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«Je pourrais manger cette fille pour dîner», chante Bilie Eillish dans son plus récent succès.
La musique queer féminine est en plein essor. Avec des textes plus explicites que jamais, des artistes comme Billie Eilish et Chappell Roan flirtent avec le sommet des palmarès, portées par la génération Z sur les réseaux sociaux. Une vague qui inspire la communauté LGBTQ+ au Québec, et sur laquelle des artistes d’ici espèrent surfer.
«I could eat that girl for lunch (Je pourrais manger cette fille pour dîner)», s’exclame Billie Eilish sur sa nouvelle chanson Lunch. La pièce a fait ses débuts au cinquième rang du Billboard Hot 100.
«Moi, entendre une pièce comme ça, adolescente, j’aurais adoré parce que quand j'étais jeune, il n'y avait pas une tonne de choses de disponible», se remémore la rappeuse québécoise Calamine, qui se proclame féministe, queer et anti-capitaliste. Elle confie s’être longtemps sentie «pas normale» en raison de son homosexualité.
Lunch n’est que la plus récente des chansons queers féminines qui roulent en boucle sur les réseaux sociaux ces derniers mois. La pièce It’s Not My Fault de Renée Rapp, qui est populaire pour son interlude: «Kiss a blonde, kiss a friend, can a gay girl get an amen?(Embrasse une blonde, embrasse une amie, est-ce qu’une fille gaie peut avoir un amen)», cumule plus de 13 millions de vues sur YouTube.
De son côté, Good Luck Babe de Chappell Roan, qui parle d’une histoire d’amour queer déchirée par l’hétéronormativité, compte plus de 201 millions d’écoutes sur Spotify depuis sa sortie en avril dernier.
Selon Chris Ngabonziza, directeur de la programmation et du développement artistique chez Fierté Montréal, c’est la gen z et les réseaux sociaux qui permettent cette montée de la musique queer féminine.
Et ce phénomène ne passe pas inaperçu. En plus de la soirée FeminiX, mettant à l’honneur les femmes queers, le festival présentera du 1er au 11 août une programmation composée à 70% d’artistes queers féminines, selon M. Ngabonziza.
«Fierté Montréal n’a pas toujours eu une bonne relation avec cette communauté, mais on veut changer ça parce que c’est là que la société est rendue», affirme-t-il.
Des artistes comme Mitsou et Marjo font aussi partie de la programmation pour souligner leur complicité avec la communauté LGBTQIA2S+.
«La gen Z est symptomatique de toutes les avancées qui ont été faites par les gens qui sont passés avant eux», croit M. Ngabonziza. «Il y a aussi la présence d'alliés qui ont aidé à visibiliser la communauté et on doit les souligner.»
Calamine rêve quant à elle au jour où la programmation de Fierté sera 100% queer. Elle reconnaît les avancées faites dans les dernières années et le travail des organisateur.rice.s, mais elle est «prête pour plus».
Elle garde une certaine amertume en repensant aux comportements de certaines des idoles alliées de la communauté de son adolescence, qu’elle associe à du queerbating.
«Comme le célèbre baiser entre Madonna et Britney Spears ou le groupe russe T.AT.U qui n’étaient même pas lesbiennes», énumère la rappeuse. Le terme queerbating fait référence à «une stratégie marketing utilisée pour séduire les personnes queers afin qu'elles s'intéressent à une oeuvre ou une émission en particulier, sans réelle représentation LGBTQ+».
Selon Calamine, «il y a toute une génération qui s’accroche encore à ces images de la femme queer qui sont super stéréotypées».
Ces stéréotypes sont encore visibles au sein de cette nouvelle mouture d’artistes musicales féminines queers, selon l’autrice-compositrice-interprète Safia Nolin. Lorsqu’elle observe les gros noms qui s’affichent dans les palmarès, elle ne peut s’empêcher de remarquer que ces femmes «fittent dans le moule de la société: mince, blanche, maquillée, rasée, etc.»
«Moi quand j’étais jeune, il n’y en avait pas de grosse fille, queer, arabe, avec du poil», affirme Safia Nolin. «Aujourd’hui, quand tu représentes ça, les gens réagissent mal. Si tu essayes de remettre en question le genre ou de le déconstruire, c’est pire», estime-t-elle.
Selon Safia Nolin, c’est maintenant autour des artistes queers féminines de mettre de l’avant d’autres artistes issues de groupes marginalisés pour rendre l’industrie de la musique populaire encore plus diversifiée et inclusive, «parce qu’on est rendu là».