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Ces craintes ont été soulevées lors des consultations gouvernementales à ce sujet.
Des membres de groupes minoritaires craignent que le projet de loi contre la haine sur internet impose des limites à leur propre liberté et puisse les transformer en cibles pour la police.
Ces craintes ont été soulevées lors des consultations gouvernementales à ce sujet.
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Des documents, obtenus par l'entremise de la Loi d'accès à l'information, contiennent des avertissements voulant que le projet de loi nuise à des groupes marginalisés. Ainsi des travailleuses du sexe craignent que la loi permette de fermer leur site internet, ce qui menacerait leur sûreté et même pourrait mener à leur arrestation.
Le ministre du Patrimoine Pablo Rodriguez a confié à un groupe d'experts le mandat d'étudier le sujet, «ce qui constitue la prochaine étape de l'élaboration d'une mesure législative visant à lutter contre le contenu préjudiciable en ligne», a indiqué le gouvernement en mars.
Si adoptée, la loi donnerait des pouvoirs accrus au Service canadien de renseignement de sécurité pour obtenir des renseignements sur les abonnés des fournisseurs de service. Ces entreprises devront signaler certains messages à la police et aux services de sécurité.
Le gouvernement veut mettre à jour le projet de loi C-36 qu'il avait présenté à la fin de la dernière législature. Toutefois, la mesure législative est morte au feuilleton lorsque des élections générales ont été déclenchées.
Il avait lancé des consultations publiques juste avant le début de la campagne électorale. La présentation d'un projet de loi contre la haine demeure une priorité, soutient-il.
«Si des mesures claires doivent être mises en place contre les discours haineux sur internet, nous reconnaissons les inquiétudes soulevées au sujet des effets inattendus pouvant survenir si une approche réfléchie n'est pas adoptée», a déclaré Ashley Michnowski, la directrice des communications du cabinet de M. Rodriguez.
Le projet de loi vise à éliminer les discours haineux contre les femmes, les groupes raciaux, les minorités religieuses et les LGBTQ canadiens en bloquant certains sites internet et en obligeant les plateformes à retirer les contenus haineux.
Certains membres de ces groupes rappellent que l'internet est l'une des rares plateformes où la liberté de parole existe réellement pour eux. Selon eux, le projet de loi pourrait brimer leurs droits.
Darryl Carmichael, de la faculté de Droit de l'Université de Calgary, avait dit dans son intervention que le projet de loi pourrait nuire aux groupes raciaux ou marginalisés, notamment si certains messages sont mal interprétés comme étant offensants.
«Des messages de Black Lives Matter ont été faussement étiquetés comme étant haineux et avaient été retirés, avait-il rappelé. En conséquence, les voix des groupes que l'on veut protéger seront encore plus isolées.»
Des Autochtones craignent que la police profite des pouvoirs accrus pour cibler leurs discours et leurs manifestations.
L'Association nationale des centres d'amitié, un réseau national de centres communautaires de la société civile autochtone offrant des programmes, des services et du soutien aux Autochtones vivants en milieu urbain, mentionne que «les activités communautaires et de résistance menées par les Autochtones ont prospéré en ligne». Les manifestations contre l'exploitation des ressources dépendent des réseaux sociaux, car ceux-ci «représentent une part importante des stratégies de communication».
«Ces actes de résistances peuvent facilement être décrits comme des manifestations antigouvernementales ou du cyberterrorisme autochtones», peut-on lire dans son intervention.
L'organisme signale que des agences gouvernementales pourraient se servir du projet de loi comme une arme pour identifier des protestataires antigouvernementaux.
Des experts disent que les algorithmes pourraient choisir quelques mots clés, sans connaître le contexte ou les nuances d'un message publié sur les réseaux sociaux. Ces propos seraient alors mal interprétés et provoqueraient une intervention policière.
Le professeur Michael Geist, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en droit d'internet et du commerce électronique, dit que les «avis automatisés d'une intelligence artificielle peuvent placer en danger ces groupes».
Selon lui, les critiques soulignées lors de la consultation doivent conduire le gouvernement à prendre conscience qu'il a adopté une mauvaise approche.
Laura Scaffidi, une porte-parole du ministre Rodriguez a déclaré que le gouvernement «prenait au sérieux ce que les gens lui avaient dit pendant la consultation». C'est la raison qu'un comité d'experts a été nommé à ce sujet.
«Nous savons qu'il s'agit d'un enjeu important pour les Canadiens, a-t-elle souligné. Nous allons bien prendre le temps de faire les choses correctement.»