Début du contenu principal.
C’est du jamais vu...
À moins d'une semaine de la cérémonie d’inauguration de Donald Trump, le Canada se prépare à faire possiblement face à l’une des pires crises diplomatiques de son histoire récente.
C’est du jamais vu depuis la fin de la guerre de 1812; pour la première fois en plus de 200 ans de relation de relation d’amitié et de partenariats prospères, le Canada est confronté à une menace imminente – tant à son économie qu’à sa souveraineté – provenant des États-Unis.
Avec ses idées de tarifs douaniers exorbitants et ses récents propos sur la possibilité d’annexer le Canada pour en faire le 51e État américain, Donald Trump va là où aucun de ses prédécesseurs n’a jamais osé aller. Trop loin pour que nous le laissions faire sans contre-attaquer.
Dans son livre The Art of the Deal, publié dans les années 1980, Donald Trump dévoile les secrets de ses tactiques en négociation. Tel un vautour, le milliardaire cherche les faiblesses de ses adversaires pour attaquer.
Trump ne négocie pas; il chasse. Et il a trouvé une proie parfaite, alléchante et juste assez faible, au nord de sa frontière. Du moins, c’est ce qu’il croit…
À VOIR AUSSI | Menaces de Trump: Trudeau se pointe à la télé américaine pour répliquer
Le président auquel nous aurons affaire dans une semaine, on le sait déjà, n’est vraiment pas un président ordinaire. Loin des politiciens classiques dotés de valeurs humanistes, Trump gouverne son pays davantage comme un dirigeant d’entreprise sauvage, prêt à tout pour obtenir ce qu’il veut.
La diplomatie traditionnelle n’aura donc que peu d’impact pour le faire changer d’idée. Nos élus auront beau accorder des dizaines d’entrevues aux médias américains, parler à tous les leaders syndicaux et d’affaires, rencontrer les ambassadeurs et consuls, l’homme orange ne reculera pas tant que nous ne lui aurons pas bien faire comprendre qu’il doit nous respecter comme de vrais partenaires, d’égal à égal.
La pire chose à faire, dans les circonstances actuelles, serait de plier l’échine et d’accéder à certaines de ses demandes, ce qui ne ferait que lui confirmer qu’il peut nous dicter sa volonté comme bon lui semble. Il serait naïf de croire que de faire ce qu’il réclame parviendra à calmer le jeu; il est clair qu’il reviendrait alors à la charge avec d’autres demandes, encore et encore.
Trump parle le langage des prédateurs. Le Canada n’aura donc d’autre choix que de lui répondre en montrant les dents.
Le président élu affirmait il y a quelques jours à peine que les États-Unis n’avaient pas besoin du Canada. Vraiment? Prouvons-lui qu’il a tort!
Selon des données de l’Agence américaine d’information sur l’énergie (EIA), plus de 50% de l’ensemble des produits pétroliers (brut, essence et autres produits raffinés, etc.) importés aux États-Unis provient du Canada. Dans le cas du pétrole brut seulement, ce chiffre monte à 60% des importations totales.
Coupez les valves des pipelines du jour au lendemain, et les Américains se retrouveront rapidement avec de longues files devant les stations-service, une explosion du prix du gallon à la pompe et une pénurie d’essence qui pourrait générer une crise énergétique majeure à travers le pays.
Les États du nord-est dépendent largement de l’hydroélectricité québécoise pour combler leurs besoins énergétiques? Mettons la switch à off et qu’ils essaient de chauffer leurs maisons sans électricité en plein mois de janvier!
Les familles américaines ont besoin de bois d’œuvre pour construire des maisons et se loger? Les entreprises manufacturières ont besoin de notre aluminium et de nos métaux pour les transformer en produits à valeur ajoutée? Fermons temporairement nos frontières à tous ces types de matières premières et de produits d’exportation essentiels au marché américain, question de voir combien de temps ils pourront vraiment s’en passer.
Et soudainement, on ne rit plus.
Dans cette histoire digne de David contre Goliath, il est encore possible, avec une bonne dose de courage et d’audace, de changer la donne en notre faveur.
Lorsque j’étais étudiant à HEC Montréal, notre professeur de stratégie de négociation ne cessait de nous répéter qu’il était essentiel de savoir bien identifier utiliser ses forces afin de les utiliser telles des leviers pour établir, aurant que possible, un semblant d’équilibre avec la partie adverse. La principale force du Canada, dans ce dossier, réside sans contredit dans ses ressources énergétiques et naturelles.
Or, jusqu’ici, force est de constater que la riposte timide du côté canadien n’a pas permis de décourager les trumpistes. Au contraire, même; Trump et son grossier acolyte Elon Musk n’ont cessé d’en rajouter au cours des derniers jours, comme si la mollesse de notre réponse était venue cristalliser dans leur esprit l’impression que le Canada est en position de grande faiblesse, implorant à genoux son allié historique de ne pas aller de l’avant avec son plan machiavélique.
À VOIR AUSSI | «Je suis le seul capable de se tenir debout»: Poilievre ne craint pas les menaces de Trump
Invoquée dans la dernière semaine par le ministre fédéral François-Philippe Champagne, la menace d’imposer en retour des tarifs similaires sur une multitude de produits américains – dont le jus d’orange de Floride – ne fera à l’évidence trembler personne à Washington. Avec seulement 40 millions d’habitants, le Canada est plutôt un petit marché sans trop d’importance pour les biens américains. Nous devons donc sans plus tarder revoir notre stratégie et revenir à la charge avec de meilleurs arguments de négociation et des menaces de poids qui, dans ce jeu de poker diplomatique, parviendront à bluffer l’adversaire.
Certes, couper potentiellement nos exportations de ressources naturelles et énergétiques vers les États-Unis du jour au lendemain aurait des impacts importants sur notre économie, du moins temporairement. Mais ça ne serait rien par rapport à ce qui pourrait survenir si nous laissons Trump aller de l’avant avec des tarifs de 25% sur les produits canadiens sans lui répliquer avec la même force. Évidemment, personne au pays n’a envie d’aller jusque-là, mais si nécessaire, dans des circonstances si extraordinaires, nous devons être prêts à employer des moyens tout aussi extraordinaires.
«It takes two to tango», disent les Américains. Il faudra ainsi, tôt ou tard, que le Canada bombe le torse à son tour pour envoyer un message clair à ce voisin de plus en plus dérangeant: s’il le faut, nous pouvons et nous allons contre-attaquer sans pitié.
Si les Américains continuent de sous-estimer notre capacité à infliger de lourds dommages à leur économie, ils pourraient bientôt être surpris. Ce pays n’est peut-être pas parfait, mais nous ne laisserons assurément personne nous marcher sur la tête ou nous traiter comme si nous étions inférieurs.
Gare à ceux qui oseront réveiller un ours en hibernation.