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Comme souvent, quand une histoire devient publique, d’autres victimes se manifestent. Et c’est ce qui s’est produit dans le cas de l’école secondaire Veilleux.
Je mettais récemment en lumière une situation malheureuse impliquant une étudiante de l’école secondaire Veilleux et des membres du personnel quant au code vestimentaire de l’établissement.
Des paroles inappropriées sur le corps et l’habillement de Camille (nom fictif), 15 ans, ont été prononcées par une personne-cadre. Selon le directeur général du centre de service Beauce-Etchemin, Fabien Giguère, celle-ci « a [d’ailleurs] admis une grande partie de ses propos ». Elle fait depuis l’objet d’une suspension pour une durée indéterminée, le temps qu’une enquête soit menée.
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Je reviens à Camille. J’ai voulu prendre de ses nouvelles au lendemain de la publication de ma chronique. Est-ce qu’elle allait bien? Est-ce qu’elle était retournée à l’école depuis les événements? Sa mère a tout d’abord tenu à me préciser que ce qu’avait vécu la jeune fille, à la mi-avril, l’avait plongée dans une grande anxiété. Tellement, qu’elle n’est pas retournée sur les bancs d’école avant ce lundi 1er mai.
Camille me confie quand même qu’elle ne regrette rien, au contraire, puisqu’un grand mouvement de solidarité a vu le jour depuis qu’elle a raconté son histoire. Un groupe de discussion a été créé sur les médias sociaux. Un groupe dans lequel des dizaines de jeunes filles ont voulu agir pour que ce type de comportements et propos ne soient plus tolérés dans leur école.
Ainsi, le jour où Camille est revenue en classe, elles étaient des dizaines à s’être habillées comme elle, en pantalon gris et t-shirt noir, pour la soutenir dans sa démarche. « Certaines filles ne portaient pas de brassière, d’autres m’ont fait des câlins et mon remercié d’avoir dénoncé. » Un baume sur les cœurs de Camille et de sa famille.
Camile est reconnaissante de tout le soutien qu’elle a reçu de ses camarades. « Ça m’a fait sentir moins seule. J’ai vraiment senti que, pour une fois, de la part des élèves, j’étais comprise et soutenue. Et je crois que c’est de cette façon qu’on va arriver à se faire comprendre, en étant soudées et là les unes pour les autres. »
La mère de Camille a été incluse dans le groupe virtuel. « C’était tellement beau ce qui se véhiculait là. Les jeunes disaient qu’ils allaient se montrer plus intelligents, prôner la dignité féminine, le respect, faire ça (la « manifestation ») dans le calme, de façon à être écoutés et respectés. Ils ont bien fait ça. Il n’y a eu pas de grabuge ni d’insulte. Les enseignants et le personnel-cadre auraient avantage à les écouter un peu plus. »
Cette solidarité se serait même étendue à d’autres établissements scolaires de la région, dont la Polyvalente Saint-François, où des élèves et des professeures auraient emboîté le pas, lundi dernier.
Au téléphone, M. Giguère ne peut pas faire autrement que de saluer cette initiative. « C’est un mouvement qui vient nous dire que les jeunes ont des choses à nous dire sur le code vestimentaire. Et il faut écouter ce qu’ils ont à dire. »
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Comme souvent, quand une histoire devient publique, d’autres victimes se manifestent. Et c’est ce qui s’est produit dans le cas de l’école secondaire Veilleux.
Je souligne au passage qu’à ce jour, les gens de la direction ont refusé toutes mes demandes d’entrevues, m’orientant vers le Centre de services. Une réunion d’urgence aurait même eu lieu, le lendemain de la publication de ma chronique. Une source indique que des membres de la direction auraient demandé aux professeurs et au personnel de ne pas adresser la parole aux médias et de ne pas discuter du cas de Camille entre eux. Cette source me parle d’un climat de terreur et d’omerta à l’intérieur des murs de l’établissement.
J’ai donc reçu d’autres témoignages, dont plusieurs de parents, qui se sont montrés inquiets du comportement qu’aurait eu la personne-cadre, mais aussi quelques professeurs, par rapport au code vestimentaire et aux corps des étudiantes par le passé. Je choisis cependant de donner la parole aux jeunes filles, puisque c’est d’elles qu’il est question, après tout.
Alice (nom fictif) m’a raconté qu’elle avait aussi eu droit à des propos dégradants et humiliants de la part du personnel de l’école secondaire Veilleux. « Ce genre de remarques, c’est normal pour moi. Pas juste pour moi, en fait, pour une grande quantité de filles à l’école. C’est fou le nombre de commentaires inappropriés et dégradants que certains membres du personnel, surtout la [personne-cadre], ont pu nous dire. »
Frédérique (nom fictif) me raconte que sa plus jeune sœur aurait été victime d’intimidation à l’école secondaire Veilleux. Même qu’une fois, elle a dû aller la chercher à l’école tellement elle était paniquée. Leur mère était dans l’incapacité, à cause du travail, de se rendre à l’école. « J’ai demandé de parler à la [personne-cadre], car cela faisait déjà quelque temps que ma sœur vivait ces intimidations. Elle avait beaucoup d’absentéisme pour cette raison. En discutant avec la [personne-cadre], je me suis fait dire par celle-ci qu’elle était fière de dire qu’à l’école secondaire Veilleux, il n’y avait pas d’intimidation et que si ma sœur était si mal à l’aise de rester à cette polyvalente, qu’elle pouvait « s’arranger » pour la changer d’école. J’ai compris qu’on me disait que c’était ma sœur le problème, et qu’elle devait s’en aller. Ma sœur n’a reçu aucun support pour face à l’intimidation dont elle faisait l’objet. » Frédérique a tenu à préciser qu’elle aussi, elle avait vécu de l’intimidation lors de son passage à l’école secondaire Veilleux.
Gaïa (nom fictif) me raconte quant à elle, qu’une fois, la [personne-cadre] l’a carrément empêchée de se rendre à un cours. La raison? « J’allais juste chercher mon Chromebook dans mon casier et si jamais je levais mes bras, elle pouvait voir la couleur de ma brassière. » Gaïa m’a précisé avoir une photo de ce qu’elle portait le jour où elle a été mise à l’écart puisqu’elle en avait fait une story sur Instagram.
Comme dans le cas de Camille, j’ai demandé à voir l’image en question : un chandail rayé en laine serré qui arrive à la taille et une paire de jeans. Tout ce qu’il y a de plus banal, donc. Je ne suis pas directrice d’école, mais cela ne valait en rien que cette étudiante soit privée de son cours. Pour la possibilité de voir une couleur de brassière, une fraction de seconde, je le répète.
J’ai raconté tout ça à M. Giguère, du Centre de services. « On est en désaccord avec ces propos-là qui peuvent être de toute nature sur le corps féminin. » Il a insisté pour dire qu’il aimerait vraiment le savoir si d’autres élèves ou des parents ont des choses à dire sur ce qui se passe dans les écoles chapeautées par le Centre de services de Beauce-Etchemin. « En date d’aujourd’hui, je n’ai pas d’autres événements, mais j’invite vraiment les élèves et leur parent à en parler aux directions, aux psychologues et même à nous contacter. On est dans un moment clé pour dire des choses que normalement on n’aurait peut-être pas dites, alors on invite les gens à venir. Vraiment. »
D’ailleurs, le Centre de service ne ferme pas la porte à une intervention auprès des établissements scolaires. Il faut peut-être « remettre à jour d’anciens discours qui ne sont plus acceptables en 2023. Faut avoir une réflexion là-dessus. Mais il faut laisser aux écoles le soin de décider en ce qui concerne l’habillement. Il faut avoir une saine discussion : c’est quoi un vêtement approprié? Les parents ont aussi un rôle à jouer là-dedans. »
Une discussion saine entre l’école, les élèves et les parents quant au code vestimentaire, c’est ce que souhaitent plusieurs. Les élèves de l’école secondaire Veilleux veulent un changement de mentalité : les étudiantes et beaucoup de parents en ont assez que la responsabilité de ne pas émoustiller les garçons ou le personnel masculin repose sur les épaules des adolescentes. Et ils en ont assez du climat de terreur et d’intimidation qui semble, selon elles, régner à l’intérieur des murs de l’établissement.
En s’habillant comme Camille, lundi dernier, ces jeunes filles veulent nous dire qu’elles ne sont pas des objets sexuels et que leurs tenues ne sont pas inappropriées. C’est peut-être le regard que l’on jette sur elles qui l’est?
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