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En marge de la décision de la Cour suprême, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse doit «procéder à un recentrage de son traitement des plaintes liées aux propos allégués comme discriminatoires».
En marge de la décision de la Cour suprême dans le procès l’opposant à l’humoriste Mike Ward, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ) doit «procéder à un recentrage de son traitement des plaintes liées aux propos allégués comme discriminatoires».
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Cela implique que pour qu’un dossier soit soumis à la CDPDJ, il devra être prouvé qu’un individu ciblé par des propos de discrimination (basés sur l'origine nationale ou ethnique, la langue, l'orientation sexuelle, le handicap ou la religion) a également subi un préjudice à sa dignité ou a vu d’autres personnes être encouragées à le discriminer aussi.
Dans une série de publications sur Twitter, la directrice générale de Juripop, Sophie Gagnon, explique que cela signifie que la Commission ne pourra dorénavant seulement intervenir que lorsque des propos discriminatoires seront proférés en public. Plusieurs dossiers actuellement étudiés ou en attente de traitement par la Commission seront donc fermés.
Jusqu’à tout récemment, la @CDPDJ1 pouvait enquêter quand une personne avait l’objet de propos discriminatoires « privés » - des insultes racistes lancées par un voisin, par exemple.
— Sophie Gagnon (@SopGagnon) April 19, 2022
La décision de la Cour suprême dans l’affaire de Mike Ward a coupé court à cette fonction. 1/6
«La CDPDJ, a statué la Cour suprême, peut seulement intervenir si les propos discriminatoires sont prononcés en public, indique-t-elle. Les mêmes propos, mais dits en privé, ne constituent pas un traitement discriminatoire.»
Mme Gagnon a souligné être préoccupée par cette décision, comme la majorité des dossiers portant sur de la discrimination traités par la CDPDJ concernaient des propos racistes. «Dans un contexte où les crimes haineux contre les personnes racisées sont en hausse, où le racisme systémique est nié, on doit se désoler que les personnes victimes de racisme perdent une manière efficace de défendre leurs droits», déplore-t-elle. Il est à noter que les services de la CDPDJ sont gratuits, contrairement à un passage dans un tribunal, qui nécessite généralement les services d’un avocat.
Le président de la Commission, Philippe-André Tessier, a tenu à indiquer que malgré ce recentrage, des propos discriminatoires sur la «race», l'origine nationale ou ethnique, la couleur, l'orientation sexuelle, le handicap ou la religion, demeuraient inacceptables dans la société québécoise.
«La Commission poursuivra sa mission d'assurer la promotion et le respect des principes énoncés dans la Charte, et maintiendra ses efforts pour informer, enquêter et émettre des recommandations dans les dossiers pour lesquels les droits garantis par la Charte sont menacés, a-t-il ajouté. Comme organisme indépendant du gouvernement, nous continuerons d'opérer au seul bénéfice de la population et de l'intérêt public.»
La Commission explique que sa décision a été prise après que la Cour suprême du Canada ait statué, en octobre dernier, que les propos tenus par l'humoriste Mike Ward au sujet de Jérémy Gabriel lors d'un spectacle il y a quelques années ne répondaient pas au critère de discrimination invoqué. Le jugement a fait valoir que l'on ne pouvait invoquer la discrimination au sens de la Charte des droits et libertés pour obtenir réparation dans un dossier de diffamation.
M. Tessier n'était pas en mesure de préciser le nombre de dossiers qui seront fermés, l'analyse étant toujours en cours, mais il a tout de même indiqué qu'il y en avait «des dizaines».
«On veut informer la population que ce genre de dossier-là, nous, on ne peut plus les traiter, donc les gens doivent évidemment consulter un avocat pour voir quelles sont les options qui s'offrent à eux pour saisir un tribunal de droit commun» a-t-il expliqué.
«Évidemment, s'il y a un doute, il ne faut pas que les gens hésitent à porter plainte chez nous et on fera l'analyse», a ajouté M. Tessier.