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Ce fut une tuile après l’autre sur la tête du jeune prodige de gauche.
C’était jusqu’ici un mandat bien ordinaire pour Gabriel Nadeau-Dubois. Des résultats décevants lors du scrutin de 2022, des sondages tout aussi décevants depuis, les attaques de Catherine Dorion, ce fut une tuile après l’autre sur la tête du jeune prodige de gauche.
La crise de leadership latente qui guettait Gabriel Nadeau-Dubois s’est enflammée lundi dernier avec la démission surprise de sa co-porte-parole, Émilise Lessard-Therrien.
En lançant un débat public sur l’avenir de son parti, il a pris le risque de se peinturer dans un coin. S’il échoue à changer les choses, les carottes sont cuites. Ce faisant, il est passé d’une position défensive à une position offensive et il a complètement changé l’histoire qui était racontée sur lui et sur QS.
Dans un monde où tout va vite, dans lequel la machine médiatique et les médias sociaux nous poussent à réagir rapidement, la première réaction de Gabriel Nadeau-Dubois est louable. Il n’était peut-être pas nécessaire de manquer la période de questions pour ça, mais il a bien fait de prendre un moment de réflexion avant de réagir à l’annonce de sa collègue.
Comme dirait mon collègue Rodolphe Husny, rien de tel que de saisir l’occasion d’une bonne crise pour faire un putsch !
Sur le fond, le modèle original de QS a atteint les limites de sa croissance dans l’actuel système électoral. Parmi les originalités solidaires remises en question, la notion des deux co-porte-paroles. C’est déjà compliqué dans l’opposition… imaginez au gouvernement !
Le modèle du Parti Québécois est à ce titre un excellent compromis. Par nécessité, le PQ a désigné des porte-paroles extra-parlementaires. Méganne Perry-Melançon joue un rôle important dans la vie du parti, mais il est clair que c’est Paul St-Pierre Plamondon qui est le chef et qui a le dernier mot sur tout. Il est chef de l’aile parlementaire et chef du parti.
Chez QS, c’est une autre histoire. Les employés qui travaillent à la permanence du parti ne relèvent d’aucune façon des porte-paroles. Ils sont également syndiqués, ce qui constitue un défi supplémentaire que les autres partis n’ont pas à gérer.
Les changements proposés par le camp réformateur de QS ne se limitent pas à la question des porte-paroles. Une refonte du programme et des statuts du parti est présentement sur la table et fera l’objet de débats qui s’annoncent des plus animés. Mais Gabriel Nadeau-Dubois vient de prendre de la distance face aux mauvais résultats.
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Nadeau-Dubois a réussi à passer le message suivant : vous voulez que Québec solidaire avance ? Vous voulez que Québec solidaire gagne ? Alors, donnez-moi un véhicule efficace. Un «parti de gouvernement».
Et pour revenir à la question du rôle des porte-paroles, comment voulez-vous avoir des figures de proue imputables si elles n’ont pas les « deux (quatre ?) mains sur le volant » ? Les porte-paroles de QS font face aux médias, font face au gouvernement et font face aux citoyens au quotidien, et ce sans avoir les mêmes pouvoirs que les autres chefs.
Après la sortie de GND de cette semaine, il est devenu bien difficile de coller les échecs de QS sur sa personne.
La question de la semaine passée était : « Est-ce que Gabriel Nadeau-Dubois est un bon leader ? A-t-il un problème avec les femmes ? ».
Maintenant, elle est devenue « Comment doit-on réformer le parti ? ».
Énorme gain.
Par le fait même, Émilise Lessard-Therrien est tombée dans l’oubli. Quiconque l’a critiqué ou le critiquera à partir de maintenant passera pour un partisan du statu quo, qui préfère avoir raison plutôt que de gagner.
Québec solidaire est en quelque sorte en crise d’adolescence… GND apparaît comme l’adulte. S’il ne parvient pas à transformer QS en parti de gouvernement, il pourra dire « j’ai essayé ». Et QS sera probablement condamné à demeurer un groupe de pression plutôt qu’un parti qui peut aspirer à gouverner, ce qui donnera raison à Nadeau-Dubois. D’une façon ou d’une autre, il en ressortira gagnant.
Il y aura certes des lettres ouvertes, des entrevues, des publications sur les médias sociaux, des débats, des déchirements et des départs, mais Gabriel Nadeau-Dubois a choisi son rôle et il a défini ses adversaires. Il a repris le contrôle…
… jusqu’au prochain rebondissement !
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