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Le projet de loi 14 limiterait le droit de porter plainte en déontologie policière.
S'il est adopté dans sa forme actuelle, le projet de loi 14 qui vise à mettre à jour la législation entourant la sécurité publique brimerait le droit d'une grande majorité de citoyens de porter plainte en déontologie policière – un «recul historique», avance la Ligue des droits et libertés (LDL).
Actuellement, la Loi sur la police prévoit que quiconque peut porter plainte en déontologie policière; le projet de loi 14, déposé par le ministre de la Sécurité François Bonnardel, viendrait restreindre ce droit uniquement aux personnes qui se trouvent sur les lieux d'une intervention policière comme partie prenante ou comme témoin, de même qu'aux personnes qui auraient été victimes d'un comportement inadéquat de la part d'un policier.
Ce faisant, les «plaignants tiers» ne pourront plus déposer de plainte au nom d'autrui, déplorent la LDL et la Coalition contre la répression et les abus policiers (CRAP), qui ont tenu un point de presse lundi pour dénoncer la mesure.
Pourtant, même si elles ne comptent que pour un peu plus de 3 % des plaintes, les doléances des plaignants tiers mènent à 22,6 % des citations en déontologie et à 27,9 % des sanctions, a souligné Lynda Khelil, porte-parole de la LDL. «Les plaintes des tiers sont très fondées et c'est ça qui dérange le milieu policier», a-t-elle ajouté.
«En retirant le droit de porter plainte aux tiers, le projet de loi propose de créer un nouveau régime de signalement où ces tiers ne pourront plus être informés des motifs du rejet de leur plainte ou de demander une révision de la décision», a avancé Mme Khalil.
«C'est un affaiblissement très clair du système, a-t-elle poursuivi. Le projet de loi 14 propose un recul historique du régime de déontologie policière [...] alors que la surveillance des interventions policières, la lutte contre la brutalité policière, c'est une responsabilité collective.»
Alexandre Popovic, porte-parole de la CRAP, est d'ailleurs un habitué des plaintes en déontologie policière, lui qui agit par «solidarité» envers «ceux qui ne sont malheureusement plus parmi nous pour se faire entendre» et les proches des victimes.
«Moi, quand j'apprends dans le journal qu'une personne a perdu la vie aux mains d'un policier, j'ai le réflexe de porter plainte», a témoigné celui dont au moins quatre plaintes ont porté leurs fruits.
«Si la police utilise la force au nom de la protection de la collectivité, nous sommes tous concernés lorsqu'un citoyen se retrouve à l'hôpital ou au cimetière à la suite d'une intervention policière, a-t-il fait valoir. Ce n'est pas vrai que je vais donner un chèque en blanc aux quelque 15 000 policiers actifs sur le territoire québécois parce que la collectivité a aussi besoin d'être protégée contre les policiers qui sont vites sur la matraque, vite sur le taser ou encore vite sur le poivre de Cayenne.»
Il y a longtemps que la LDL et d'autres partenaires réclament une réforme du système de déontologie policière.
Ces organismes souhaitent notamment voir le délai péremptoire pour porter plainte passer de 1 à 3 ans et de rendre le processus de conciliation volontaire plutôt qu'obligatoire.