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«Je pense que les médias ont longuement participé à alimenter un climat de méfiance et d'islamophobie avant la tragédie et donc qu'ils en sont en partie responsables», raconte Ahmed Cheddadi, l'un des survivants.
Le 29 janvier sera la sixième journée nationale de commémoration aux victimes de l’attentat à la Mosquée de Québec et d’action contre l’islamophobie. Six ans après le drame de 2017, la communauté musulmane et les citoyens de la ville de Québec se souviennent et ressentent encore une immense douleur face à l'attentat qui a coûté la vie à six personnes en plus d'en blesser une vingtaine d'autres.
«On attend encore que le gouvernement provincial fasse quelques pas, qu'il établisse des lois qui promeuvent l'inclusivité pour éradiquer les fléaux que sont l'islamophobie et le racisme», plaide Mohamed Labidi, président du Centre culturel islamique de Québec (CCIQ).
Or, la «loi 21», portant sur la laïcité de l'État et empêchant, entre autres mesures, les femmes musulmanes employées par la fonction publique dans des positions d'autorité et dans l'enseignement au primaire et au secondaire de porter le voile, a tout l'effet contraire, renchérit M. Labidi.
«Cette loi vient chambarder tout ce qu'on fait comme travail pour le vivre-ensemble, déplore-t-il. Des gens ont choisi de quitter le Québec. Ça fait beaucoup de mal à notre communauté. Nos frères et nos sœurs se sentent tous visés par cette loi, qui enfreint nos droits et nos libertés.»
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Maryam Bessiri, porte-parole du comité citoyen Je me souviens du 29 janvier, rappelle pour sa part qu'aucun musulman ne s'est prononcé contre le principe de la laïcité de l'État. «J'aimerais ne plus avoir à le rappeler, lâche-t-elle. Mais cette loi fait en sorte de nier à toute une partie de la population la reconnaissance entière et complète de leur citoyenneté. N'oublions pas non plus que les personnes qui sont mortes le 29 janvier 2017 étaient aussi Québécoises.»
Les médias n'ont pas été épargnés par les doléances des survivants.
«Je ressens une responsabilité envers mes frères, qui sont tombés juste à côté de moi l'un après l'autre, raconte Ahmed Cheddadi, l'un des survivants. Cette perte de nos valeureux frères, lâchement assassinés à la mosquée, restera à jamais gravée dans nos mémoires. Et cette responsabilité, de tendre la main aux citoyens québécois et de faire preuve d'une grande ouverture sur l'autre, ne doit pas reposer uniquement sur la communauté musulmane: elle doit s'étendre à toute la société québécoise, par notre société d'accueil.»
«Je pense que les médias ont longuement participé à alimenter un climat de méfiance et d'islamophobie avant la tragédie et donc qu'ils en sont en partie responsables», ajoute-t-il.
Pour la première fois cette année, la commémoration citoyenne se tiendra à la salle des prières de la Mosquée, là où a eu lieu le drame. La tragédie s'était déroulée le 29 janvier 2017, un dimanche. Ce soir-là, Ibrahima Barry, Mamadou Tanou Barry, Khaled Belkacemi, Abdelkrim Hassane, Azzedine Soufiane et Aboubaker Thabti perdaient la vie sous les balles du tireur.
Six ans plus tard, le triste anniversaire de l'événement a de nouveau lieu un dimanche.
C'est pour cette raison que pour la toute première fois, la cérémonie de commémoration se déroulera à même la salle de prière de la Grande Mosquée
«Pour nous, ce retour à la salle de prière est très significatif, avance Mme Bessiri. C'est un lieu qui est très chargé d'émotion et de sens. C'est difficile, mais important de revenir ici. Ensemble, nous pourrons honorer la mémoire des victimes et réfléchir sur la société inclusive que nous voulons construire.»
C’est un «devoir de mémoire envers les victimes qui sont tombés dans cette mosquée par les balles de la haine», a indiqué Mr Mohamed Labidi, président du centre culturel islamique de Québec. Il insiste sur le fait que la commémoration citoyenne de cet évènement est nécessaire pour un «bon vivre ensemble dans notre société».
Au programme cette année, le centre culturel tenait justement à concrétiser le vivre ensemble avec des journées portes ouvertes de la mosquée de Québec. Le programme a débuté ses portes ouvertes le mardi 24 janvier et ça se poursuit aujourd’hui et 18h à 21h. «On attend nos concitoyens à cette activité qui vise à démystifier ce qu’est une mosquée, de jaser avec les musulmans et ainsi créer un meilleur vivre ensemble», a ajouté Mr Labidi.
La journée de vendredi sera réservée à la communauté musulmane où une activité communautaire ainsi qu’une période de recueillement auront lieu.
Les portes ouvertes se poursuivront samedi de 13h30 jusqu’à 21h et dimanche de 11h jusqu’à 15h. La journée de dimanche se terminera par la cérémonie de la commémoration avec les dignitaires. Vers 17h30, les Québécois sont conviés à se déplacer au centre culturel islamique pour réfléchir à une société inclusive. «On espère ainsi organiser la relève et se tourner vers l’avenir», ajoute la co-porte-parole de la commémoration citoyenne, Maryam Bessiri.
Sébastien Bourchard, co-porte-parole de la commémoration citoyenne tenait à rappeler que le racisme et l’islamophobie existent encore et que le comité citoyens 29 janvier je me souviens, souligne une fois de plus sa solidarité avec les proches des victimes, les survivants, ainsi que toute la communauté visée.