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En décembre, après que les agriculteurs ont retardé la récolte aussi longtemps qu'ils le pouvaient, le FAO a distribué dans toute l'Ukraine 26 000 bâches en plastique données par le Canada et le Japon.
Oleh His marche avec fierté et détermination dans la boue détrempée à travers des rangées et des rangées de grandes bâches blanches en polyéthylène, chacune estampillée d'un logo canadien et remplie à craquer de céréales récoltées cette année.
Le producteur de céréales de 24 ans, à la carrure frêle et aux cheveux blonds, est également volontaire auprès de l'armée ukrainienne. Il partage son temps entre la gestion de la ferme familiale et la cueillette d'argent et de fournitures pour le front.
Lorsque la Russie a envahi l'Ukraine, il y a un an, le producteur agricole a tout de suite su qu'il aurait un problème. «La chaîne logistique des produits agricoles avec le reste du monde s'est rompue», a expliqué M. His en ukrainien, par l'intermédiaire d'un traducteur de sa ferme, AgroKorovai, située à seulement 17 km de la frontière avec la Pologne.
Malgré cet emplacement relativement sûr, la guerre a dévasté les producteurs agricoles de la région. Les liaisons commerciales habituelles à travers la mer Noire vers l'Afrique et l'Asie ont été coupées. Le coût du diesel et des engrais a considérablement augmenté.
Les blocages des ports ont aussi provoqué une crise alimentaire dans certaines régions d'Afrique. Sans grands entrepôts pour empêcher la récolte de pourrir, M. His a raconté que certaines fermes avaient dû vendre leurs céréales à perte et avaient fait faillite.
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En décembre, après que les agriculteurs ont retardé la récolte aussi longtemps qu'ils le pouvaient, l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) a distribué dans toute l'Ukraine 26 000 bâches en plastique données par le Canada et le Japon.
«Nous pensions qu'elles n'arriveraient pas à temps, mais tout s'est bien passé», a souligné M. His, qui a reçu 10 bâches blanches du Canada et en a également acheté quelques-unes, au cas où.
Ces bâches sont de longs sacs en plastique blanc qui s'étendent sur toute la longueur du champ. Elles protègent les céréales des éléments jusqu'à ce qu'elles puissent être vendues et exportées. «Ça nous a permis de sauver beaucoup d'argent», admet Oleh His.
Un hiver moins rigoureux cette année a été bienvenu en ce qui concerne le calendrier, a par ailleurs mentionné le chef du bureau de contrôle de la FAO en Ukraine, Pierre Vauthier. «Certaines bâches sont arrivées très tard et oui, bien sûr, elles vont être utilisées l'année prochaine, mais c'est très, très marginal», a expliqué M. Vauthier dans une entrevue virtuelle depuis Kyiv.
De nombreuses fermes plus proches de la ligne de front ont vu le peu de capacité de stockage qu'elles avaient détruit par les bombardements et les mines terrestres, a déploré M. Vauthier, et environ 15 % de la capacité de stockage de céréales du pays a disparu. «L'impact est assez important.»
La nouvelle a incité le Canada à s'associer au Japon pour empêcher la perte de céréales ukrainiennes, avec un investissement de 52 millions $ dans les bâches blanches.
Le projet a été annoncé en juin dernier, lorsque le premier ministre Justin Trudeau a rencontré d'autres dirigeants du G7 en Allemagne pour discuter de mesures visant à enrayer la famine causée par l'invasion russe.
Au total, le stockage des céréales devrait empêcher le gaspillage de plus de cinq millions de tonnes de céréales, mais il est peu probable que les défis diminuent alors que l'Ukraine entre dans sa deuxième année de guerre.
Un accord conclu cet été entre la Russie et l'Ukraine pour rouvrir les ports d'Odessa afin de permettre le transport des exportations de céréales via la mer Noire a amélioré la situation, mais le processus est lent et inefficace, a admis M. Vauthier, de la FAO. Cet accord doit être renouvelé en mars et M. Vauthier a déclaré qu'il était essentiel d'en conclure un autre.
«J'espère qu'ils vont accepter de continuer à faire ce qui est absolument essentiel pour le pays et pour la sécurité alimentaire dans le monde», a-t-il affirmé.
Il s'attend à ce que les exportations soient à nouveau réduites en 2023 et a noté que davantage de bâches pourraient être nécessaires afin de préserver la récolte de céréales. Les petites fermes auront besoin d'unités mobiles de stockage de céréales, qui ressemblent à des chapiteaux de cirque en plastique, pour entreposer leurs récoltes.
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La FAO s'emploie également à livrer des semences et des génératrices aux fermes proches de la ligne de front, afin d'y maintenir la production agricole.
M. His, lui, espère que le Canada et d'autres pays donneront plus de bâches, mais avec le profit qu'il a pu dégager cette année, il prévoit d'en acheter quelques-unes l'année prochaine.
«C'est beaucoup plus rentable que de construire un entrepôt, dit-il. Les matériaux de construction sont devenus plus chers, donc la construction d'entrepôts est plus coûteuse qu'avant. Nous avons construit des entrepôts pour 5000 tonnes l'année dernière, ce qui était cher, et maintenant ce serait encore plus cher.»
La guerre l'a également incité à rechercher de nouveaux marchés pour ses céréales, plutôt que de vendre directement aux commerçants d'Odessa. Il dispose maintenant d'un camion et livre ses céréales directement en Pologne.
«Toute crise offre ses opportunités, admet-il. Même dans une telle crise, nous ne baissons pas les bras: nous commençons à chercher des opportunités.»