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«Il y a une urgence d'agir pour nous.»
François Legault a réussi à obtenir un front commun des provinces mardi: elles demandent toutes au fédéral une «juste répartition» et un «contrôle» des demandeurs d'asile en fonction de la capacité de chaque province et territoire à fournir des logements et services.
Et il y a «urgence d'agir», car un retour de Donald Trump à la Maison-Blanche pourrait même augmenter l'afflux de demandeurs d'asile, craint le premier ministre du Québec.
À l'issue de la première journée du sommet annuel du Conseil de la fédération mardi à Halifax, M. Legault a ainsi pu convaincre ses homologues que le Québec recevait trop de demandeurs d'asile, par rapport à son poids démographique et à sa capacité de fournir des logements et des services.
En conférence de presse en fin de journée dans un hôtel luxueux de la capitale de la Nouvelle-Écosse, il a toutefois refusé de dire quelles provinces accepteraient d'en recevoir davantage.
«Je ne veux pas révéler les discussions privées qu'on a eues, mais il y a une ouverture chez certaines provinces. C'est sûr que beaucoup de provinces s'inquiètent déjà du manque de logements, mais c'est une question d'équité», a-t-il déclaré.
L'Alberta et la Colombie-Britannique avaient répondu plus tôt en journée qu'elles en avaient déjà plein les bras.
Les provinces demandent à Ottawa d'«accélérer le contrôle des véritables demandeurs d'asile entrant au Canada et de travailler avec les gouvernements des provinces et territoires à établir le nombre approprié de demandeurs d'asile pouvant être acceptés», tout en réclamant au fédéral un financement «adéquat».
Il faut ainsi «resserrer» l'admission des demandeurs d'asile pour départager les vrais des faux, a plaidé M. Legault. Beaucoup arrivent ici à titre de touristes et demandent le statut de réfugié, a-t-il dénoncé.
Il suggère au fédéral de «mettre en place des visas» pour certains pays, faire des recherches sur les visiteurs et exiger un montant minimal en actifs.
L'afflux de demandeurs d'asile est un problème «aigu» au Québec, a reconnu la première ministre de l'Alberta, Danielle Smith, en conférence de presse en milieu d'après-midi.
Elle a ajouté qu'elle ressentait de la sympathie pour le Québec, mais «nous éprouvons un type de pression similaire», a-t-elle dit.
À ses côtés, son collègue de la Colombie-Britannique, David Eby, a également fait valoir que sa province faisait plus que sa part en matière d'accueil des immigrants.
M. Legault estime que des transferts de demandeurs d'asile du Québec vers d'autres provinces pourraient avoir lieu dès les prochains mois.
Il a rappelé que le ministre fédéral de l'Immigration, Marc Miller, avait lui-même laissé entendre que dès le mois d'août, il «devrait y avoir des résultats» dans les efforts du fédéral déjà entrepris pour alléger la pression sur le Québec.
«Il y a une urgence d'agir pour nous», a fait valoir le chef du gouvernement caquiste.
Il a même évoqué des risques advenant la réélection du candidat républicain Donald Trump à la présidence des États-Unis en novembre.
«Une éventuelle élection pourrait venir encore plus augmenter le nombre de demandeurs d'asile» au Canada, a commenté M. Legault.
Au deuxième trimestre de cette année, selon Statistiques Canada, le Québec accueillait un total de 597 000 résidents non permanents, soit déjà 47 000 de plus que le trimestre précédent. À titre de comparaison, au deuxième trimestre de 2023, ils étaient 421 000.
«On n'est pas capables d'intégrer ces personnes, il nous manque de logements, il nous manque de personnel, beaucoup sont à Montréal et ne parlent pas français», a déploré le premier ministre du Québec.
Dans le total des résidents non permanents, il y a 190 000 demandeurs d'asile et 407 000 titulaires de permis de travail et d'études, et les membres de leur famille.
En vertu d'un accord Canada-Québec signé en 1991, le Québec contrôle le volume d’entrée de ses futurs résidents permanents, les immigrants économiques, ainsi que leur intégration et francisation. L'immigration économique a représenté 66 % de l'immigration permanente en 2022.
Le fédéral s'occupe des réfugiés, de la réunification familiale et des enjeux liés à la citoyenneté.
Le Québec peut recevoir un pourcentage du total des immigrants arrivant au Canada qui équivaut à la proportion de sa population au sein de la fédération. À l'heure actuelle, le poids démographique du Québec est d'environ 22,3 % de la population canadienne.
Le premier ministre fédéral Justin Trudeau avait déjà dit que le Québec avait la «pleine capacité» d'accueillir 112 000 immigrants par an, donc un peu plus de 22 % de la cible de 500 000 immigrants permanents que son gouvernement veut accueillir par an d'ici à 2025.
M. Legault a déjà émis le souhait que le Québec accueille une immigration à 100 % francophone d'ici à 2026.
Actuellement, la proportion se situe plutôt autour de 60 %. La ministre de l'Immigration, Christine Fréchette, a nuancé la cible pour parler d'immigration francophone ou francotrope, donc formée de gens dont la langue serait compatible avec la langue française.
Selon la planification pluriannuelle du gouvernement, le Québec pourrait atteindre 96 % d'immigrants économiques connaissant le français en 2026-2027. On était à 88 % en 2022.