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Lettre ouverte d’un relationniste à Paul Arcand
C’est aujourd’hui que le roi de la radio québécoise laissera son micro après 34 ans...
Vendredi 14 juin 2024. C’est aujourd’hui que le roi de la radio québécoise laissera son micro après 34 ans à accompagner les Québécoises et les Québécois dans leur réveil, dont les 20 dernières au 98,5 FM.
Je ne le connais pas personnellement même si j’ai eu l’occasion de le croiser à quelques reprises en accompagnant des clients dans son studio. Cependant, comme de nombreux auditeurs, j’ai l’impression de dire « au revoir » à un ami qui me racontait l’actualité tous les matins et qui est parti « faire d’autres choses » comme il l’a souvent répété.
Pour le relationniste que je suis, c’est aussi un grand deuil, car Paul Arcand est aussi une légende pour ceux, comme moi, qui gagnent leur vie à conseiller des gens afin de réussir leurs sorties médiatiques efficaces, de défendre leur réputation ou de faire connaître leurs réalisations.
Entre crainte et admiration
Je ne peux pas compter le nombre de fois qu’en parlant d’entrevues médiatiques à des dirigeants d’organismes, à des aspirants politiciens ou à des entrepreneurs, ceux-ci me disaient «penses-tu que je vais faire Paul Arcand ?» ou «peux-tu m’obtenir une entrevue avec Paul Arcand» ou même « Je peux donner des entrevues, mais pas Paul Arcand ! ». Dans tous les cas, entre admiration, excitation ou peur, il est pour tous, LA référence en termes d’entrevue difficile ou d’entrevue importante.
Non seulement il est l’homme de radio francophone le plus écouté au Canada, mais il est devenu, avec le temps, une des personnes les plus influentes dans le monde des médias en général. Une entrevue avec Paul Arcand peut allumer ou éteindre une crise, peut changer des décisions politiques, peut faire exploser la notoriété d’une personne et peut la mettre dans l’embarras pour un bon moment.
Un allié des affaires publiques
Réussir son entrevue avec Paul Arcand est essentiel pour une organisation ou pour un politicien qui veut préserver sa crédibilité. C’est aussi pourquoi, même les porte-paroles plus expérimentés, voulaient être préparés avant de passer devant le roi des ondes. Probablement un peu malgré lui, Paul Arcand aura donc nourri l’univers des relationnistes pendant toutes ces années.
Nous avons tous des clients qui nous ont octroyé des mandats dans le simple but d’être prêts pour leur « moment » avec lui et qui nous ont demandé de décortiquer sa façon de faire des entrevues.
Pourtant, avouons-le, le secret d’une entrevue réussie avec Paul Arcand est assez simple. Réponds à ses questions, sois authentique, passe tes messages, mais n’essaie pas de contrôler l’entrevue et montre du respect envers l’auditeur.
Ce qu’il nous a appris
Bien sûr, après son départ, on finira par le remplacer dans notre quotidien. Cependant, il y a des leçons qu’il nous a apprises ou rappelées et qui resteront pertinentes. Tout d’abord, la transparence.
On ne pouvait pas essayer de cacher des choses à Paul Arcand ou de lui dire des demi-vérités. Mieux valait lui dire « je ne sais pas » ou « je ne peux pas vous répondre parce que… » que de tenter de « bullshiter ».
Ensuite, répondre à la question. Tous les relationnistes vous diront qu’une entrevue est d’abord une occasion de passer des messages au public. Cependant, devant Paul Arcand, ce message devait être précédé d’une réponse claire à sa question sinon, l’entrevue changerait de tournure.
Finalement, le respect des auditeurs. Une des grandes forces de Paul Arcand, selon moi, est de déceler ce qui intéresse l’auditeur et de poser la question que ce dernier se pose dans son salon ou son auto. Cette capacité à comprendre le public est impossible sans un profond respect pour ce dernier. Respectez l’intelligence de l’auditeur et il vous accordera de la crédibilité.
Monsieur Arcand, je n’ai jamais eu la chance de vous dire autre chose que « bonjour », mais aujourd’hui, je veux vous dire merci. Merci de nous avoir aidés à comprendre l’actualité. Merci de nous avoir obligés à être de meilleurs relationnistes et surtout merci d’avoir posé les bonnes questions pendant si longtemps.
Ma radio et mon métier s’ennuient déjà de vous.