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Si les «girls just want to have fun», ben Alex aussi veut s'en mêler!
C’est ce soir que la tournée d’adieu Girls just want to have fun de la chanteuse américaine Cyndi Lauper s’arrête au Centre Bell. À 70 ans, Mme Lauper, toujours aussi punkette, accroche son micro définitivement.
Je suis passablement triste parce que j’aurais aimé ça être là. Mais, je serai moi-même sur scène. J’aurais voulu boucler la boucle parce qu’il se trouve que Cyndi Lauper est la première artiste que j’ai vue sur scène de mon propre choix.
Oui, avant elle, j’avais vu des spectacles. Mais ce n’était pas un choix de jeune adolescent dont les hormones explosent de tous bords, tous côtés. À 8 ans, voir Fanfan Dédé aux galeries La Canardière à Beauport, c’était pas mal plus le choix de ma mère que le mien.
Mais se rendre voir Cyndi Lauper au Colisée de Québec, avec en première partie « The Bangles », c’est une autre histoire. Son premier succès planétaire Girls just want to have fun coïncide pile-poil avec ce moment où je passe, tout à coup, de l’enfance à l’adolescence.
Un matin on se lève, et va savoir pourquoi, nos jouets ne nous intéressent plus. Le monde des adultes semble cent fois plus attrayant que mes figurines de Star Wars. Du duvet s’installe au-dessus de ma lèvre supérieure, mes dessous de bras ont une nouvelle odeur pas très agréable et mon pénis donne des signes de sensations ben le fun.
Même si je ne comprends pas tout à fait le sens des paroles de cet hymne à l’indépendance des filles, je capote sur la chanteuse. J’admire son look, sa dégaine et sa personnalité flamboyante. Ma première grande décision d’adolescent sera justement de suivre ses traces et de me faire raser la moitié de la tête, tout comme elle. Entendez-vous ma mère hurler de frayeur en me voyant rentrer à la maison avec mon carrelage rasé à la peau au clipper ? Comme le disait Renée Claude : c’est le début d’un temps nouveau.
Et je continue de m’affirmer au même rythme que Cyndi engrange les succès. Et c’est là qu’elle annonce sa première tournée mondiale qui s’arrêtera à Québec, au Colisée. Mon plan ? Y aller. Le plan de mère ? Me l’interdire.
Ses arguments : je suis trop jeune pour aller à un concert. C’est un soir de semaine et il y a de l’école le lendemain. Je vais tomber instantanément dans l’enfer des drogues dures. On va m’offrir de goûter à une bière et je vais devenir dépendant sur le champ. Je vais rater le dernier autobus vers Beauport et être enlevé par une secte. Mes arguments : je veux y aller parce que je veux y aller, BON !
L’univers a entendu mon cri du cœur parce qu’un cri du cœur d’un adolescent en formation, ça gueule solide. L’univers a donné envie à ma tante Johanne d’aller voir le spectacle. Évidemment, cette nouvelle ne tombe pas dans l’oreille d’un sourd et je demande à Jojo si je peux y aller avec elle et sa gang. Comme Johanne est formidable, elle accepte.
Avec le recul aujourd’hui, je me rends compte que c’était un tabarnak de sacrifice pour elle. Amener un jeune pubère à son premier spectacle, c’est une grosse responsabilité et beaucoup de surveillance. Rien pour rendre une soirée sexy. Avec l’aide de Jojo, ma mère a fini par accepter que j’y aille.
En fait, je ne sais pas si elle a accepté ou juste abdiqué parce que la dépression la guettait à force de m’entendre répéter les mêmes supplications. La seule condition ? Que je paie mon billet avec mon argent de poche. Bien sûr, la condition n’a pas été respectée et Jojo a payé le billet. Je sais, j’étais gâté pourri.
Ce soir-là, au Colisée de Québec, j’ai compris ce qu’était la musique. La puissance de voir un concert. Voir une artiste se livrer à fond la caisse sur scène. De voir une représentation où tout le public vibre au diapason. Sentir des choses dans ma tête et dans mon cœur qui n’avaient plus rien à voir avec la lecture d’une B-D de superhéros.
Je crois que, totalement inconsciemment, la petite graine de l’envie d’être moi aussi sur une scène s’est installée dans un racoin de mon cerveau. Alex just wants to have fun ! Je me revois encore sur le parterre du Colisée, avec ma moitié de tête rasée comme Cyndi, à danser au son de sa musique..
Le lendemain, j’ai cogné des clous pendant mon cours de mathématique. Mais y’a « She bop » qui résonnait dans ma tête. Et ça, va vaut tous les problèmes d’algèbre.