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Le directeur parlementaire du budget, Yves Giroux, suggère que c'est aux Canadiens de décider si la proposition du gouvernement visant à créer un nouveau régulateur contre les méfaits en ligne est nécessaire ou n'est qu'un exercice bureaucratique.
Plus tôt cette année, le gouvernement a présenté un projet de loi visant à réduire l'exposition aux contenus préjudiciables en ligne, notamment la victimisation sexuelle des enfants, le partage de contenus intimes sans autorisation et les contenus incitant à la haine, à la violence ou à l'extrémisme.
La loi proposée, baptisée Loi sur les préjudices en ligne, créerait une commission de sécurité numérique chargée de l'application de la loi, un médiateur pour aider les Canadiens et un nouveau bureau administratif pour soutenir les deux.
La semaine dernière, M. Giroux a publié une estimation du coût de la nouvelle loi gouvernementale sur les préjudices en ligne, qui coûterait environ 201 millions $ sur cinq ans. Il a fondé ce calcul sur une estimation de Patrimoine canadien selon laquelle il faudra jusqu'à 300 employés pour faire appliquer la loi.
Le ministre de la Justice, Arif Virani, a affirmé que la nouvelle loi est nécessaire pour obliger les entreprises opérant dans le domaine des médias sociaux à prendre des mesures pour mieux protéger les Canadiens contre l'exposition à des contenus dangereux en ligne, en particulier les mineurs.
Mais le chef conservateur Pierre Poilievre s'est engagé à abandonner le projet de loi, citant l'estimation des coûts de M. Giroux comme preuve que la loi ne fait que créer davantage de bureaucratie.
Il a qualifié le projet de loi de tentative de censure de la part du gouvernement du premier ministre Justin Trudeau, bien que M. Virani et les responsables de la justice aient déclaré qu'il respecterait le droit à la liberté d'expression garanti par la Charte.
«Vous pouvez dire que c'est plus de bureaucratie ou… cela donne du mordant à la loi en garantissant qu'il y a un organisme d'application qui est là pour garantir que la loi est respectée», a déclaré M. Giroux, en entrevue lundi.
«Mais le fait est que, selon le gouvernement, ils auront besoin de 330 employés. … On peut dire que ce sont des bureaucrates. On peut dire que ce sont les outils nécessaires.»
L'un des experts consultés par le gouvernement pour élaborer le projet de loi a souligné que fixer un prix à la création d'un nouveau régulateur allait toujours susciter la controverse.
«C'est un coût inévitable», a déclaré Emily Laidlaw, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en droit de la cybersécurité à l'Université de Calgary, dans une entrevue.
«Nous ne remettons pas en question l'existence du Bureau de la concurrence ou du (Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes). Nous savons que nous en avons besoin et c'est la même chose maintenant pour la réglementation des plateformes et les préjudices en ligne.»
Michelle Rempel Garner, la députée conservatrice qui a demandé à M. Giroux de faire l'estimation des coûts, a écrit dans un article en ligne la semaine dernière que le coût du nouveau système est encore plus une insulte, en raison de ce qu'elle a décrit comme le sous-financement de la police pour faire appliquer les lois existantes.
Les conservateurs ont affirmé qu'ils démantèleraient la loi libérale si elle était adoptée et veilleraient plutôt à ce que les lois existantes soient appliquées et mises à jour pour tenir compte du fait que les Canadiens ont une vie numérique et sont confrontés à des réalités telles que le harcèlement en ligne.
Mme Laidlaw a déclaré qu'elle reconnaissait que des changements plus sévères au Code criminel étaient nécessaires, mais a nuancé que de telles réformes ne suffisaient pas à elles seules.
«Comment réglementez-vous réellement ces gigantesques sociétés numériques qui ont un impact énorme sur notre société ? demande-t-elle. D'autres pays mettent en place des organismes de réglementation parce que c'est le seul moyen de résoudre ces problèmes, et le Canada emboîte donc vraiment le pas.»
Tel que proposé, le projet de loi donnerait au nouveau régulateur le pouvoir d'imposer des amendes aux entreprises qui enfreignent ses règles. Celles-ci incluent l'obligation pour les entreprises de supprimer dans les 24 heures les images d'abus sexuels sur enfants ou les images intimes partagées sans consentement.
Les entreprises devraient également fournir des plans de sécurité décrivant les mesures qu'elles prennent pour réduire l'exposition des utilisateurs à d'autres contenus, comme les contenus liés au terrorisme ou pouvant être utilisés pour intimider un enfant.
M. Giroux a déclaré que le régulateur pourrait compenser certains de ses coûts par des amendes ou en imposant des frais, mais cela n'a pas été pris en compte dans son analyse, car il n'y a pas suffisamment de détails sur la façon dont cela fonctionnerait.
Il a déclaré que les chiffres du ministère suggèrent qu'il faudrait probablement au moins deux ans avant que les organismes d'application soient opérationnels, mais il a ajouté que les coûts pourraient être plus élevés si une proposition visant à permettre à la Commission canadienne des droits de la personne d'entendre les plaintes était mise en œuvre.
«Il pourrait également y avoir des frais juridiques s'ils devaient engager des poursuites ou avoir besoin de conseils juridiques pour se lancer dans ce domaine relativement nouveau pour eux», suggère le directeur.
Les conservateurs et des opposants au projet préviennent que le rétablissement de la capacité de la commission à entendre les plaintes liées aux discours de haine en ligne pourrait conduire à un afflux de cas qui alourdirait sa charge de travail et risquerait de paralyser la liberté d'expression.
Les responsables du ministère de la Justice affirment que seuls les exemples de discours les plus extrêmes seraient susceptibles d'être examinés.