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Société
Chronique |

Les écrans: un problème de santé publique

Le chef du PQ Paul Saint-Pierre-Plamondon parle de bonne «hygiène numérique». Il n’est pas le seul, mais il serait grand temps qu’on mette ça au programme dans nos écoles.

Les écrans: un problème de santé publique
Les écrans: un problème de santé publique

C’est le début des travaux parlementaires et le chef du Parti québécois, Paul Saint-Pierre Plamondon, veut s’attaquer au temps d’écran de nos plus jeunes concitoyens. 

Animé, semble-t-il, par son expérience personnelle de papa, mais aussi par ce dont il est témoin autour de lui, il compte bien faire de ce dossier son cheval de bataille.  

Enfin !

J’ai souvent répété que je considérais notre dépendance aux écrans comme un problème de santé publique. Et la science le démontre de plus en plus: les effets néfastes d’un trop grand nombre d’heures passées devant ces petits engins sont nombreux.

Je vois donc la nouvelle croisade du chef du PQ d’un très bon œil. Pourquoi? Parce que si on réussit à convaincre les instances au pouvoir que la problématique des écrans relève de la santé publique, cela voudra dire que le problème dépasse largement le contrôle que les parents peuvent exercer sur leurs enfants à ce chapitre.

Et lorsqu’un problème est plus grand que nous, il est habituellement de bon aloi que l’État s’en mêle. Pas pour interdire. Je ne crois pas à ça. Mais pour baliser, donner des directives claires et nous sensibiliser aux «dangers» liés à l’abus de temps d’écran.

Paul Saint-Pierre-Plamondon parle de bonne «hygiène numérique». Il n’est pas le seul, mais il serait grand temps qu’on mette ça au programme dans nos écoles. Je sais que cette thématique est abordée dans le nouveau cours Culture et citoyenneté québécoise, mais j’ai l’impression que les sujets couverts par celui-ci sont tellement nombreux, qu’on n’aura pas le temps d’aborder la question de la vie numérique en profondeur.

On s’interroge de plus en plus, et c’est bien

Je lisais en fin de semaine qu’il y a des profs au privé qui s’interrogent sur l’abondance d’écrans dans leurs écoles. Quand on sait que ce type d’établissement mise énormément sur la technologie pour faire la promotion de leurs services, ça sonne une cloche. On parle des «dommages» collatéraux de cette abondance technologiques chez les étudiants et on se demande si ce ne serait pas mieux de revenir à une espèce de «juste milieu».

J’ai envie de dire que même dans le système public, où les étudiants ont accès à leurs notes dès que les enseignants-es les déposent sur le portail, l’omniprésence des moyens technologiques est génératrice d’anxiété chez plusieurs. Questionné à l’émission de Paul Arcand sur le droit à la déconnexion des élèves, Paul Saint-Pierre Plamondon s’est montré favorable. Il a parlé de ses inquiétudes pour la santé mentale et physique des élèves.

J’abonde dans le même sens et j’irais même plus loin. Je ne m’en suis jamais caché, je ne crois pas aux « interdits ». Habituellement, je trouve qu’interdire quelque chose peut générer exactement l’effet contraire que ce que l’on désirait au départ. Surtout avec des ados.

D’ailleurs, on me chuchote à l’oreille que l’interdiction du cellulaire dans les classes (une initiative poussée par le PQ) n’est pas un grand succès. Les profs ne sont pas tentés de gérer les téléphones des élèves plus qu’ils ne le font déjà. Leur cour est pleine, et ça devient vraiment compliqué avec toute la gestion de classe qu’ils ont déjà à faire.

Parmi les suggestions que je trouve plus intéressantes que de bannir le cellulaire dans les salles de classe et qui seront visiblement poussées par le PQ prochainement : étudier la possibilité d’interdire carrément les cellulaires et tablettes durant les pauses. Je le sais, je viens de dire que je n’aimais pas interdire.

Mon opinion là-dessus a cependant changé depuis qu’on sait tout ce que l’on sait sur l’utilisation abusive des écrans. On est rendus là, à agir de façon peut-être un peu plus drastique. Certaines écoles l’ont fait dans les airs communs et, malgré la grogne au départ, elles ne reviendraient pas en arrière. Les élèves se parlent à nouveau, ont davantage d’interactions et le centre social n’est plus une mer de têtes baissées et de petits dos voûtés.

C’est tellement devenu l’enfer, la gestion des téléphones et des médias sociaux qu’une école américaine a décidé de carrément retirer les miroirs des salles de bain parce que les jeunes y tournaient trop de vidéos destinés aux médias sociaux. Ça veut tout dire. A-t-on besoin de se rendre là avant d’envoyer un message de modérations aux élèves? Je ne pense pas.

Une autre excellente piste amenée par le PQ: étudier la possibilité d’instaurer une majorité numérique et obliger les réseaux sociaux à vérifier l’âge de l’utilisateur. Belle idée. Ce serait formidable, mais est-ce que ça va passer le test de la réalité ? Je ne pense pas.

Bon, j’ai lancé beaucoup de fleurs à la nouvelle initiative de Paul Saint-Pierre-Plamondon. Il demeure tout de même quelques bémols. Quand il parle de sortir les écrans des salles de classe et des CPE, je trouve ça un peu extrême.

On sait que les jeunes s’informent beaucoup sur des plateformes comme Tik Tok. C’est devenu pour eux un moteur de recherche, y compris sur des sujets sérieux. Si on bannit tous les écrans des classes, comment on va leur apprendre, l’hygiène numérique? Il est essentiel de les éduquer à ce chapitre et de leur apprendre à être en mesure de débusquer les fausses nouvelles et les infos qui ne viennent pas d’une source fiable.

On ne peut pas nier, non plus, que plusieurs profs utilisent la technologie de façon hyper créative et l’intègrent à leur enseignement à l’aide de projets qui intéressent les jeunes puisque ça passe par un médium qu’ils apprécient. À l’heure où le décrochage scolaire est un enjeu majeur, on ne peut pas tasser ça du revers de la main.  

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Paul Saint-Pierre-Plamondon donnait l’exemple où une éducatrice en garderie ferait écouter 30 minutes de télé par jour aux enfants. Je sais que ça doit exister, mais ça ne doit pas être la norme et, surtout, ça ne doit pas être aussi dommageable pour un bambin d’écouter 30 minutes de Dora l’exploratrice que de voir son parent les yeux rivés sur son téléphone à longueur de journée.

Pour y arriver, à cette saine hygiène numérique, nous aussi, on doit se poser des questions sur notre utilisation. Les enfants apprennent par mimétisme. C’est vrai pour la lecture, c’est vrai pour le sport et c’est aussi vrai pour les écrans.

C’est d’une désintox collective dont on a besoin. Et pourquoi pas d’une désintox transpartisane, tant qu’à y être?