Début du contenu principal.
Le docteur Jean-Jacques Lebrun et ses collègues ont mis le doigt sur une stratégie qui pourrait permettre de combattre plus efficacement le cancer du sein triple négatif.
Des travaux menés à l'Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill et qui pourraient offrir un nouvel espoir aux femmes atteintes d'une forme extrêmement agressive et pratiquement incurable de cancer du sein vaut à ses auteurs le prix de la découverte scientifique de l'année 2021 du magazine Québec Science.
Le docteur Jean-Jacques Lebrun et ses collègues ont été salués par les lecteurs de la publication scientifique pour avoir mis le doigt sur une stratégie qui pourrait permettre de combattre plus efficacement le cancer du sein triple négatif.
«C'est très important pour les troupes, a réagi le docteur Lebrun. Souvent en recherche, on travaille très fort, puis on ne voit pas la lumière au bout du tunnel, on se demande si ça va servir à quelque chose, ça donne vraiment quelque chose? Un prix comme ça, ça ramène un peu sur terre et puis ça dit qu'au moins il y a une reconnaissance (...) et puis, que ça peut amener à des applications concrètes, donc c'était vraiment très important pour nous.»
Le cancer du sein dit «triple négatif» est ainsi nommé, car il est dépourvu des trois principaux récepteurs qui agissent comme porte d'entrée pour les traitements (l'œstrogène, la progestérone et une protéine appelée facteur de croissance épidermique humain).
Même si elle pourra tout d'abord répondre aux traitements de chimiothérapie ou de radiothérapie, la tumeur reviendra ensuite souvent, plus agressive et plus intraitable que jamais.
À lire également:
Le docteur Lebrun et ses collègues ont identifié une nouvelle polythérapie ciblée qui pourrait réduire la croissance tumorale dans le cancer du sein métastatique.
À l'aide de l'outil d'édition génique CRISPR-Cas9, l'équipe a réussi à identifier une voie de signalisation cellulaire susceptible d'induire la formation de tumeurs et une autre susceptible de la freiner.
Les chercheurs ont ensuite mis le doigt sur deux médicaments, la torin 1 et la vertéporfine. Le premier bloquerait la première voie de signalisation cellulaire et le second imiterait l'action de la deuxième.
Les scientifiques ont ensuite constaté que les deux médicaments agissent en synergie lorsqu'ils sont utilisés ensemble, ce qui les rend plus efficaces que s'ils sont utilisés seuls.
La vertéporfine, dans un premier temps, incite les cellules à s'autodétruire, un phénomène bien connu appelé apoptose. De son côté, la torin1 truque les cellules cancéreuses à absorber ce qui se trouve dans leur environnement immédiat _ ce qu'elles font naturellement pour survivre, sauf que cette fois, le processus s'emballe et les cellules finissent par imploser à force de trop manger. Elles se trouvent aussi, du fait même, à ingérer la vertéporfine en circulation.
Depuis l'annonce de la découverte l'été dernier, les travaux de l'équipe du docteur Lebrun lui ont permis d'identifier quels gènes sont responsables de la résistance aux médicaments, une percée qui pourrait être annoncée officiellement au cours des prochains mois.
«Les patients vont répondre initialement, mais très rapidement, il va y avoir des phénomènes de résistance qui vont s'installer, les patients vont devenir résistants au traitement et les tumeurs vont (revenir)», a dit le docteur Lebrun.
«C'est un phénomène classique. Donc on a utilisé la même approche de criblage à l'échelle du génome humain pour découvrir quels pouvaient être les gènes qui pouvaient resensibiliser ces cellules cancéreuses au traitement, par exemple de chimiothérapie ou au traitement ciblé. Donc, c'est très puissant.»
Ses collègues et lui planchent aussi sur des stratégies qui permettraient d'offrir à leurs patientes un traitement personnalisé le plus rapidement possible, d'autant plus qu'il s'agit souvent de patientes qui ne peuvent se permettre d'attendre deux ans pendant qu'on procède à tous les tests et à toutes les analyses nécessaires pour identifier la meilleure thérapie pour elles.
Le docteur Lebrun essaie enfin d'aligner les astres de manière à pouvoir procéder aux premiers essais cliniques de la polythérapie qui lui a valu les honneurs de Québec Science.
«Notre idée derrière tout ça, ce n'est pas de faire du travail expérimental, de faire de belles découvertes, de publier dans de grands journaux, d'obtenir des prix, et cetera, puis qu'après ça, ça s'arrête et on passe à autre chose», a-t-il dit en conclusion.
«Je veux vraiment que ça bénéficie, que ça revienne pour les patients, et que si ça fonctionne (...), qu'on ait pu amener quelque chose, une nouvelle thérapie qui soit efficace. C'est ça vraiment l'objectif.»