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Comme pour le reste, les réseaux sociaux, selon moi, c’est d’abord et avant tout dans la cour des parents.
Il y a deux semaines à peine, l’aile jeunesse de la CAQ lançait une proposition pour que les réseaux sociaux soient interdits aux jeunes de moins de 16 ans. Du côté de la CAQ, durant leur grosse réunion annuelle le week-end dernier, on a plutôt penché pour se taper une commission parlementaire sur le sujet.
Pour ceux qui ne savent pas ce que c’est une commission parlementaire, dans ce cas-ci, en gros, on sélectionne des députés pour jaser du sujet ben ben longtemps en attendant que tout le monde oublie ledit sujet ou que ça tombe entre deux projets de loi qui brassent pas mal plus. Ça évite aussi au gouvernement de se positionner clairement sur le sujet rapidement.
Je sais, je suis un peu cynique, mais pas tant que ça. Il y a plusieurs années, on a sorti le gouvernement de la chambre à coucher et je crois qu’il serait bien qu’on ne l’invite pas dans nos paramètres de réseaux sociaux.
Je comprends que lorsqu’on est jeune, on doit être encadré, dirigé, éduqué, écouté et valorisé. Mais comme pour le reste, les réseaux sociaux, selon moi, c’est d’abord et avant tout dans la cour des parents. Ce sont eux qui sont responsables de l’éducation et d’encadrer leurs rejetons dans le cyberespace. De les guider dans leurs choix et de mettre les limites.
Non, ce n’est pas une mince tâche. Je ne doute pas que c’est un combat de tous les jours et que ça peut donner une solide migraine qu’on calme à grands coups d’aspirine extra-forte. Que c’est de la négociation de haute voltige qui donnerait même des sueurs froides à Claude (10-4) Poirier.
L’aile jeunesse proposait qu’un jeune de moins de 16 ans qui veut avoir accès aux réseaux sociaux doit détenir une autorisation d’un parent. C’est totalement inutile. Dans le sens que c’est déjà ce que font les parents. Si leur enfant navigue sur la toile, c’est qu’ils sont d’accord. On s’enfarge dans les fleurs du tapis de souris avec ce genre d’idée.
On envoie un message plutôt contradictoire quand on parle d’interdire le tout à l’école. En classe, pour les besoins de leurs cours, ils naviguent sur leur ordinateur, leur tablette et vont chercher des informations sur le web et là, on leur dit: tu dois fermer tout ça quand tu traînes dans le salon étudiant ou en mangeant ton sandwich au jambon dans la cafétéria. Sous prétexte, que tout à coup, c’est nocif. On leur casse les oreilles en leur disant qu’une grande part de leur avenir est dans l’espace virtuel mondial, mais en même temps, on leur fait peur: ne touche pas à ça! C’est bobo!
Je comprends la nuance que lorsqu’ils sont laissés à eux-mêmes, il y a plus de chances qu’ils voguent sur les courbes du site web de Natasha, cette jeune Suédoise, que sur l’encyclopédie virtuelle des plus grandes découvertes du monde.
De plus, en arrivant chez eux, ils ont aussi accès à tout sur l’ordinateur de la famille ou leur propre cellulaire. Interdire les réseaux sociaux entre la classe et la maison, c’est un coup d’épée dans l’eau. C’est un peu comme si tu me mets une poutine devant moi, que tu me laisses en prendre deux bouchées, que tu me la retires en me disant que ce n’est pas bon pour ma santé, mais que tu me la redonnes le lendemain. J’en prends encore deux bouchées et tu me la retires de nouveau en me répétant que ce n’est pas bon pour moi et ainsi de suite. Mon exemple est un peu boiteux, mais pas tant que ça.
Et on tient pour acquis que ce qu’ils font sur leur cellulaire ou sur leur tablette dans leurs temps libres est toujours mal. Je suis une vieille personne, mais pas naïve. Je sais bien qu’ils perdent un temps fou à regarder des défis gnochons qui consistent à vomir par les narines sur Tik Tok ou écouter religieusement les conseils d’une influenceuse qui se rase les jambes, avec selon elle, la crème épilatoire la plus nice au monde.
Mais si entre tout ça, il découvrait des affaires Des endroits dans le monde qu’ils voudraient visiter. Qu’ils voyaient les photos d’un photographe sur Instagram qui leur donnent envie d’en faire aussi. Que le témoignage d’une personne dans une story les faisaient réfléchir sur leur propre comportement ou qu’ils se sentent moins seuls dans une situation qui les préoccupe.
On «focusse» beaucoup sur le clip d’intimidation tourné par un jeune pas très gentil et il faut le faire afin de corriger la situation pour que ça ne se reproduise plus. C’est très important. Mais peut-être que ça vient masquer le fait que la terre est au bout de leur doigt et que ça peut être le fun et très formateur. Formateur sur le plan intellectuel et du cœur. Un coup de pouce pour forger sa personnalité.
Interdire, ce n’est pas la solution, encadrer, oui. Je sais, ça demande pas mal plus de job, mais je crois que le résultat est meilleur. Et rappelons-nous notre adolescence.
Moi quand ma mère m’interdisait d’aller me promener sur la rue St-Jean le soir dans le Vieux-Québec, j’avais encore plus envie d’y aller.
Et je trouvais le moyen…
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