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Ces concepts de surveillance gouvernementale des activités policières et d'indépendance de la police sont revenus à maintes reprises au cours des six semaines d'audiences publiques de la Commission sur l'état d'urgence.
Une politologue estime qu'il est judicieux de définir clairement la différence entre surveillance gouvernementale des activités policières et indépendance des corps policiers — même si ce n'est pas aussi simple que l'ont suggéré certains témoins à la commission Rouleau.
Ces concepts de surveillance gouvernementale des activités policières et d'indépendance de la police sont revenus à maintes reprises au cours des six semaines d'audiences publiques de la Commission sur l'état d'urgence.
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La commission, présidée par le juge Paul Rouleau, doit déterminer si le gouvernement libéral de Justin Trudeau était justifié d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence l'hiver dernier pour mettre fin aux manifestations.
Tout au long des audiences, la police et les politiciens ont décrit la séparation entre les opérations policières et le pouvoir exécutif. Ils ont tour à tour déclaré que les politiciens et les commissions de police ne devraient jamais diriger d'opérations policières sur le terrain.
La commissaire de la Gendarmerie royale du Canada, Brenda Lucki, a suggéré lors de son témoignage que le gouvernement devrait définir plus clairement dans la loi la ligne que les politiciens ne devraient jamais franchir.
Cette ligne a été souvent comparée à la séparation entre l'Église et l'État.
«Pour moi, c'est assez clair. Pour tout ce qui est opérationnel, nous informons de ce qui se passe, mais nous ne donnons pas de directives sur la façon de faire les choses», a déclaré le 15 novembre dernier la commissaire de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), Brenda Lucki.
La professeure en sciences politiques Kate Puddister, de l'Université de Guelph, a affirmé jeudi matin à la commission Rouleau qu'une distinction trop nette ne serait pas très utile. Cette définition trop précise, selon elle, manquerait de nuances et permettrait aux politiciens de «se soustraire à leurs responsabilités en matière de maintien de l'ordre, peut-être comme une méthode de stratégie politique».
La commission enquête sur les événements qui ont conduit à la décision du gouvernement d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence l'hiver dernier en réponse à la manifestation d'une semaine du «convoi de la liberté» à Ottawa et à des manifestations similaires aux postes frontaliers à travers le Canada.
La commission a également pour mandat de formuler des recommandations sur la façon de moderniser la loi et de suggérer des domaines où une étude plus approfondie pourrait être justifiée.
Après des heures de témoignage du premier ministre Justin Trudeau qui ont conclu la première phase de l'enquête vendredi dernier, la commission s'est tournée vers une deuxième phase de témoignages d'experts sur une série de questions liées aux manifestations.
Dans le cadre de la «phase politique» de son enquête, le juge Rouleau entend cette semaine des dizaines de témoins experts lors de tables rondes sur des sujets comme la désinformation, la définition de l'«état d'urgence» et les limites au droit constitutionnel de réunion pacifique.
La table ronde de jeudi matin était consacrée aux relations entre la police et le gouvernement.
Les experts qui ont témoigné ont réaffirmé l'importance que les services de police soient indépendants de toute ingérence politique. Sinon, ils risquent d'être perçus comme «un outil du gouvernement en place», comme l'a déclaré Ryan Teschner, directeur exécutif de la Commission des services policiers de Toronto, dans son témoignage.
Mais tous s'accordent à dire que la police a besoin d'un contrôle accru sur certains éléments de ses opérations.
«Nous avons trop longtemps eu une conception plutôt vague et parfois exagérée de l'indépendance de la police vis-à-vis du gouvernement», a déclaré M. Teschner.
Michael Kempa, criminologue à l'Université d'Ottawa, a suggéré que les législateurs «abandonnent tout simplement le terme «opérations»« et définissent l'indépendance de la police «en termes d'exercice de ses pouvoirs d'enquête, d'arrestation et de mise en accusation».
Les experts ont également suggéré que tous les services de police au Canada devraient avoir une sorte d'organisme de surveillance civile, comme une commission ou un conseil de police.
La plupart des services de police urbains au Canada en ont un, à l'exception de la police provinciale et de la GRC. Le commissaire de la GRC relève directement du ministre de la Sécurité publique.
La création d'un conseil signifierait que toutes les directives politiques à la police seraient publiques et documentées, et garantirait que «les directives ministérielles sont appropriées et données si nécessaire», a affirmé Kate Puddister.
Le commissaire Paul Rouleau a indiqué que certaines des recommandations du comité pourraient figurer dans son rapport final, mais il n'a pas précisé lesquelles.
Au cours d'une deuxième séance en après-midi, des experts ont discuté des façons dont les différents paliers de gouvernement, y compris les gouvernements des Premières Nations, travaillent ensemble en cas d'urgence.
Judith Sayers, présidente du Conseil tribal Nuu-chah-nulth, a recommandé que la Loi sur les mesures d'urgence soit modifiée pour exiger la consultation des Premières Nations en plus des gouvernements provinciaux et municipaux.
«Ni la Loi sur les mesures d'urgence ni la Loi sur la gestion des urgences ne mentionnent les Premières Nations comme des gouvernements. Tous les autres sont avisés», a souligné Mme Sayers.
«Pourtant, lorsque des urgences surviennent, ce sont des vies des Premières Nations qui sont en jeu, leurs terres, leurs ressources et leur capacité à exercer leurs droits protégés par l'article 35.»
Les modalités de consultation des Premières Nations peuvent varier en fonction de la situation d'urgence, a-t-elle ajouté.
Cal Corley, PDG de la Community Safety Knowledge Alliance (CSKA), estime que davantage de consultations entre les niveaux de gouvernement pourrait éviter de devoir invoquer une urgence en premier lieu.
Il a déclaré que s'il existe des «mesures proactives intentionnelles» entre les gouvernements fédéral, provinciaux, territoriaux, des Premières Nations et municipaux pour faire face aux manifestations et aux urgences à grande échelle, «cela devrait, dans la plupart des cas et des circonstances, établir des conditions qui annulent la nécessité pour les gouvernements d'envisager même d'invoquer la loi fédérale sur les mesures d'urgence.»
M. Rouleau et son équipe doivent livrer leurs conclusions d'ici le 6 février, le rapport devant être rendu public d'ici le 20 février.