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Le chef de police soutient ne pas vouloir «annoncer une mesure symbolique. Je veux créer le problème à sa source.»
Le chef du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), Fady Dagher, n'entend pas décréter un moratoire sur les interpellations policières, malgré la recommandation de chercheurs qui se sont penchés sur la question du profilage racial et des interpellations.
Le rapport final de 285 pages remis au SPVM concernant cet enjeu recommande de «que soit décrété le moratoire de toute interpellation policière qui ne soit pas justifiée par l’enquête d’un crime spécifique ou par le soupçon raisonnable d’une activité illégale.»
Ce moratoire doit être accompagné «de l’examen approfondi de l’interpellation — ses dimensions juridiques, l’encadrement de sa pratique, sa contribution à la lutte contre la criminalité, ses effets généraux sur la sécurité publique — et de la mise en place de mesures efficaces qui réduisent significativement les risques de profilage racial dans toutes les interventions policières», ajoute-t-on dans le rapport.
Lors d’un point de presse jeudi, M. Dagher a avoué que son refus de décréter un moratoire allait créer de la déception. Le chef de police soutient ne pas vouloir «annoncer une mesure symbolique. Je veux créer le problème à sa source.»
M. Dagher préconise plutôt une approche qui «fait une différence réelle dans la durée. Nous allons combattre le profilage, valoriser nos policiers et sécuriser la ville», a expliqué le chef du SPVM.
Fady Dagher l’a répété: ce n’est pas le travail de «tous les policiers qui est critiqué», a-t-il lancé. «Les communautés racisées le disent. Elles veulent que les policiers interviennent. Ce qu’elles ne veulent plus, c’est que l’honnête citoyen soit vu comme un potentiel criminel», a-t-il expliqué.
Selon les constats faits par les chercheurs (Victor Armony, Alicia Boatswain-Kyte, Mariam Hassaoui et Massimiliano Mulone) en 2021, une personne autochtone a six fois plus de chance qu'une personne blanche d'être interpellée par la police à Montréal. «Les populations noires ont 3,5 fois, les personnes arabes 2,5 fois et les latinos 1,5 fois», a précisé M. Dagher.
Une donnée préoccupe particulièrement M. Dagher. «Les données ne semblent pas diminuer depuis 2014 [...], et ce malgré les mesures prises depuis le dépôt du premier rapport», a-t-il soutenu.
Celui qui dirige le SPVM convient qu'il faut «agir plus vite, agir plus fort et ensemble, accélérer» pour résoudre le problème.
Le ministre de la Sécurité publique, François Bonnardel, a affirmé sur Twitter que le gouvernement Legault «prendra connaissance avec intérêt du rapport». M. Bonnardel ajoute que le projet de loi 14 permet «d'encadrer la pratique [des interpellations] plutôt que de l'interdire». «Nous ne voulons pas priver les policiers d’un levier utile à leur mission. On peut lutter contre le profilage racial et social, tout en laissant les outils aux policiers», a-t-il conclu.
Dans un communiqué, la présidente de Femmes autochtones du Québec a salué jeudi «l'accueil favorable» du rapport au SPVM.
«On voit un renouveau au sein du SPVM, apporté par Fady Dagher à sa tête, qui nous laisse entrevoir le meilleur pour la suite», a indiqué Marjolaine Étienne. «Le fait de nous avoir contactés en amont concernant le dépôt de ce rapport est encourageant tout comme les échanges que nous avons eus avec M. Dagher.
«Espérons maintenant que le leadership démontré par le SPVM ouvrira la voie aux autres décideurs et institutions afin qu'ils franchissent enfin le pas et reconnaissent l'existence du racisme et de la discrimination systémiques au Québec», conclut Mme Étienne.
Voyez le récapitulatif de Marie-Michelle Lauzon au bulletin Noovo Le Fil 17 ci-dessous:
Avec les informations de La Presse canadienne et de Marie-Michelle Lauzon pour Noovo Info