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Il est «inacceptable et honteux» que d’anciens joueurs de hockey juniors aient vécu des abus tels que ceux qu'ils décrivent dans un récent jugement de la Cour supérieure de l'Ontario, a déclaré lundi la ministre fédérale des Sports.
Il est «inacceptable et honteux» que d'anciens joueurs de hockey junior aient vécu les abus, violences sexuelles et actes de discrimination décrits dans un récent jugement de la Cour supérieure de l'Ontario, a déclaré lundi la ministre fédérale des Sports, Pascale St-Onge, qui en appelle à la fin des pratiques d'initiation dans tous les sports.
«C'est quelque chose qui est très simple à régler. Les équipes et les organisations sportives doivent tout simplement les interdire», a-t-elle dit en mêlée de presse en marge d'une comparution devant le comité permanent de la condition féminine.
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Elle a précisé que sa demande vaut pour l’ensemble des environnements sportifs et pas seulement ceux du hockey.
La décision du 3 février, dont les détails ont d'abord été rapportés par Radio-Canada, offre un compte-rendu détaillé des sévices sexuels et des gestes humiliants que disent avoir subis d'anciennes recrues des ligues de hockey junior majeur de l'Ontario, de l'Ouest et du Québec. Les abus auraient été commis par des vétérans, notamment au cours d'activités d'initiation, et se seraient déroulés au su de dirigeants d'équipes.
Le juge Paul Perell devait décider s'il autorisait une action collective dans cette affaire, ce qu'il a refusé. Ce dernier recommande plutôt d'intenter une procédure sur une base individuelle, écrivant dans le jugement que les déclarations sous serment cumulées dans ce dossier, ainsi que les contre-interrogatoires d'anciens joueurs, constituent «des éléments de preuve horribles» pointant «incontestablement» vers des actes criminels. Il s'est appuyé sur plusieurs témoignages précis pour en venir à ce constat.
«Ces éléments de preuve et les autres que je lis établissent qu'un nombre inconnu de (demandeurs) qui étaient des joueurs de la (Ligue de hockey de l'Ouest), de la (Ligue de hockey de l'Ontario) et de la (Ligue de hockey junior majeur du Québec) ont été torturés, séquestrés de force, rasés, dénudés, drogués, intoxiqués, agressés physiquement et sexuellement, violés (de façon individuelle ou collective), forcés d'agresser physiquement et sexuellement leurs coéquipiers (...), forcés de manger ou boire de l'urine, de la salive, du sperme et des selles», peut-on notamment lire dans le jugement.
La ministre St-Onge n'a pas mâché ses motsavant son témoignage en comité parlementaire. «C'est inacceptable et honteux que des générations de jeunes ont été exposées à ce type d'abus-là. C'est honteux, aussi, que des adultes aient laissé faire ça (et) les initiations doivent cesser maintenant», a-t-elle affirmé.
Devant les élus du comité, elle a insisté sur l'urgence d'agir pour rendre les environnements sportifs exempts d'abus et de discrimination.
Elle a indiqué que des annonces étaient à venir en mars à ce chapitre et que toutes les options étaient évaluées pour assurer «plus d'imputabilité», entre autres.
«Mais à court terme, je ne peux pas passer mon temps à suspendre le financement de toutes les organisations, a-t-elle poursuivi en mêlée de presse. La meilleure chose à faire aujourd'hui, c'est que les adultes et les organisations dans le système sportif envoient un message clair comme quoi c'est interdit (les initiations) et que ça arrête.»
En juin dernier, la ministre St-Onge a suspendu le financement fédéral de Hockey Canada après que des allégations de viol collectif eurent fait surface.
Pour l'heure, Québec n'entend pas interdire les initiations en milieu sportif à la grandeur de la province, notamment au niveau collégial. «Pour l'instant, on n'en est pas là, mais ça peut faire partie d'une réflexion. (...) La réflexion se poursuit et les actions (aussi), puis on verra éventuellement s'il faut sévir à ce niveau-là», a dit la ministre québécoise de l'Enseignement supérieur, Pascale Déry, en point de presse à Montréal.
Mme Déry a affirmé qu'un changement de culture est déjà en train de s'opérer, mais qu'il doit survenir «encore plus rapidement au sein des équipes sportives».
Elle a mentionné que des «formations obligatoires» sont en place et que «des enquêtes sont menées» lorsque son ministère ainsi que celui d'Isabelle Charest, ministre responsable du Sport, sont mis au courant «d'initiations qui dérapent».
Les ministres provinciaux et territoriaux du Sport rencontreront leur homologue fédérale plus tard cette semaine aux Jeux du Canada.
Mme St-Onge semble avoir l'appui de certains députés de partis d'opposition dans son appel à une interdiction des rites d'initiation. «Évidemment que ça n'a pas sa place», a dit le porte-parole bloquiste en matière de sports, Sébastien Lemire.
L'élu conservateur Gérard Deltell a, quant à lui, dit n'avoir «jamais compris c'était quoi le «fun'' de faire des initiations aussi dégradantes que ça». Il a toutefois indiqué qu'il exprimait son opinion personnelle.
La Presse Canadienne a tenté d'en savoir plus sur la position officielle des conservateurs. Le parti n'a pas répondu directement à cette question, bien qu'il ait fourni une déclaration écrite de son porte-parole en matière de sports, Richard Martel.
«Ces dernières allégations d'abus sont incroyablement troublantes et dégoûtantes. Les Canadiens s'attendent à ce que justice soit faite. Il n'y a pas de place pour ce genre de comportements indignes dans aucun sport ou segment de la vie canadienne», peut-on lire.
Le Bloc québécois a réitéré lundi sa demande qu'une commission d'enquête publique et indépendante soit déclenchée «sur la culture toxique dans les organisations sportives au Canada».
Le Nouveau Parti démocratique est en faveur de cette initiative, et son leader parlementaire, Peter Julian, a déclaré qu'Ottawa doit, de façon générale, prendre ses responsabilités dans ce dossier. «Quand on regarde le manque de surveillance que le gouvernement fédéral a fait depuis des années, c'est vraiment (à lui) de prendre des actions nécessaires pour protéger les joueurs et le public.»
Chez les conservateurs, M. Martel a tenu des propos similaires sans préciser si l'opposition officielle souhaite aussi une commission d'enquête publique. «Présentement, le gouvernement n'en fait pas assez. (...) (Il) doit mettre en place des mécanismes pour empêcher toute forme d'abus», a-t-il soutenu dans sa déclaration écrite.
Mme St-Onge, quant à elle, est restée vague à savoir si elle entend aller de l'avant avec le format d'une commission d'enquête, répétant à plusieurs reprises qu'à ses yeux, «la question n'est pas de savoir si on doit faire quelque chose, mais surtout comment on doit le faire».