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Déjà éprouvés par la crise du logement et l’inflation vertigineuse, les étudiants s'inquiète d'une possible hausse des droits de scolarité.
Déjà éprouvés par la crise du logement et l’inflation vertigineuse, les étudiants universitaires pourraient devoir composer avec une hausse des droits de scolarité de plus de 8% dès la session d’automne.
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Depuis 2013, les droits de scolarité au Québec sont indexés selon l’évolution du revenu disponible des ménages par habitant. Or, en 2020, le revenu disponible des Québécois a explosé, en raison de la hausse sans précédent des transferts aux ménages dans le contexte pandémique, avec des programmes comme la Prestation canadienne d’urgence (PCU).
Entre 2019 et 2020, période de référence qui devrait être utilisée pour déterminer les droits de scolarité pour l’année scolaire 2022-2023, cet indice a augmenté de 8,2%, selon des données de l’Institut de la statistique du Québec.
«Cet indice-là a été gonflé artificiellement par les mesures d’aide d’urgence. La réalité, c’est que la capacité de payer des étudiants n’a pas augmenté», affirme le président de l’Union étudiante du Québec (UEQ), Jonathan Desroches.
«Dans ce contexte, ça semble complètement déraisonnable d’augmenter les frais de scolarité, alors que les étudiants n’ont pas une réelle augmentation de leur revenus», ajoute-t-il.
Le cabinet de la ministre de l’Enseignement supérieur Danielle McCann refuse de dire si cette hausse de 8,2% est bel et bien le scénario envisagé.
«Nous sommes bien conscients des inquiétudes des étudiantes et des étudiants», peut-on lire dans une déclaration écrite envoyée à Noovo Info vendredi.
«L’accessibilité aux études est d’ailleurs un élément essentiel de notre plan pour la réussite scolaire», assure-t-on, ajoutant qu’une annonce au sujet des droits de scolarité sera faite «très prochainement».
L’indexation des droits de scolarité en fonction du revenu disponible par habitant représenterait quelque 220$ de plus par année pour un étudiant à temps plein, sans compter l’augmentation des frais institutionnels, qui suit généralement la même courbe.
Une telle hausse serait difficile à absorber pour de nombreux étudiants dont la situation financière est précaire, alors qu’ils doivent aussi composer avec les hausses récentes du prix des aliments, de l’essence et du logement.
«Je n’y arrive déjà pas en travaillant 40 heures par semaine, je ne vois pas comment je pourrais en faire plus en suivant trois cours par session et en m’occupant de mes enfants», soupire Jean-Philippe Côté.
Jean-Philippe Côté droit travailler 40 heures par semaine comme camionneur pour payer ses études en psychologie à l'UQAM. (Photo: Noovo Info)
Le père monoparental, qui travaille comme camionneur pour payer ses études au baccalauréat en psychologie, raconte avoir été incapable de payer son loyer à deux reprises au cours des derniers mois, en plus d’avoir accumulé des dettes importantes.
En janvier dernier, au bout du rouleau, il s’est endormi au volant de son camion, percutant plusieurs arbres. Il a subi une commotion cérébrale et s’est fracturé un pouce.
«J’ai été très chanceux, estime-t-il. Mais d’étudier, de travailler en burnout, je ne souhaite ça à personne. Parce que c’est ma vie qui aurait pu y passer.»
Pour éviter que la situation ne devienne intenable pour les étudiants qui sont déjà en situation de précarité, l’UEQ demande à Québec d’indexer les dépenses admises dans le calcul de l’Aide financière aux études.
À l’heure actuelle, le montant alloué aux frais de subsistance pour un étudiant qui ne réside pas chez ses parents est de 987$ par mois.
Aux yeux du ministère de l’Enseignement supérieur, ce montant est suffisant pour couvrir le logement, la nourriture, les dépenses personnelles et le transport en commun. À Montréal, le loyer mensuel moyen était de 932$ par mois en 2021, selon la Société canadienne d’hypothèque et de logement.
«Il faut venir en aide aux étudiants», martèle le président de l’UEQ, soulignant que la précarité financière a des impacts sur leur réussite scolaire et sur leur santé mentale.
Une réalité beaucoup trop familière pour Jean-Philippe Côté, qui admet devoir composer avec des épisodes dépressifs en raison de sa situation financière.
«Si j’étais pas aussi orienté vers mon but, aussi motivé, je ne réussirais pas à continuer mes études, laisse tomber l’étudiant. La situation financière pèse beaucoup trop lourd sur mes épaules.»
En marge de la présentation du budget provincial, mardi, des dizaines de milliers d’étudiants universitaires et collégiaux seront en grève pour réclamer la gratuité scolaire.
Plus de 82 000 étudiants de l’Université du Québec à Montréal, de l’Université de Montréal et de divers cégeps lèveront les cours pour exiger la disparition pure et simple des droits de scolarité. Une manifestation est prévue à la place du Canada, à Montréal, à partir de 13h.
En plus d’être jour de budget, le 22 mars a aussi une connotation historique pour le mouvement étudiant. Il y a 10 ans, le 22 mars 2012, plus de 100 000 personnes ont défilé dans les rues de la métropole pour s’opposer à la hausse des droits de scolarité annoncée par le gouvernement libéral de Jean Charest.
«Nous espérons être nombreux et nombreuses dans la rue pour faire entendre le message que la gratuité scolaire est un projet important et viable pour le Québec», souligne Lucia Flores Echaiz, responsable à l’éducation inclusive pour l’Association facultaire étudiante de science politique et droit de l’UQAM, l’une des associations ayant voté en faveur de la grève de mardi.
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