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Avec la hausse des taux d’intérêt, les petits investisseurs immobiliers doivent refaire leurs calculs tandis que les prix des immeubles à revenus sont sous pression et que les coûts de financement augmentent.
Avec la hausse des taux d’intérêt, les petits investisseurs immobiliers doivent refaire leurs calculs tandis que les prix des immeubles à revenus sont sous pression et que les coûts de financement augmentent.
Comme n’importe quelle entreprise, la rentabilité d’un investissement immobilier dépendra du prix d’achat du bâtiment, des coûts de financement, des dépenses d’entretien et des revenus de location, résume François Des Rosiers, professeur titulaire au département de finance, d’assurance et d’immobilier de l’Université Laval.
Les conditions gagnantes deviennent plus difficiles à réunir dans un environnement où les taux augmentent et où les prix demeurent élevés.
«Au cours des dernières années, ce qu'on a vu, c'est une flambée des prix, par exemple à Montréal, mais pas juste à Montréal», dit-il.
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«Il y a des gens qui achètent sans mesurer le risque de leur investissement, sans prendre en compte tous les coûts et qui se retrouvent pris à la gorge avec des revenus qui ne sont pas à la mesure des coûts d’entretien et de financement de leur dette.»
Lorsque la Banque du Canada a décidé de sortir l’artillerie lourde contre l’inflation en augmentant de 1 point de pourcentage son taux directeur, le 13 juillet dernier, les effets ont commencé à se faire sentir sur le marché des immeubles à revenus, constate Éric Leblanc, courtier immobilier résidentiel et commercial à Montréal et sur la Rive-Sud chez Royal LePage. «C’est là que tout a commencé. On a vu un ralentissement marqué de la demande de plex.»
À travers le Québec, le nombre de plex de 2 à 5 logements vendus a reculé de 34 % au troisième trimestre par rapport à l’an dernier, selon les données de l’Association professionnelle des courtiers immobiliers du Québec (APCIQ). En comparaison, la diminution pour les unifamiliales était de 13 %.
Les prix ont également subi une rapide correction de juillet à la fin septembre. Bien que la valeur des plex demeurait 11 % plus élevée qu’il y a un an, les prix ont tout même subi une baisse de 8 % en trois mois. C’est la plus forte baisse trimestrielle depuis 2008.
Les données de l’APCIQ démontrent que les investisseurs sont moins présents dans le marché, croit Hélène Bégin, économiste principale du Mouvement Desjardins. Elle juge que le marché du plex est «plus vulnérable» que celui des unifamiliales.
Une hausse des intérêts à payer peut faire en sorte que le propriétaire d’un immeuble à revenu se retrouve «pris à la gorge», poursuit l’économiste. La baisse des prix agit comme un repoussoir tandis que des acheteurs potentiels perdent l’espoir d’être capables de revendre à profit à court ou moyen terme.
«Lorsque la vente s'effectue à un prix moins élevé que le prix payé, c'est certain qu'on a une spirale, dit Mme Bégin. Le marché du plex est particulièrement vulnérable à un changement de comportement des investisseurs, dont certains ont déjà commencé à se retirer du marché.»
Le président du Club d’investisseurs immobiliers du Québec, Yvan Cournoyer, n’a pas constaté, pour sa part, une baisse de l’intérêt pour les activités de son association.
«Quand les taux d'intérêt sont bas et que l'immobilier va bien, tout le monde veut aller là-dedans. Quand ça se met à ralentir, il y en a qui disent: "là, c'est le temps: les prix commencent à baisser. Enfin, je peux commencer." Il est encore trop tôt pour savoir ce qui va se passer avec ça ».
Des acheteurs pourraient réviser leur stratégie d’investissement, croit M. Cournoyer. Ces derniers pourraient s’associer à des partenaires afin de mettre en commun une plus grande mise de fonds, par exemple.
M. Cournoyer dit avoir constaté une augmentation du nombre de membres qui ont eu recours à la balance de prix de vente. Il s’agit d’une entente où l’acheteur ne paie qu’une partie du prix de vente et contracte une dette envers le vendeur (la balance) en plus du prêt bancaire. «C’est quelque chose qu’on voit déjà.»
Il est difficile de faire de l’argent en immobilier pour les petits investisseurs dont ce n’est pas la profession, prévient M. Des Rosiers. Il y a dix ans, le professeur a fait une étude sur le marché des plex dans le quartier Rosemont à Montréal. Il avait constaté que les rendements étaient «très faibles, voire négatifs».
«Si on devait refaire l’exercice, je ne pense pas que ça serait très différent.»
Le marché pourrait toutefois offrir des occasions aux investisseurs avertis, selon lui. «D'ici quelques mois, il va peut-être avoir quelques bonnes occasions. Peut-être aussi des cas de ventes de feu de la part de propriétaires qui ne sont plus capables de tenir le coup et qui vont être rachetés par d'autres.»
Les propriétaires ne sont pas en mode panique, constate M. Leblanc. «On n’a pas de vente de feu, de gens qui ont été obligés de vendre, répond le courtier. Ce n’est pas le cas. C’est un marché où les gens achètent à des prix un peu plus bas qu’il y a six mois, mais quand même ça se tient encore.»
Le printemps 2023 pourrait donner un portait plus clair du marché, si les taux se stabilisent, prédit-il. Les acheteurs pourraient être plus à l’aise à déterminer le prix auquel ils sont prêts à faire une offre s’ils ont une plus grande prévisibilité sur les taux, selon lui.