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Québec solidaire rabroue son député Haroun Bouazzi qui voit du racisme «tous les jours» à l'Assemblée nationale.
Québec solidaire (QS) rabroue son député Haroun Bouazzi qui voit du racisme «tous les jours» à l'Assemblée nationale.
Un extrait publié dimanche de son allocution au gala de la Fondation Club Avenir a mis le feu aux poudres, entraînant des condamnations de tous les autres partis.
Les deux co-porte-parole de QS, Gabriel Nadeau-Dubois et Ruba Ghazal, ont rappelé à l'ordre le député de Maurice-Richard, qui estime pour sa part avoir été mal compris.
«Dieu sait que je vois ça à l'Assemblée nationale tous les jours, la construction de cet autre, de cet autre qui est maghrébin, qui est musulman, qui est noir, qui est autochtone, et de sa culture qui, par définition, serait dangereuse ou inférieure», avait déclaré le député de Maurice-Richard (Montréal), avant d'être applaudi par la foule.
Sur le réseau X, Mme Ghazal a indiqué qu'elle et M. Nadeau-Dubois ont eu «une bonne discussion» avec M. Bouazzi jeudi matin.
«Nous lui avons exprimé que ses propos étaient maladroits et exagérés», a-t-elle écrit.
«Aucun député de Québec solidaire ne pense que les députés québécois sont racistes», a-t-elle ajouté.
Ce mea culpa n'est pas suffisant, de l'avis du chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon.
Le Parti québécois a été souvent ciblé par M. Bouazzi qui l'a déjà accusé de racisme, a rappelé le leader souverainiste.
«Il y en a des dizaines (de déclarations) et c'est loin d'être une anecdote», a déploré M. St-Pierre Plamondon.
«Quand Québec solidaire a décidé de faire de lui son candidat et un député de l'Assemblée nationale, il savait très bien quelles étaient les vues de M. Bouazzi sur le Québec, sur nos institutions et nos partis politiques, donc Québec solidaire a une responsabilité de corriger le tir plus clairement que d'avoir une conversation avec Haroun Bouazzi», a dit M. St-Pierre Plamondon en mêlée de presse à Montréal, en invitant les électeurs de Maurice-Richard à se rappeler des frasques de leur député aux élections dans deux ans.
De son côté, M. Bouazzi n'a pas présenté ses excuses, mais soutient plutôt avoir été mal compris.
«Je n'ai jamais dit que les personnes élues à l'Assemblée nationale étaient racistes, a-t-il assuré. Je regrette que des collègues l'aient interprété ainsi.»
Il affirme plutôt avoir exprimé son «inquiétude face aux discours quotidiens qui pointent du doigt les personnes immigrantes comme la source d’une énorme partie des problèmes au Québec».
«Vous savez très bien ce que vous avez dit en faisant référence à votre quotidien à l'Assemblée», a riposté le député péquiste Pascal Bérubé.
«Ces accusations sont graves. Votre déni aussi.»
Des parlementaires des autres formations politiques ont aussi condamné les déclarations de M. Bouazzi par le réseau X.
«En tenant de tels propos radicaux, le député Haroun Bouazzi sait très bien ce qu'il fait: il divise, a écrit le leader parlementaire du gouvernement et ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette. Un élu a plutôt la responsabilité d'unir.»
Pour sa part, la députée libérale Marwah Rizqy a rappelé dans un long message qu'elle était elle-même d'origine marocaine et que jamais on ne l'avait fait sentir «dangereuse» ou «inférieure» à l'Assemblée nationale.
«Des accusations de racisme envers l’Assemblée nationale et ses parlementaires sont très graves et commandent le plus grand sérieux, écrit-elle. Elles doivent être supportées par des faits, sinon quoi, elles jettent un immense discrédit envers l’Institution des institutions. Des explications s’imposent.»
Le Règlement de l'Assemblée nationale prévoit qu'«un député qui a la parole ne peut employer un langage grossier ou irrespectueux envers l'Assemblée», mais sa portée s'étend à l'enceinte du parlement.
Mme Rizqy a ajouté qu'elle avait hésité avant de prendre la parole, mais que «c’est important que chaque Québécois, peu importe son origine ethnique ou sa religion, sache qu’il est possible au Québec d’aspirer aux plus hautes fonctions».
Son collègue, le député Monsef Derraji, a pour sa part écrit: «l'essentiel, c'est de se sentir chez soi. Si on se reconnaît comme Québécois, c'est ainsi qu'on nous verra.»
Dans son allocution, M. Boauzzi a aussi dressé un parallèle entre deux controverses récentes pour illustrer son argument sur le profilage de minorités maghrébines et musulmanes.
Il a fait notamment référence à l'école publique Bedford à Montréal, où une enquête a déterminé qu'une clique d'enseignants d'origine maghrébine se livrait à du prosélytisme et avait instauré un climat toxique.
Il dit ainsi avoir entendu des propos sur «des profs incompétents et tout le discours qui vient avec l'entrisme, l'envahissement de cette culture et du danger qui l'entoure».
Et en comparaison, il a évoqué le scandale du centre de réadaptation Cité-des-Prairies, à Montréal, où une dizaine d'éducatrices avaient des relations sexuelles avec de jeunes criminels, dont plusieurs mineurs, selon une enquête interne.
«Est-ce que vous savez de quelle culture elles sont ou quelle est leur religion?» demandait-il à l'assistance.
«Moi non plus, mais ce que je peux vous dire, c'est que ce sont ni des maghrébins, ni des musulmans, parce que sinon, on serait sûr de savoir de quelle religion ou de quelle origine ils sont», a-t-il lancé, sous les applaudissements de la foule.
La Presse Canadienne a tenté d'obtenir la réaction de la Fondation Club Avenir, mais l'organisme n'a pas donné suite à notre demande.
Cette fondation se décrit comme un organisme à but non lucratif qui œuvre pour l’intégration des communautés maghrébines à la société d'accueil.