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La députée de Merci, Ruba Ghazal, demande à la ministre Biron de mettre en place un plan pour assurer l’accès à l’avortement partout au Québec, et d’y inclure l’accès à la contraception gratuite.
L’accès à l’avortement dans toutes les régions du Québec doit être la priorité de la ministre responsable de la Condition féminine, Martine Biron, davantage que l’élaboration d’une loi qui protégerait ce droit, plaide la députée de Mercier, Ruba Ghazal, et des organismes communautaires.
Mme Ghazal, aussi porte-parole de Québec solidaire en matière de condition féminine, avait d’abord abordé cet enjeu lors d’un point de presse à l’Assemblée nationale au début du mois de juin.
«L’aspect légal au Québec n’est pas menacé, en tout cas pas en ce moment. Mais l’aspect (de) l’accessibilité, ça, c’est très difficile », affirme-t-elle, en entrevue.
La députée demande à la ministre Biron de mettre en place un plan pour assurer l’accès à l’avortement partout au Québec, et d’y inclure l’accès à la contraception gratuite.
«Par exemple, au Témiscamingue, il y a des femmes qui doivent faire de longues heures de route pour se rendre à Rouyn-Noranda ou à Val-d’Or pour interrompre leur grossesse, évoque Ruba Ghazal. C’est ce genre d’exemple qui nous sont rapportés qui fait que l’éloignement des services d’avortement réduit l’accès aux femmes, surtout quand on sait qu’on veut interrompre une grossesse, il y a l’aspect temps qui est important. »
Une affirmation à laquelle adhère la coordonnatrice générale de la Fédération du Québec pour le planning des naissances (FQPN), Jess Legault.
«Nous, on ne veut pas de loi, on veut vraiment augmenter l’accès dans les régions», déclare-t-elle, soulignant que le quart des points de service pour l’avortement se situent à Montréal.
Mme Legault déplore aussi que, dans plusieurs régions du Québec, il faille se déplacer dans une région centralisée afin d’avoir accès à un avortement après un certain nombre de semaines de grossesse.
«Si la personne réalise trop tard, disons à 10 semaines (de grossesse), et que dans la région ça va jusqu’à 12 semaines, mais les délais d’attente vont jusqu’à trois semaines, on est d’accord que rendu-là, il va falloir quitter sa région pour avoir accès à l’avortement», illustre-t-elle.
Parmi les régions où l’accès à l’avortement est difficile, on compte la Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine.
«On se rend compte que c’est un enjeu majeur, puisqu’il y a des femmes qui doivent parcourir des centaines de kilomètres pour avoir accès à un avortement chirurgical, par exemple», déclare Léa Blouin-Rodrigue, agente de développement en santé des femmes à la Table de concertation des groupes de femmes Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine.
«En Gaspésie, l’avortement chirurgical est seulement disponible à Gaspé, c’est jusqu’à douze semaines et six jours (de grossesse), après il va falloir se déplacer à l’extérieur de la région. Aux Îles-de-la-Madeleine, ça va jusqu’à 16 semaines», explique Mme Blouin-Rodrigue.
En plus du nombre de semaines de grossesse limité auquel les femmes peuvent obtenir un avortement dans la région, s’ajoutent le peu d’heures d’ouverture des points de service.
À Gaspé, il est possible de prendre rendez-vous pour un avortement qu’une journée par semaine, évoque Mme Blouin-Rodrigue.
Selon la Dre Diane Francoeur, directrice générale de Société des obstétriciens gynécologues du Canada, «le Québec est de loin la province où l’accessibilité (à l’avortement) est la plus grande». Elle reconnaît toutefois que des problèmes d’accès peuvent survenir en région éloignée.
«C’est pour ça qu’on est des militants féroces pour permettre la connaissance et l’accès à l’avortement médical», affirme-t-elle, disant que l’avortement médical est «extrêmement sécuritaire». La pilule abortive peut être prescrite en télémédecine si la personne a un cycle menstruel régulier, précise la Dre Francoeur.
Toutefois, l’avortement médical peut être pratiqué au maximum 63 jours après la date des dernières menstruations, soit à la neuvième semaine de grossesse.
«Lorsqu’on parle d’accès à l’avortement, il faut vraiment prioriser justement pour que les femmes ne soient pas prises hors délais, et à ce moment-là être obligée de prendre un avortement chirurgical», affirme la gynécologue, en faisant référence aux délais avant d’obtenir un rendez-vous.
«Nous, les gens qui sont impliqués en santé de la femme, on s’inquiète de l’immense pénurie de personnel qui s’en vient, et il faut commencer déjà à plancher sur des corridors de service dès qu’il y a des bris de service», plaide la Dre Francoeur.
Toutefois, Jess Legault, de la FQPN, craint que l’accès à l’avortement par instrument soit «mis en péril» par l’arrivée de l’avortement médical.
«On constate dans notre bottin de ressources que certains points de service, maintenant, offrent seulement l’avortement par instruments après (neuf) semaines, parce que c’est la limite de l’avortement par médicament», évoque Mme Legault, disant qu’il faut s’assurer que les femmes aient toujours le choix entre les deux options.
Pour Léa Blouin-Rodrigue, la solution passe autant par l’augmentation des points de services que par l’augmentation des plages horaires où l’avortement est offert.
«C’est sûr qu’il faut avoir plus de points de service, parce qu’on ne règlera pas l’enjeu de la distance et de la grandeur du territoire si on n’ajoute pas des points de service pour l’avortement chirurgical. Aussi, ajouter des plages horaires, ça donnerait beaucoup plus de liberté et de choix pour les femmes qui veulent avoir accès à l’avortement », affirme-t-elle.
La Presse Canadienne a demandé au cabinet de la ministre responsable de la Condition féminine, Martine Biron, de se prononcer sur cet enjeu, qui a répondu ne pas vouloir faire de commentaires sur le sujet pour l’instant.