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Une baisse de 18 millions de dollars des dividendes au dernier quart aura en quelque sorte mené à la récente vague de mises à pied chez Groupe TVA, notamment.
Les dividendes de 600 millions de dollars de Québecor en 2022 ont certes permis au géant québécois des télécommunications de terminer l’année en hausse de 21,3 millions de dollars, mais un quatrième trimestre difficile aura en quelque sorte mené à la récente vague de mises à pied chez Groupe TVA.
C’est ce qu’a expliqué le président Pierre Karl Péladeau, jeudi, lors de la présentation des résultats financiers de Québecor, qui a souffert d’une baisse de 18 millions de dollars de son bénéfice net attribuable aux actionnaires (142,5 millions de dollars) au dernier quart de l'année – le tout, malgré des revenus de 1,19 milliard de dollars pour la même période, en hausse de 0,1 % par rapport au trimestre précédent.
Ainsi, Québecor n’a eu d’autre choix que de «prendre les mesures appropriées afin de rétablir la situation financière [pour assurer] la pérennité de Groupe TVA», soit la suppression de 240 emplois, dont 140 au sein de la chaîne de télé généraliste elle-même.
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M. Péladeau a indiqué que ces compressions ont eu lieu malgré des investissements continus dans le contenu et dans un contexte de «réduction des audiences de la télédiffusion», causés selon lui par la «concurrence déloyale» des multinationales d’écoute en continu et de Radio-Canada, qui s’est «lancée dans une course aux cotes d’écoute non prévue à son mandat» public.
Le PDG de Québecor a notamment cité l’exemple de la plateforme payante de la société d’État, Tou.TV. Pour M. Péladeau, Radio-Canada amenuise le bassin de revenus publicitaires disponibles en plus de bénéficier de subventions, là où les médias privés ne peuvent que se rabattre que sur des revenus publicitaires.
D’où la demande réitérée d’une intervention du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC). M. Péladeau a également répété que Bell Télé profite d’un traitement commercial préjudiciable. En mai 2022, la Cour suprême avait refusé d’entendre Groupe TVA et Québecor Média en appel sur les décisions du CRTC de forcer l'offre du signal de TVA Sports aux clients de Bell lors des séries éliminatoires de 2019 dans la Ligue nationale de hockey (LNH).
Mais du côté de Radio-Canada, on dit que «la nature même de la programmation de la société d'État, qui inclut quatre magazines d’affaires publiques et une émission jeunesse (100 Génies) en heures de grande écoute, [en plus de privilégier les séries] dramatiques canadiennes originales, contredit les affirmations à l’effet qu’elle représente une course effrénée des cotes d’écoute au mépris de notre mandat d’informer et de divertir les francophones du Canada».
Pour reprendre la balle lancée par M. Péladeau au sujet de Tou.TV, Marc Pichette, premier directeur à la promotion et aux relations publiques de Radio-Canada, rappelle que le CRTC a rejeté une plainte de Québecor entourant la plateforme en 2021.
«L’offre du service Tou.tv Extra ne [crée] pas de désavantage en vertu du cadre réglementaire actuel, le service étant plutôt une offre concurrentielle à l’avantage du système canadien de radiodiffusion et des Canadiens», a écrit M. Pichette à Noovo Info, en citant la décision du CRTC.
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Pour sortir du cadre strictement canadien... L'avenir des médias canadiens en entier est même «en jeu», selon M. Péladeau, notamment parce que des multinationales telles que Meta (Facebook, Instagram) ou Google utilisent gratuitement leur contenu. «Tous les paliers de gouvernement doivent agir avant qu’il ne soit trop tard», a-t-il insisté lors de son bilan de jeudi.
Pour M. Péladeau, la solution réside dans «la prompte adoption» du projet de loi C-18, qui obligerait les géants multinationaux du numérique à négocier des accords qui compenseraient les médias canadiens pour la republication de leur contenu sur leurs plateformes.
Google a confirmé mercredi qu'elle empêche certains utilisateurs canadiens de visionner le contenu des nouvelles en réponse au projet de loi sur les nouvelles en ligne du gouvernement libéral.
Le gouvernement Trudeau semble se camper du côté de Québecor en la matière. Une porte-parole du ministre du Patrimoine canadien, Pablo Rodriguez, a déclaré que les Canadiens ne seraient pas intimidés, et a qualifié de «décevante» la décision de Google empruntée au livre de jeu de Meta.
«Cela n'a pas fonctionné en Australie, et cela ne fonctionnera pas ici parce que les Canadiens ne seront pas intimidés. En fin de compte, tout ce que nous demandons aux géants de la technologie, c'est de rémunérer les journalistes lorsqu'ils utilisent leur travail», a déclaré la porte-parole du ministre Rodriguez, Laura Scaffidi dans un communiqué mercredi.
«Les Canadiens doivent avoir accès à des nouvelles factuelles de qualité aux niveaux local et national. C'est pourquoi nous avons introduit la Loi sur les nouvelles en ligne. Les géants de la technologie doivent être plus transparents et responsables envers les Canadiens», a-t-elle ajouté.
Jeudi, M. Péladeau a ajouté qu’il «s’attend à une résolution rapide».
«Le ministre [Rodriguez] veut atteindre de la vraie compétition dans le milieu de la télécommunication au pays», a-t-il souligné.