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Un groupe d'élus républicains au Congrès américain tourne son attention vers le Canada, alors qu'il intensifie les critiques politiques de la stratégie d'immigration du président Joe Biden.
La frontière des États-Unis avec le Canada, la plus longue du monde et un symbole durable de la coopération entre les deux voisins, n'a jamais vraiment été un enjeu partisan au Capitole. Mais c'est peut-être sur le point de changer.
Deux républicains de la Chambre des représentants _ Mike Kelly de Pennsylvanie et Ryan Zinke du Montana _ ont enrôlé 26 autres membres du Congrès dans une nouvelle coalition axée sur l'immigration, la criminalité et la sécurité nationale à la frontière canado-américaine.
Les deux élus présideront ce qu'ils appellent le «caucus sur la sécurité à la frontière nord», qui sera officiellement lancé mardi. Ce caucus est présenté comme «bipartisan», bien qu'on ne sache pas encore combien de démocrates en feront partie _ et même s'il y en aura.
Les membres de ce caucus «s'inquiètent de l'augmentation du trafic d'êtres humains et de drogue, ainsi que de la diminution du nombre d'agents de la patrouille frontalière et du manque de sécurité le long de la frontière canado-américaine», a expliqué le bureau du représentant Kelly, dans un communiqué.
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«Des reportages récents, ainsi que des données compilées au cours des deux dernières années, montrent une augmentation des passages de migrants illégaux et du trafic de drogue par la frontière nord.»
On devrait voir notamment au lancement de ce caucus, mardi, les représentants républicains du Dakota du Nord Kelly Armstrong, du Minnesota Pete Stauber, de l'État de New York Claudia Tenney, du Michigan Lisa McClain et du Texas Tony Gonzales.
Des dirigeants du syndicat qui représente les agents de la patrouille frontalière américaine devraient également assister à l'événement de mardi, dont son vice-président Hector Garza, un habitué de la chaîne «Fox News».
Les représentants Kelly et Zinke ont commencé à solliciter des adhérents en janvier, avec une invitation écrite à tous les membres du Congrès. Mais la rhétorique de cette lettre, dont une copie a été obtenue par La Presse Canadienne, suggère que le caucus vise autant à attaquer l'un des flancs politiques les plus faibles du président Joe Biden qu'à assurer la sécurité nationale des États-Unis.
«Les États du Sud ont été submergés par une immigration illégale, un trafic de drogue et une criminalité record, qui n'ont cessé de se déverser dans les communautés locales. L'administration Biden est restée sans bouger et a regardé ces grands États subir le poids de politiques désastreuses et dangereuses», lit-on dans la lettre.
«Naturellement, toute l'attention a été portée sur la frontière sud. Pendant ce temps, la frontière nord de l'Amérique a été ignorée, alors qu'elle fait face à ses propres crises.»
Ces défis au nord incluent ce que la lettre décrit comme une «multiplication par cinq», depuis deux ans, des «rencontres frontalières», comme le disent les responsables américains des douanes et de la protection des frontières, ainsi qu'une augmentation du trafic de drogue.
Pendant les quatre premiers mois de l'exercice 2023, d'octobre à janvier, l'agence a enregistré 55 736 «rencontres» à la frontière canado-américaine ou à proximité. Il s'agit de personnes jugées inadmissibles en raison de leur statut d'immigrant ou en vertu de l'«article 42», l'ordonnance de santé publique de l'ère pandémique.
Ce nombre était plus du double des près de 24 000 rencontres qui ont eu lieu au cours des mêmes quatre mois l'année précédente, et déjà à mi-chemin des 109 535 signalés au cours de tout l'exercice 2022.
Ces données incluent 2227 rencontres à la frontière nord par les agents américains au cours du premier trimestre de l'exercice 2023, ce qui correspond presque aux 2238 signalés par les agents au cours de toute la période de 12 mois précédente.
La question, longtemps escamotée aux États-Unis par les centaines de milliers de «rencontres» qui se produisent chaque mois près de la frontière sud, a fait irruption dans l'actualité américaine l'hiver dernier lorsqu'une famille de quatre ressortissants indiens est morte de froid au Manitoba lors d'un redoutable blizzard, à quelques pas de la frontière.
Et plus récemment, le 19 février, des responsables américains ont récupéré le corps d'un homme du Mexique qui serait entré dans le Vermont depuis le Québec.
Les agents des douanes et de la protection des frontières à la frontière nord sont souvent appelés à aller appuyer leurs collègues à la frontière mexicaine, «aggravant encore les pénuries de personnel existantes», écrivaient les représentants Zinke et Kelly dans leur lettre.
«Même si la frontière nord est deux fois plus grande que la frontière sud, elle est considérablement sous-surveillée et sous-sécurisée, peut-on lire. Les dirigeants républicains de la Chambre ont raison lorsqu'ils disent: «Chaque État est un État frontalier». Notre pays et nos communautés ne peuvent pas continuer à demeurer silencieux dans la conversation sur la sécurité des frontières.»
Ce n'est peut-être pas un hasard si une audience du comité de la Chambre sur la sécurité intérieure est prévue mardi pour examiner «l'impact généralisé et invalidant» de la gestion de la migration par l'administration Biden à la frontière sud.
Le Canada, lui aussi, a ses propres problèmes en matière de migration irrégulière à la frontière. Les demandeurs d'asile potentiels affluent des États-Unis à travers la frontière terrestre vers le Canada depuis des années, en particulier au chemin Roxham, près de Saint-Bernard-de-Lacolle, au Québec, devenu le passage frontalier non officiel le plus achalandé du Canada.
La Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada a enregistré 5599 demandes d'asile présentées par des migrants qui étaient entrés de façon irrégulière entre juillet et septembre 2022, contre 5148 au cours de la même période en 2019, avant le début de la pandémie de COVID-19.
Il s'agit du total le plus élevé pour cette période de trois mois depuis 2017, la première année au pouvoir de l'ancien président Donald Trump, alors que plus de 8500 personnes avaient traversé la frontière et étaient entrées au Canada en quête d'asile.
Avec ces chiffres qui augmentent, la pression politique monte aussi sur le premier ministre Justin Trudeau. Le chef conservateur Pierre Poilievre a réclamé la fermeture «d'ici 30 jours» du chemin Roxham. Et le premier ministre du Québec, François Legault, a exhorté son homologue fédéral à faire pression sur les États-Unis pour qu'ils renégocient l'accord bilatéral «des tiers pays sûrs», qui a ouvert cette échappatoire en premier lieu.