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Politique
Chronique |

Le Québec doit rester le bastion du droit à l’avortement

«C’est tabou. C’est secret. Et c’est délicat. On parle encore trop peu d’avortements.»

C’est tabou. C’est secret. Et c’est délicat. On parle encore trop peu d’avortements. Pourtant, une Québécoise sur trois a subi un avortement. Le plan d’action déposé par la ministre Martine Biron pour protéger le droit des femmes délimite une frontière encore plus franche entre ce qui se passe ici et aux États-Unis.

C’est le renversement de l’arrêt Roe v. Wade en 2022 qui a fait réagir la ministre de la Condition féminine Martine Biron. Un rappel : cet arrêt, qui garantissait depuis 1973 le droit constitutionnel à l’avortement aux États-Unis, a été annulé par la Cour suprême.

Depuis, chaque état américain décide comme bon lui semble du sort des femmes enceintes. Et si vous pensez que c’est une bonne nouvelle, détrompez-vous. Les législateurs, surtout ceux qui sont plus à droite et qui appartiennent au parti républicain, mettent en place toutes sortes de manœuvres pour empêcher le libre choix des femmes.

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Un exemple éloquent : en Floride, lors des élections du 5 novembre, la population a été invitée à se prononcer sur les nouvelles règles entourant l’avortement. Dans cet état du Sud, les femmes ne peuvent avorter au-delà de six semaines. À six semaines, on s’entend, les femmes ne savent même pas qu’elles sont enceintes!

La population a voté à 57 % pour que cela soit révoqué et que le droit à l’avortement soit étendu… mais les législateurs avaient décidé que le seuil d’approbation était à 60 %.

Alors que font les femmes de Floride, comme celles des autres états où l’avortement est restreint ou interdit, pour recevoir des soins? Elles font du mieux qu’elles peuvent : elles changent d’état. En fait, rectifions, les femmes qui ont les ressources et les moyens changent d’état.

Et il ne faut pas oublier que les femmes qui veulent se faire avorter vont se faire avorter, peu importe les conditions, services ou pas. Elles en paient de leur santé… et de leur vie.

Groupes anti-choix et désinformation

Ces constats ont nourri la réflexion de Martine Biron et son équipe. Dès 2023, après avoir abandonné son projet de loi pour protéger le droit à l’avortement, elle a choisi la voie d’un plan d’action. Le but? Rendre plus accessible l’avortement — et du coup, solidifier le mur érigé entre nous et nos voisins américains, plongés dans une spirale de valeurs traditionnelles, religieuses, très à droite, sorties des années 1950.

En point de presse, la ministre a rappelé que les «groupes anti-choix sont actifs au Québec» et qu’ils cherchent à faire fléchir l’opinion publique au Québec en s’appuyant sur ce qui se passe aux États-Unis.

Chez nous, 90 % des gens sont en faveur que les femmes choisissent de poursuivre ou d’interrompre leur grossesse. Mais 41 % se disent inquiets de ce qui se passe chez nos voisins.

La pilule abortive, méconnue

En ce sens, le plan d’action qui va s’échelonner jusqu’en 2027, au coût de 7,5 M$, est une bonne nouvelle. Il va lutter contre la désinformation et encourager la recherche, il va créer de nouveaux points de service dans les régions éloignées et il va rendre plus accessible la pilule abortive, méconnue et sous-utilisée.

Petit point à ce sujet : la pilule abortive, prescrite par les médecins, les super infirmières et les sages-femmes (et différente de la pilule du lendemain), est utilisée au Québec dans 17 % des avortements soit quatre fois moins qu’en France (72 %) et presque deux fois moins qu’en Ontario (32 %). Oui, il y a du travail à faire.

En plus de certains hôpitaux, des cliniques privées et publiques font des avortements dans toutes les régions du Québec. Mais certaines sont moins bien desservies que d’autres. Par exemple, dans la ville de Québec, les délais d’attente peuvent atteindre cinq semaines. C’est énorme quand on considère les impacts psychologiques et physiques liés à une interruption de grossesse avancée.

Des centres de santé pour femmes

Il n’y a que trois centres de santé pour femmes au Québec actuellement soit à Montréal, en Outaouais et en Mauricie. Pourquoi cela ne serait-il pas étendu à toutes les régions?

Je rêve de points de services de santé pour les femmes, sorte de guichet unique où elles seraient écoutées, accueillies, traitées et soignées. Imaginez un endroit pour recevoir des soins liés à la grossesse (qu’on veut poursuivre ou interrompre), aux menstruations, aux cycles hormonaux, aux symptômes liés à la préménopause ou la ménopause… Un endroit avec des spécialistes et des disponibilités.

Un fantasme!

Pour le moment, en matière d’avortement, je crois que c’est un grand pas en avant. Le Québec est unique. Et c’est un allié des femmes. Ça doit le rester.

Merci à Martine Biron d’avoir compris qu’il faut être prévoyant et vigilant.

Parce que non, rien n’est acquis.