Début du contenu principal.
Lorsque monsieur Legault a annoncé la semaine dernière qu'il allait rouvrir les écoles et lever le couvre-feu, il alléguait que des signes importants pointaient vers un plateau dans les contaminations. Il avait aussi précédemment évoqué ce que plusieurs spécialistes affirment depuis fin décembre : Omicron est moins dangereux que les variants qui l’ont précédé. Les centaines de milliers d’infections prédits par les modélisations n’entraîneraient pas autant d’hospitalisations et de décès.
Peut-être qu’à long terme, ses prévisions s’avéreront exactes. Mais c’est loin d’être le cas pour l’instant. Nous assistons au contraire à un pic d’hospitalisations et une hausse des décès qui laisse pantois ; le même niveau que les États-Unis qui pourtant, ont un taux de vaccination bien inférieur au nôtre et que nous avons pointés comme étant les mauvais élèves de la santé publique avec leurs refus de contraindre les foules lors des événements sportifs et culturels et un respect des règles de distanciation beaucoup plus relâché que les nôtres, notamment dans les bars et restaurants.
Est-il possible qu’à la faveur du remplacement du directeur de la santé publique, le gouvernement ait décidé de changer de stratégie ? Après tout, nos voisins américains ont peut-être trouvé une recette politique moins douloureuse que la sienne.
Au lieu de contraindre des millions d’électeurs à la vaccination, laissons mourir un peu plus de monde. Et posons-nous la question : qu’est-ce qui est plus coûteux politiquement ? Freiner l’économie et empêcher les gens de vivre pleinement ou se résigner à avaliser quelques milliers de décès supplémentaires ?
Après tout, nous connaissons à peu près le profil des gens qui meurent lors de cette cinquième vague ; ce sont souvent des personnes en fin de vie — affectées par de nombreux facteurs de comorbidité — des personnes qui décéderaient sans doute d’ici quelques mois voire une année ou deux, même sans avoir contracté la COVID. Ou alors des personnes non-vaccinées qui représentent environ 50 % des hospitalisations alors qu’ils représentent moins de 10 % de la population générale.
En faisant contre mauvaise fortune bon cœur face à ces décès, plusieurs états américains donnent l’impression de redonner un semblant de vie normale à leurs citoyens. Et à bien y penser, en toute honnêteté, ce n’est pas peut-être pas qu’un calcul politique.
Il s’est trouvé de nombreux citoyens pour considérer une fois de plus que l’herbe était plus verte de l’autre côté de la frontière. Il n’est pas impossible que ce que monsieur Legault a fait, ce soit simplement d’interpréter l’opinion publique.
Cette nouvelle stratégie consisterait donc à tout miser sur la vaccination et laisser partir ceux qui ne peuvent être protégés — soit parce qu’ils refusent de se faire vacciner, soit parce qu’ils sont trop malades pour résister à la maladie, même vaccinés.
Si cette stratégie est fondée, il faudrait la voir comme une sorte d’admission. Le virus, et surtout sa capacité de muter, ne peut être ralenti par des mesures de santé publique. Ou alors, il faut que ces mesures soient tellement exigeantes que le jeu n’en vaut pas la chandelle.
Il aurait été impossible de concevoir une telle stratégie lors des premières vagues ; les vaccins n'existaient pas encore ; les variants attaquaient les poumons mêmes des personnes à risque élevés de développer la forme grave de la maladie.
En pleine santé, la COVID longue laissait des séquelles très graves. Mais avec Omicron, la moyenne de la population est moins à risque.
La stratégie du gouvernement a donc muté avec le virus.
Mais ça, le gouvernement se gardera bien de le dire.