Début du contenu principal.
Lisez la chronique d'Alex Perron.
Je vous le dis d’entrée de jeu, ce sera le genre de texte qui contient plus de questions que de réponses. Que voulez-vous, parfois, c’est comme ça. Si jamais vous avez les réponses, envoyez-moi ça. Je ferai une macédoine de réponses la semaine prochaine.
J’écris ce texte le 21 août et si vous cherchez à vous acheter une chaise longue pour vous faire rôtir au soleil pour le reste de l’été, c’est trop tard. Bien trop tard. Cependant, si vous avez envie de vous procurer un squelette en plastique blanc avec les yeux qui clignotent tout en poussant un rire en canne aucunement épeurant, vous êtes pile dans le bon temps. Oui, parce que nous sommes déjà fin septembre. Du moins pour les commerces de détail.
Je vous fais leur calendrier de l’année de façon bien simple : juin est en avril, septembre en juillet, octobre en août, décembre en novembre, février en janvier, mars en février et on recommence avec juin en avril. Tout le monde a compris?
Je fais souvent des blagues, comme tout le monde, sur le décalage des produits offerts dans les magasins qui sont toujours en avance. On peut acheter un habit de neige au plus jeune des enfants en juillet qui, bien sûr, ne lui fera plus déjà en décembre, lorsque viendra le temps de le porter.
Je comprends que tout ça, c’est du marketing et de la vente. Et je comprends aussi que ça doit fonctionner puisqu’ils le font depuis plusieurs années.
Je peux aussi m’imaginer qu’on veut prendre de l’avance sur nos achats, profiter de l’abondance de choix, faire de bonnes affaires ou encore avoir ce sentiment d’être au sommet de la chaîne de l’efficacité. Mais pourquoi vouloir toujours aller plus vite? Pourquoi prendre de l’avance sur de l’avance?
On magasine pour l’Halloween à la fin de l’été afin d’avoir le temps de commencer le sapin dans un restant de citrouille. La couronne des fêtes prend la place du gros cœur lumineux de la Saint-Valentin dans le rangement en plastique du sous-sol, qui lui-même, sacre son camp le 15 février pour laisser toute la place à Jeannot Lapin. On n’a même pas le temps de passer à travers la dernière fondue faite à base de poule en chocolat de la petite Alice qu’il faut aller magasiner nos nouilles de styromousse pour la piscine.
C’est paradoxal, avouez-le! On court toujours plus vite devant, sans jamais reprendre son souffle, mais on ne veut pas vieillir trop vite et encore moins que ça se termine trop tôt. Si ça continue, on va arriver à la fin du calendrier ben avant la date prévue. Les Mayas vont nous trouver ben gnochons.
J’imagine qu’on se dit qu’on sauve du temps, mais on sauve de temps pour ne même pas en profiter. À quel moment sommes-nous devenus des bazous de la F1? C’est monsieur Wal-Mart qui nous a mis ça dans la tête, pis nous autres, on suit le courant comme une gang en rafting qui gère mal sa descente dans les rapides? Je t’entends me crier par la tête: T’AS JUSTE À FAIRE COMME TU VEUX!
Je voudrais bien… Mais si je veux mon squelette blanc cheap, faut que je l’achète, là. Maintenant. Le 15 octobre, je vais me retrouver avec un sapin pis ça, ça fait moins peur aux enfants.
Je fais mon coach de vie à deux cennes. Si on enlève le principe des magasins qui sont toujours en avance, est-ce qu’on court toujours plus vite vers l’avant parce qu’on a de la difficulté à s’arrêter et juste se déposer ? Quand on roule à fond la caisse, on n’a pas le temps de se questionner sur où on est et qui on est?
Je comprends bien qu’on ne fera pas un essai philosophique avec la technique de vente des magasins, mais peut-être qu’on devrait y réfléchir un p’tit peu. Je sais aussi que les magasins ne gèrent pas nos vies, mais un peu quand même finalement.
On n’y pense pas souvent, mais on a aussi un pouvoir de changement sur la façon dont les choses se passent dans notre société. On n’est pas toujours obligé de regarder le train passer en disant : qu’est-cé que tu veux. Y passe à cette heure-là.
Bon, je te le disais, je n’ai pas tant de réponses. Je suis vraiment désolé. Je vais continuer à réfléchir à tout ça en allant faire la file au Starbucks derrière ceux qui veulent déjà leur latte à la citrouille. Parce que oui, il est déjà offert.
Mais moi, Je ne bois pas ça. Peu importe le temps de l’année, je trouve que ça goûte mauvais.
Pour recevoir toutes les chroniques d'Alex Perron, abonnez-vous à notre nouvelle infolettre, Les débatteurs du samedi.