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Alors que l’aide maximale est maintenant de trois ans...
Coups de poing, coups de pied, coups avec une palette de bois, privation de nourriture et torture psychologique; la liste des sévices infligés par le pasteur Claude Guillot à ses victimes est longue. Aujourd'hui, deux d'entre elles, qui ont vécu l'enfer pendant une vingtaine d'années en plus d'un procès qui s'est étalé sur sept ans entament un nouveau combat.
Guillaume Boulanger et Josh Seanosky contestent la réforme de l’Indemnisation des victimes d’actes criminels (IVAC), dont l’aide maximale est maintenant de trois ans.
Les deux hommes ont porté plainte auprès du Protecteur du citoyen ainsi qu’à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Au total, cinq plaintes ont été déposées au Protecteur.
Souffrant de chocs post-traumatiques sévères et d'une invalidité totale et permanente, l’IVAC juge que les deux Québécois victimes du pasteur n’ont pas le droit à la même indemnisation.
M. Seanosky raconte qu’il n’est plus indemnisé, puisqu’il a été consolidé. On juge ainsi que son état de santé a atteint un plateau.
De son côté, M. Boulanger dévoile avoir été séquestré pendant six mois dans sa chambre et forcé de composer et de copier des ouvrages bibliques jusqu'à 12 heures par jour.
Il a eu droit à un sursis de trois ans, car il n’est pas encore consolidé. Mais d’ici trois ans, il dit qu’il pourrait ne pas avoir le choix de «s’inventer une capacité de travail qui n’existe pas» s’il voit son indemnisation prendre fin.
Les deux Québécois dénoncent cette situation et estiment que la réforme de l’IVAC contrevient à la Charte des droits et libertés du Québec et du Canada, car elle discrimine les victimes.
«Je ne pourrai pas travailler comme une personne normale si j’ai des séquelles permanentes», a lancé M. Boulanger. «Ils nous condamnent à un chemin sans issue.»
Le Dr Christophe Nowakowski - psychiatre qui a évalué M. Boulanger – affirme toutefois qu’il est probable que son patient ne soit pas consolidé. «Il y a de la place à l’amélioration.»
Dr Nowakowski montre du doigt la nouvelle réforme, qui «cause préjudice», selon lui.
«Si on coupe les prestations après trois ans, ça les soutient moins que la première loi et ça permet d’économiser de l’argent.»
Tous les partis d'opposition montrent du doigt cette situation et exhortent le ministre de la Justice, Simon Jolin-Barette, à intervenir.
Le chef du Parti conservateur du Québec, Éric Duhaime, a qualifié cette nouvelle loi «d'économie de bout de chandelle».
«C'est absolument atroce.»
Le porte-parole en matière de Justice chez le Parti québécois, Pascal Paradis, demande à M. Jolin-Barrette de «voir ces témoignages, d'entendre les victimes et de faire la bonne chose».
André A. Morin, porte-parole du Parti libéral du Québec, s'engage de son côté à demander à ce que la loi soit changée.
M. le ministre, «il n’est pas trop tard pour faire la bonne affaire», a conclu le porte-parole de Québec solidaire, Guillaume Cliche-Rivard.
L'ancien sénateur Pierre-Hugues Boisvenu, particulièrement touché par le sort des victimes d'actes criminels et leurs proches, abonde dans ce sens.
«Si on s'assoit avec le ministre et qu'on trouve des pistes de solution, ça ne coûtera pas plus cher à l'État», estime-t-il.
Partageant son histoire bouleversante, M. Seanosky espère quant à lui que son message encouragera des milliers de victimes «impactées par cette nouvelle loi qui n’a aucun sens» à emboiter le pas.
M. Boulanger et M. Seanosky comptent également porter leur cause devant le Tribunal administratif du Québec. Une première audience est prévue ce jeudi.
Voyez le reportage de Marie-Claude Paradis-Desfossés dans la vidéo.