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Elle décrivait ainsi l’établissement de chaînes d'approvisionnement fortifiées et respectueuses du climat qui reposent principalement sur des voisins et des alliés partageant les mêmes idées.
La vice-première ministre du Canada, Chrystia Freeland, a exhorté mardi les démocraties du monde à affronter le dur contexte économique du nouvel ordre mondial et à favoriser les valeurs partagées de prospérité, de sécurité énergétique, de protection de la planète et de commerce libre et équitable.
Devant des universitaires canado-américains et des intervenants de l’Institut Brookings, un groupe de réflexion établi à Washington, la ministre Freeland a livré un témoignage en faveur de la paix et de la stabilité, 33 ans après la chute du mur de Berlin en 1989 et quelques mois, a-t-elle dit, après la violation barbare de la souveraineté ukrainienne par la Russie.
Elle a lancé un cri d'alarme aux pays qui s'opposent à Vladimir Poutine: selon elle, les dangers auxquels le monde occidental est confronté ne se limitent pas aux agissements du président russe et ne disparaîtront pas non plus en cas de triomphe de l'Ukraine.
«Nous continuerons très probablement à faire face à une Russie tyrannique à la frontière de l'Europe et à de puissants régimes autoritaires ailleurs», a averti la ministre Freeland.
«Nous devons comprendre que les régimes autoritaires nous sont fondamentalement hostiles. Notre succès est une menace existentielle pour eux. C'est pourquoi ils ont essayé de subvertir nos démocraties de l'intérieur et pourquoi nous devrions nous attendre à ce qu'ils continuent de le faire.»
«Par conséquent, la dépendance continue du monde vis-à-vis des tyrans du pétrole dans des pays comme la Russie, qui sont des fournisseurs internationaux vitaux de pétrole et de gaz naturel, ne peut pas continuer. À l’approche de l’hiver, l'Europe est confrontée à sa dépendance économique à l'égard de pays dont les valeurs politiques et morales sont hostiles aux nôtres.»
Chrystia Freeland a prêché pour les vertus du «friend-shoring» - un terme avancé l'été dernier par la secrétaire au Trésor des États-Unis, Janet Yellen. Elle décrivait ainsi l’établissement de chaînes d'approvisionnement fortifiées et respectueuses du climat qui reposent principalement sur des voisins et des alliés partageant les mêmes idées.
Au Canada, ce concept est de la musique aux oreilles, car sa fortune économique dépend depuis longtemps de ses liens avec les États-Unis où, toutefois, le sentiment protectionniste fait partie du discours politique quotidien.
Mme Freeland a cité l'exemple de la loi sur la réduction de l'inflation, un ensemble de dépenses de plusieurs milliards de dollars pour le climat, les impôts et la santé adopté par le Congrès en août, qui comprend un programme de crédit d'impôt conçu pour favoriser la production et la vente de véhicules électriques.
Ces crédits s'appliqueront désormais aux véhicules fabriqués au Canada et exigeront également que la batterie d'un véhicule admissible inclue un pourcentage de minéraux essentiels provenant de pays avec lesquels les États-Unis ont conclu un accord commercial, dont le Canada fait partie.
Cette mesure a été conçue pour freiner la domination de la Chine dans la chaîne d'approvisionnement des minéraux critiques.
Chrystia Freeland n'a pas mentionné dans son allocution que la vision originale du président Joe Biden réservait pourtant les crédits les plus riches aux véhicules assemblés aux États-Unis avec des travailleurs syndiqués, une menace existentielle pour l'industrie automobile canadienne. Cette intention initiale du président américain a déclenché un effort de lobbying d'un an et a menacé de mettre à rude épreuve la relation entre le Canada et les États-Unis.
«Si nous voulons lier encore plus étroitement nos économies, nous devons être convaincus que nous suivrons toutes les règles dans nos échanges, même et surtout lorsqu'il serait plus facile de ne pas le faire. Des approches communes du commerce seront vitales, a-t-elle ajouté, au nom de la sécurité économique des partenaires démocratiques».
D’autre part, la ministre Freeland a évoqué la volonté de l'Union européenne (UE) de permettre à ses fabricants de vaccins d'honorer les contrats existants avec des alliés non européens, dont le Canada, au plus fort de la pandémie de COVID-19.
«Le Canada se souvient», a-t-elle dit. «Le Canada doit et fera preuve d'une générosité similaire en accélérant, par exemple, les projets énergétiques et miniers dont nos alliés ont besoin pour chauffer leurs maisons et fabriquer des véhicules électriques.»
Pourtant, le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, et son gouvernement se sont fait reprocher de se traîner les pieds dans l'approbation de projets énergétiques comme les terminaux d'exportation de gaz naturel liquide. M. Trudeau a depuis déclaré que le Canada serait disposé à assouplir les exigences réglementaires pour de tels projets afin d'aider à atténuer la pénurie d'approvisionnement en Europe, mais a également déclaré qu'il appartiendrait à l'industrie de décider si une telle entreprise serait réalisable.
Chrystia Freeland est à Washington cette semaine pour participer à des réunions annuelles de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international (FMI), qui ont publié mardi leur propre prévision: «Le pire reste à venir», a déclaré l'économiste en chef du FMI, Pierre-Olivier Gourinchas, qui a averti que 2023 «ressemblera à une récession» dans le monde.