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«Ces événements nous ont ouvert les yeux sur la gravité de la situation et permettront au gouvernement d’avoir une plus grande latitude pour revoir en profondeur certains aspects de notre système.»
Depuis près de 30 ans, tous les gouvernements au pouvoir à Québec ont fait de la santé la priorité numéro 1 de leur administration.
Il faut dire qu’avec un budget de plus de 50 milliards de dollars, soit 43 % des dépenses de l’État et une augmentation accélérée par la pandémie, le contraire serait aussi surprenant qu’irresponsable.
Après la réforme du Dr Rochon à la fin des années 90, la réforme Barrette plus récemment et les nombreux rapports sur le système de santé réalisés durant les dernières années, c’est maintenant au tour du gouvernement caquiste de se lancer dans sa « refondation » du système de santé, ceci sous la gouverne du ministre Christian Dubé.
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« Une autre réforme », diront certainement de nombreux intervenants. « Fini les rapports, il faut passer à l’action », a annoncé le ministre ce matin. Après 2 ans de pandémie, Christian Dubé a annoncé les grandes lignes de sa refondation en mettant l’emphase sur le fait que c’est un plan d’action sur 3 ans concret, mais surtout « mesurable ». Basé sur deux objectifs principaux soit d’offrir « la meilleure expérience patient » aux 8,5 millions de Québécoises et de Québécois et de faire du réseau « un employeur de choix » pour ses 300 000 employés et tous ceux à venir, le ministre a énoncé les principes fondamentaux de sa réforme.
Première ligne, prévention, accès aux données, décloisonnement des professions sont les principaux thèmes sur lesquels le ministre, ses collègues et la « machine » gouvernementale ont l’intention d’agir durant les 3 prochaines années. Un chantier d’une ampleur difficile à imaginer et dont le succès est constamment limité si l’on se fie aux exemples du passé.
Cependant, cette réforme se fait dans un contexte unique qui servira certainement le gouvernement. En effet, la pandémie nous aura démontré les limites importantes d’un système de santé dont l’universalité fait notre fierté.
Nous nous rappelons tous durant la 5e vague de la pandémie d’avoir entendu le premier ministre, le ministre et les intervenants nous répéter qu’il fallait « sauver » le système de santé.
Nous avons tous aussi été témoins des conséquences du manque de lit par habitant au Québec en comparaison avec plusieurs autres pays, notamment européens.
Ces événements nous ont ouvert les yeux sur la gravité de la situation et permettront au gouvernement d’avoir une plus grande latitude pour revoir en profondeur certains aspects de notre système. Je pense notamment à la question du privé en santé ou au décloisonnement des professions.
Depuis que je suis arrivé au Québec en 1995, j’ai été témoin du débat sans fin sur la place du privé en santé. Durant mes années au gouvernement, j’ai vu à plusieurs reprises les tentatives réussies — ou pas — de donner un rôle accru au secteur privé pour accélérer l’accès aux soins.
Crédit: Paul Chiasson | La Presse canadienne
J’ai aussi remarqué que cela créait toujours un clivage important au sein de la société. La pandémie aura eu pour effet de rendre la collaboration inévitable et l’expérience vécue sera certainement une base factuelle pour réaliser ce débat sur de bonnes bases.
Même chose d’ailleurs pour le décloisonnement des professions. Durant la pandémie, nous avons eu besoin des forces de tous les professionnels de la santé, quel que soit leur titre ou leur rôle spécifique. Nous avons dû penser la répartition des actes autrement et nous sommes donc prêts à rendre l’expérience durable.
Un autre aspect qui différencie cette réforme des autres est l’expérience professionnelle du ministre à la tête de celle-ci. Depuis 30 ans, la santé a, à quelques courtes exceptions près, été entre les mains de médecins qui avaient une expérience de gestion dans le réseau de la santé.
Cela comportait des avantages importants puisque la connaissance du système leur donnait une vision « terrain » du système. Il y’a eu des gains importants, des révisions de structure essentielles et des réformes qui, à ce moment-là, étaient certainement justifiées.
Cependant, j’entendais le ministre Dubé parler de « mesurable », de l’importance des données et d’efficacité et je me disais que son expérience professionnelle en gestion pourrait certainement contribuer à sa réussite dans ce dossier. Il manquait de chiffres et de mesures dans l’annonce de ce matin, mais je m’attends à ce qu’il y en ait beaucoup plus durant les interventions à venir.
Dans les meilleures pratiques en gestion, il est essentiel d’avoir des mesures qui sont mesurables et définies dans le temps pour que les plans d’action fonctionnent. Le ministre de la Santé doit gérer un système complexe et son expérience en tant que gestionnaire a clairement influencé son plan d’action et influencera fortement son implantation durant les prochains mois.
Crédit: Paul Chiasson | La Presse canadienne
D’ailleurs, sa promesse que d’ici la fin de l’été, la majorité des personnes sans médecin de famille peuvent passer par un guichet unique est un défi de taille et son implantation nous permettra de mesurer rapidement sa capacité et celle de son ministère à mener ses projets à terme.
Je laisserais mes collègues spécialisés commenter en détail les propositions du ministre dans sa refondation. Je n’ai certainement pas leurs connaissances et leur expérience dans le domaine. Nous entendrons également tous les partis politiques critiquer et commenter l’annonce du ministre en détail durant les prochaines semaines.
Nous avons 2 grands objectifs avec ce plan:
— Christian Dubé (@cdube_sante) March 29, 2022
-Offrir aux Québécois la meilleure expérience-patient par une porte d’entrée unique pour toute la 1ère ligne -Devenir un employeur de choix pour le personnel du réseau
Ajd nous en avons eu la démonstration: nous sommes tous mobilisés! pic.twitter.com/eLEuXrLDn3
D’ailleurs, le plan proposé étant sur 3 ans, il sera certainement un des éléments centraux de l’élection d’octobre prochain. De mon côté, j’ai envie de croire que ce sera une réussite. Non pas par partisanerie, mais simplement parce que la réforme du système de santé est essentielle à notre bien-être à tous.
Le succès du ministre et de son équipe sera au bénéfice de tous et nous ne pouvons donc qu’espérer qu’ils réussissent.
La pandémie nous a démontré que l’échec du système peut être tristement fatal.