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La ministre Joly publie un rapport d'une trentaine de pages sur «l'avenir de la diplomatie», qui souligne notamment que le Canada a une présence relativement faible aux Nations unies et dans ce qu'elle appelle des «pays stratégiquement importants».
La ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, promet un plan d'ici l'automne pour une réorganisation du service extérieur, où les diplomates auraient une meilleure compréhension des langues et des sujets pertinents à leurs affectations.
«Il est crucial de veiller à ce que nous ayons une diplomatie modernisée, adaptée à notre objectif _ adaptée au 21e siècle, a déclaré la ministre Joly dans un discours à tous les chefs de mission canadiens réunis à Ottawa mercredi. Devant nous se trouve le défi unique, d'une génération, et la façon dont nous y répondrons définira les prochaines décennies.»
La ministre promet un plan de mise en ?uvre d'ici le 1er septembre sur une réorganisation de la façon dont Affaires mondiales Canada embauche des diplomates, gère son personnel et ses systèmes internes, et priorise les ressources. Ce plan comprendrait une mise à jour tous les six mois sur les progrès accomplis, jusqu'en 2026.
Cette initiative intervient alors que le monde est en proie à de nouveaux conflits, au changement climatique et à la montée de l'autoritarisme, et à la suite d'une série d'incidents et d'examens embarrassants au sein d'Affaires mondiales Canada.
L'automne dernier, le commissaire à l'intégrité du secteur public a conclu que le ministère des Affaires étrangères avait enfreint les règles fédérales de saine gestion en offrant une promotion à une cadre qui avait notamment «poussé et giflé un employé».
Un rapport publié en août dernier par le Centre d'études en politiques internationales de l'Université d'Ottawa a par ailleurs révélé que seulement 23 % des diplomates qui occupaient des postes exigeant une langue étrangère satisfaisaient aux exigences de compétence. Ce taux de conformité chutait à 18 % parmi les diplomates canadiens qui occupaient des postes de direction.
Et dans une étude sénatoriale de plusieurs mois, des diplomates actuels et passés ont témoigné que le Canada n'accordait pas la priorité adéquate à la spécialisation des agents du service extérieur ou des délégués commerciaux dans une région, une langue ou un sujet particuliers. Au lieu de cela, Affaires mondiales Canada les répartit entre divers rôles à Ottawa et dans les capitales mondiales.
Pendant ce temps, le ministère a subi l'an dernier une cyberattaque, qui n'a pas été attribuée par Ottawa à un acteur en particulier.
Mme Joly a déclaré mercredi qu'elle avait chargé son ministère de mettre à jour la cybersécurité, ainsi que la manière dont il soutenait les diplomates et le personnel embauchés pour travailler dans des missions à l'étranger.
«Il est nécessaire de veiller à ce qu'ils se sentent appuyés, entendus et valorisés pour améliorer notre culture d'entreprise. Nous savons qu'il est nécessaire de réorganiser le recrutement et la formation pour accroître la diversité, a-t-elle déclaré. Nous devons investir dans notre main-d'?uvre. Nos employés sont nos yeux et nos oreilles sur le terrain.»
La ministre Joly a publié un rapport d'une trentaine de pages sur «l'avenir de la diplomatie», qui souligne notamment que le Canada a une présence relativement faible aux Nations unies et dans ce qu'elle appelle des «pays stratégiquement importants».
«Le ministère a parfois été lent à réagir, ou pas assez concentré sur les problèmes émergents», lit-on dans une ébauche du rapport, qui a été fournie aux journalistes, mais n'avait pas été rendue publique mercredi après-midi. «Beaucoup des contraintes qui entravent Affaires mondiales Canada sont imposées de l'intérieur», indique-t-on, notant «les conséquences imprévues d'une culture d'entreprise trop résistante au risque».
Le rapport indique que le service extérieur a connu une dotation de personnel relativement stable au fil des ans, malgré «l'arrêt virtuel du recrutement de débutants et d'autres postes dans le service extérieur pendant plus d'une décennie, en raison de contraintes budgétaires».
L'ébauche du rapport souligne que les alliés ont embauché plus de diplomates ces dernières années, la France s'engageant cette année à augmenter son service extérieur de 20 %.
Le rapport ne précise pas quelles ambassades et missions pourraient accueillir de nouveaux postes diplomatiques. Mais Mme Joly a indiqué mercredi que le Canada aura plus de diplomates spécialisés. «Nous augmenterons notre expertise politique dans des domaines clés tels que le changement climatique, l'énergie et les minéraux critiques (l'intelligence artificielle), la cyberpolitique et la politique numérique», a-t-elle précisé.
«Nous renforcerons notre capacité d'anticiper et de gérer la réponse du Canada aux crises prolongées.»
Le rapport recommande «une main-d'?uvre diversifiée, hautement qualifiée, bilingue, en bonne santé et engagée envers l'excellence», notant qu'il y a actuellement des lacunes dans la poursuite de cet objectif par le ministère.
Il exige également une «tolérance zéro pour les comportements toxiques» et note que le ministère doit aller au-delà de l'hypothèse selon laquelle les diplomates mariés pourront compter sur un conjoint non rémunéré pour s'occuper des tâches domestiques.
«Les cadres supérieurs de tout le ministère devraient être tenus responsables d'assurer une utilisation égale du français et un environnement fonctionnellement bilingue», indique le rapport.
«Affaires mondiales Canada a restreint son cercle de partenaires de confiance», lit-on, appelant à une meilleure collaboration avec les autres ministères, les groupes de la diaspora et le milieu universitaire.
Le porte-parole conservateur en matière d'affaires étrangères, Michael Chong, a déclaré mercredi qu'il n'était pas impressionné par le fait que le rapport semblait renforcer l'idée de la nécessité d'un service étranger bilingue. Il souligne que de nombreux pays n'utilisent pas le français et que la maîtrise de la langue désavantage les personnes qui parlent anglais et ont grandi dans des foyers où les langues asiatiques étaient parlées.
«Les problèmes de recrutement sont le résultat d'exigences en matière de compétences linguistiques, donc c'est vraiment le contraire de ce qui est nécessaire, a-t-il soutenu. Il faut mettre l'accent sur le mérite, en tant que principe fondamental du recrutement et de la promotion dans la fonction publique.»
L'ébauche de rapport indique qu'il s'est inspiré de 80 entretiens avec le personnel du ministère et qu'il s'agissait de plus de 9000 idées et soumissions.
Le Canada a entrepris pour la dernière fois un examen de son service extérieur en 1981, et les sénateurs ont fait valoir que bon nombre des questions soulevées par une commission royale d'enquête sont toujours pertinentes quarante ans plus tard.