernière les premiers décès dus au choléra déclaré en trois ans. Depuis, le nombre de cas continue de croître, notamment dans les prisons.
Le personnel médical travaillant au pénitencier national de Port-au-Prince, qui est la plus grande prison d'Haïti avec plus de 4000 détenus, a signalé au moins 20 décès, 5 cas confirmés et 200 autres cas de diarrhée aiguë en seulement une semaine, a soulevé la co-fondatrice de l'organisation à but non lucratif, Michelle Karshan.
La bactérie du choléra se propage facilement et peut provoquer une diarrhée et une déshydratation sévères pouvant être mortelles.
Les 20 prisons d'Haïti détiennent environ 11 000 détenus, et les professionnels de la santé sont extrêmement inquiets étant donné que le taux d'occupation dans les quatre principales prisons du pays dépasse les 400 %. En outre, les détenus sont depuis longtemps confrontés à une grave pénurie de nourriture, d'eau et de soins médicaux, selon un récent rapport des Nations Unies.
Cette année seulement, plus de 180 détenus sont morts de malnutrition sévère, selon une lettre du secrétaire général des Nations Unies qui n'a pas été rendue publique, mais a été partagée dimanche avec l'Associated Press.
L'ONU a également noté dans son rapport qu'il n'y a qu'un seul médecin pour plus de 1000 détenus et que les livraisons de médicaments sont `rares et limitées'.
«Les détenus dépendent entièrement des soins prodigués par des organisations caritatives», indique le rapport.
Health Through Walls a demandé au ministre haïtien de la Justice de libérer les détenus gravement malades, mal nourris ou ceux qui ont purgé leur peine, mais qui n'ont pas comparu devant un tribunal, entre autres.
«La détention provisoire continue de remplir les prisons et crée un stress supplémentaire dans le système judiciaire en cette période de crise où les besoins fondamentaux ne peuvent être satisfaits», a déclaré l'organisme.
Plus de 83% des détenus n'ont pas encore été jugés, certains attendant près de dix ans avant leur première comparution devant un tribunal, selon le rapport de l'ONU.
Le porte-parole du ministre de la Justice, Berto Dorcé, n'a pas pu être joint dans l'immédiat pour commenter.
La demande de l'organisme à but non lucratif intervient quelques jours seulement après que le secrétaire général de l'ONU, António Guterres, a souligné dans une lettre au Conseil de sécurité que le système pénitentiaire d'Haïti doit être amélioré, «compte tenu de la surpopulation carcérale alarmante».
La dernière épidémie de choléra en Haïti a tué près de 10 000 personnes. Elle avait commencé il y a plus de dix ans après que des Casques bleus de l'ONU ont introduit la bactérie dans le plus grand fleuve du pays par le ruissellement des eaux usées de leur base.
Parmi ceux qui sont morts se trouvait le directeur du pénitencier national d'Haïti, a rappelé Mme Karshan.