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Le premier ministre Justin Trudeau a annoncé jeudi la nomination de Mary Moreau à la Cour suprême du Canada.
Tous les Canadiens doivent pouvoir se reconnaître dans le système judiciaire si on veut qu'ils aient confiance dans son fonctionnement, affirme la vétérane juge de l'Alberta choisie pour occuper un siège au plus haut tribunal du pays.
Le premier ministre Justin Trudeau a annoncé jeudi la nomination à la Cour suprême du Canada de Mary Moreau, qui est juge en chef de la Cour du Banc du Roi de l'Alberta depuis 2017.
Avant sa nomination à la magistrature albertaine il y a 29 ans, Mme Moreau, bilingue, pratiquait le droit à Edmonton, où elle est née, traitant des affaires civiles, criminelles et constitutionnelles. Elle avait aussi été nommée juge suppléante à la Cour suprême du Yukon en 1996 et à la Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest en 2005.
Mary Moreau est impliquée depuis longtemps dans la profession de juriste, au pays et à l'étranger, en participant à des initiatives en matière de formation, d'éthique judiciaire et de modernisation des tribunaux.
«Je suis convaincu que son impressionnante carrière dans le milieu juridique et son attachement envers l'équité et l'excellence font de la juge en chef Moreau un choix inestimable pour le plus haut tribunal de notre pays», a indiqué M. Trudeau dans un communiqué annonçant sa nomination.
Si la nomination de Mme Moreau est confirmée, dans les prochains jours, la Cour suprême du Canada sera, pour la première fois en 148 ans d'histoire, composée d'une majorité de femmes -- cinq juges sur neuf.
En réponse à un questionnaire soumis dans le cadre de sa candidature, Mme Moreau a cité sa contribution à l'amélioration de l'accès à la justice dans les deux langues officielles au sein des institutions gouvernementales et des tribunaux.
«Je crois que mon expérience personnelle et professionnelle m'a permis de bien saisir l'importance de la diversité et l'inclusion dans notre système de justice», a-t-elle écrit dans le questionnaire, dont certaines parties ont été rendues publiques jeudi. Tous les Canadiens doivent pouvoir se reconnaître dans leur système de justice pour pouvoir lui faire confiance.
«Vu le rôle important du juge dans la démocratie, l'évolution constante de la société, et la nature dynamique du droit, les juges ont la responsabilité de perfectionner leurs connaissances du droit et du contexte social pour assurer le respect, l'égalité et la dignité de tous les membres de la société et pour écarter de manière claire et définitive les mythes et stéréotypes», a-t-elle soutenu.
Mme Moreau soulignait aussi que «la musique, la littérature, les chansons traditionnelles et les fêtes canadiennes-françaises» avaient enrichi sa jeunesse dans l'ouest du pays.
«J'ai appris l'importance de ma langue pour donner une voix à ma culture et de ma culture pour créer chez moi un sens d'appartenance et d'identité, écrit-elle. J'ai aussi ressenti les défis liés à l'appartenance à un groupe minoritaire dans une province majoritairement anglophone.»
Mme Moreau a notamment étudié au programme de baccalauréat ès arts en français à la faculté Saint-Jean de l'Université de l'Alberta, de 1974 à 1976, avant de faire son droit à cette université. Elle a suivi le programme d'étude du Code civil du Québec, en français, à l'Université de Sherbrooke à l'été 1977, lit-on dans son questionnaire.
La présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, Liane Roy, a parlé jeudi d'une «avancée formidable» pour ces communautés.
«Franco-Albertaine, la juge Moreau possède une connaissance extensive non seulement des réalités de la francophonie, mais aussi des droits linguistiques, a écrit Mme Roy dans un communiqué. Au cours de sa carrière à la Cour du Banc du Roi de l'Alberta et précédemment dans les tribunaux supérieurs aux Territoires du Nord-Ouest et au Yukon, elle a jugé des causes ayant trait aux droits des communautés francophones.»
Un siège à la Cour suprême est vacant depuis que Russell Brown a annoncé sa retraite en juin, mettant ainsi fin à une enquête du Conseil canadien de la magistrature sur une allégation de mauvaise conduite. Le Conseil examinait des allégations concernant un événement survenu en janvier en Arizona, au cours duquel M. Brown aurait été en état d'ébriété et aurait harcelé un groupe d'individus, ce qu'il nie.
Les membres du Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes tiendront une réunion spéciale jeudi prochain pour en savoir plus sur la nomination de Mme Moreau. Le ministre de la Justice, Arif Virani, et le président du Comité consultatif indépendant sur les nominations des juges à la Cour suprême du Canada, Wade MacLauchlan, devraient alors défendre la sélection.
Mme Moreau participera ensuite à une «séance de questions et réponses» avec les membres du comité des Communes et du comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles, ainsi qu'un membre du Parti vert. Cette séance sera animée par Érik Labelle Eastaugh, doyen de la faculté de droit de l'Université de Moncton.
Contrairement aux audiences de confirmation des juges de la Cour suprême aux États-Unis, souvent conflictuelles, le processus canadien vise davantage à accroître la transparence et à tenir le gouvernement responsable de sa sélection.
Le premier ministre devrait examiner et prendre en compte tous les points de vue du comité des Communes avant de finaliser la nomination.
Le président de l'Association du Barreau canadien, John Stefaniuk, a salué jeudi cette nomination. «La juge Moreau a été la première femme et la première francophone à être nommée juge en chef de la Cour du Banc de la Reine de l'Alberta, a-t-il soutenu dans un communiqué. Elle est munie d'une grande expérience dans le droit criminel, le droit constitutionnel et le droit civil.»