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International

Avec la chute du régime al-Assad en Syrie, Israël perçoit du danger, mais aussi une ouverture

L'État hébreu craint désormais que les troubles en Syrie ne se propagent sur son territoire.

Des soldats israéliens se tiennent à côté de véhicules blindés garés près de l'ainsi nommée ligne Alpha, qui sépare les hauteurs du Golan annexées par Israël de la Syrie, dans la ville de Majdal Shams, le lundi 9 décembre 2024.
Des soldats israéliens se tiennent à côté de véhicules blindés garés près de l'ainsi nommée ligne Alpha, qui sépare les hauteurs du Golan annexées par Israël de la Syrie, dans la ville de Majdal Shams, le lundi 9 décembre 2024.
/ Associated Press

La chute dramatique du président syrien Bashar al-Assad présente un danger potentiel, mais aussi une ouverture pour l'Israël voisin.

Après avoir mené des guerres sur plusieurs fronts pendant des mois, l'État hébreu craint désormais que les troubles en Syrie ne se propagent sur son territoire. Mais Israël considère également la fin du régime al-Assad comme une occasion de perturber la capacité de l'Iran à faire passer des armes en contrebande par la Syrie vers le groupe militant libanais Hezbollah.

L'armée israélienne a pris le contrôle d'une zone tampon démilitarisée en Syrie, créée dans le cadre d'un cessez-le-feu de 1974 entre les deux pays. Elle a déclaré que cette décision était temporaire et destinée à sécuriser sa frontière.

Mais l'incursion a suscité des critiques, les détracteurs accusant Israël de violer le cessez-le-feu et d'exploiter possiblement le chaos en Syrie pour accaparer des terres. Israël contrôle toujours le plateau du Golan, qu’il a conquis à la Syrie pendant la guerre du Moyen-Orient de 1967 et qu’il a ensuite annexé – une décision que la plupart de la communauté internationale ne reconnaît pas.

Voici un aperçu des récents développements le long de la frontière syrienne:

Où sont les troupes israéliennes?

Le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a déclaré dimanche que les forces israéliennes se déplaçaient pour contrôler une zone tampon démilitarisée d’environ 400 kilomètres carrés en territoire syrien. La zone tampon entre la Syrie et le plateau du Golan contrôlé par Israël a été créée par l’ONU après la guerre du Moyen-Orient de 1973. Une force de l’ONU d’environ 1100 soldats patrouille dans la région depuis ce temps.

Lors d’une visite dimanche sur une colline du plateau du Golan surplombant la Syrie, M. Nétanyahou a affirmé que les troupes syriennes ayant abandonné leurs positions, l’entrée d’Israël dans la zone tampon était nécessaire en tant que «position défensive temporaire».

Les rebelles qui ont renversé le président al-Assad et contrôlent désormais une grande partie de la Syrie sont dirigés par un ancien militant d'Al-Qaïda, bien qu'il ait rompu ses liens avec le groupe extrémiste il y a des années et ait promis un gouvernement représentatif et une tolérance religieuse.

Israël a envoyé des troupes terrestres et aériennes dans la zone tampon, y compris du côté syrien du mont Hermon enneigé, qui est divisé entre les hauteurs du Golan, le Liban et la Syrie.

Seuls les États-Unis reconnaissent le contrôle d'Israël sur les hauteurs du Golan.

Combien de temps les troupes israéliennes resteront-elles dans la zone tampon?

Les troupes israéliennes ont commencé à se déplacer dans la zone tampon samedi. Samedi également, des hommes armés ont attaqué les forces de l'ONU près de la frontière avec Israël, selon le ministre israélien des Affaires étrangères Gideon Saar.

«(L'armée israélienne) a pris le contrôle ciblé et temporaire de certaines zones près de la frontière pour empêcher un scénario du 7 octobre depuis la Syrie», a expliqué M. Saar, faisant référence à l'attaque surprise du Hamas en Israël en 2023 depuis la bande de Gaza.

De nombreux acteurs de la région ont condamné cette décision. Le ministère égyptien des Affaires étrangères a accusé Israël d'«exploiter le vide du pouvoir (…) pour occuper davantage de territoires syriens et créer un fait accompli en violation du droit international».

Ce n’est pas la première fois qu’Israël pénètre dans la zone tampon cette année.

Un rapport de l’Associated Press publié le mois dernier, qui examinait des images satellite, a révélé qu’Israël travaillait sur un projet de construction, peut-être une nouvelle route, le long de la frontière avec la Syrie dès le mois de juillet, et était dans certains cas entré dans la zone tampon pendant les travaux. Après la publication du rapport de l’AP, les forces de l’ONU ont averti que l’armée israélienne avait commis de «graves violations» de son accord de cessez-le-feu avec la Syrie.

Israël envahit-il la Syrie?

Les dirigeants politiques et militaires israéliens ont souligné que la saisie de la zone tampon était temporaire et n’était pas un prélude à l’entrée dans d’autres parties du territoire syrien.

«Le plan pour le moment est qu’il s’agisse d’une mesure temporaire pour garantir le maintien de la stabilité à la frontière, pour garantir le maintien de la zone tampon et pour que les forces de l’ONU puissent rester», a déclaré un responsable militaire, qui s’est exprimé sous couvert d’anonymat conformément aux directives militaires.

Le responsable a noté qu’en 2014, les soldats de la paix de l’ONU avaient fui la zone tampon après que des rebelles syriens liés à Al-Qaïda eurent attaqué leurs campements. Après que des hommes armés ont attaqué les forces de l’ONU pendant le week-end, Israël a voulu s’assurer que la situation ne se reproduise pas, a indiqué le responsable.

Israël n’essaie pas actuellement de modifier la frontière ou de se préparer à une invasion en Syrie, estime Carmit Valensi, chercheuse principale à l’Institut d’études de sécurité nationale, un groupe de réflexion de Tel-Aviv.

«Pour l’instant, il s’agit d’une opération tactique, pas d’une stratégie à long terme, en réponse à la dynamique de la situation en Syrie», a-t-elle avancé. Avec l’effondrement de l’armée syrienne, Israël veut protéger ses frontières jusqu’à ce que la situation se stabilise, a-t-elle ajouté.

Quels sont les intérêts d’Israël?

Israël affirme que son objectif immédiat est d’empêcher l’instabilité en Syrie de se propager dans la région frontalière.

Le ministre de la Défense, Israël Katz a exposé lundi les plans d’Israël pour la zone frontalière. Il a affirmé qu’après avoir terminé la prise de contrôle de la zone tampon, Israël créerait une «zone de sécurité» au-delà de celle-ci en détruisant l’artillerie lourde à travers la Syrie et en empêchant l’Iran de faire passer des armes en contrebande à travers la Syrie vers le Liban.

Le ministre des Affaires étrangères, Gideon Saar, a souligné lundi qu’Israël avait frappé plusieurs sites abritant des armes chimiques et des missiles à longue portée pour les empêcher de tomber entre les mains d’acteurs hostiles. M. Saar n’a pas précisé quand les frappes ont eu lieu. Les analystes ont déclaré qu’Israël allait probablement continuer à mener des frappes contre des cibles dans toute la Syrie.

Israël prévoit aussi aider la population druze en Syrie, une minorité religieuse très soudée qui vit également en Israël, en Jordanie et au Liban et qui a maintenu certains liens transfrontaliers.

Israël tente également d’ouvrir des lignes de communication avec les groupes rebelles syriens, pour aider à garantir que les factions soutenues par l’Iran ne reprennent aucun territoire, selon Mme Valensi.

Pendant de nombreuses années, Israël a discrètement fourni de la nourriture, des médicaments, des vêtements et d’autres formes d’aide au sud de la Syrie ravagé par la guerre dans le cadre de l’«opération Bon voisinage», qui s’est terminée en 2018. Plus de 4000 Syriens blessés et malades ont reçu des soins médicaux en Israël ou dans des hôpitaux de campagne israéliens, et ces liens non diplomatiques pourraient désormais s’avérer cruciaux.