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« On est sorti du tunnel, mais le train de la santé est magané. » - François Legault
« On est sorti du tunnel, mais le train de la santé est magané. » - François Legault
Cette image servie en ouverture de la conférence de presse du 25 janvier par le premier ministre François Legault complétait celle de la fameuse lumière au bout d’un tunnel, aperçue, pour la 5e fois depuis le début de la pandémie, la semaine dernière.
Le tunnel (et l’image dudit tunnel...) serait derrière nous. Mais nous sommes toujours à bord d’un train (le système de santé, si on ne l’avait pas compris) qui n’est toujours pas en bon état de rouler. D’où la prudence quant à la destination des prochaines semaines. D’où un plan de déconfinement graduel qui y va « mollo », parce qu’il y a encore « beaucoup d’incertitude » et qu’il faut être responsable.
Pour montrer l’attention portée à la santé mentale, l’annonce principale concernait une série d’assouplissements graduels débutant dès lundi prochain. C’est sur les lieux de socialisation habituels que sont la maison et les restaurants qu’on a mis l’accent. Dorénavant, quatre personnes de différentes maisons ou deux bulles pourront s’y regrouper, avec le passeport vaccinal dans le dernier cas.
Pour ce qui est des salles de spectacles et des évènements sportifs, des petits plaisirs plutôt associés au divertissement, une ouverture à 50 % avec un maximum de 500 personnes sera possible dès le 7 février, toujours avec présentation du passeport vaccinal.
Quant aux sports pour les jeunes, une ouverture largement réclamée, tous vont être permis « jusqu’à un maximum 25 personnes » pour les entraînements, pas pour les compétitions.
À compter de lundi prochain, les cafétérias de chalets de ski seront aussi ouvertes à 50 % de leur capacité de même que d’autres lieux de sortie culturelle, avec passeport. Pour les adultes, les gyms et les spas, désolé, mais cela viendra plutôt dans une 3e étape, pas encore bien définie, quand le tableau sera amélioré dans les hôpitaux.
Un accent particulier a aussi été mis par le premier ministre sur les résidences pour personnes âgées afin d'améliorer la santé mentale de leurs résidents. Le nombre de proches significatifs ayants droit de visite passera à deux personnes (une à la fois) dans les CHSLD et à quatre personnes dans les RPA (deux à la fois).
Enfin, pour les lieux de culte, puisqu’il y a « encore beaucoup de Québécois pour qui c’est presque un service essentiel d’aller à la messe le dimanche », il y aura une réouverture permise avec un maximum 250 personnes, toujours avec le passeport vaccinal, et sans passeport pour les cérémonies funéraires.
Il est cependant encore difficile de se faire une idée claire de l’état de la pandémie, les tests PCR étant désormais réservés au personnel essentiel et aux patients recevant des soins pour la COVID.
Si le pourcentage de tests positifs, qui est rapidement passé de plus de 31,7 % le 30 décembre à 11,8 % dans le bilan du 25 janvier (encore bien au-delà du 5 % de contrôle mentionné par l’OMS), il est plus difficile de comprendre à quoi correspond vraiment ce pourcentage, parce que nous ne savons plus celui de la population elle-même.
#COVID19 - Voici une mise à jour du tableau de bord du 24 janvier. pic.twitter.com/hrMXHKJMtC
— Santé Québec (@sante_qc) January 25, 2022
À cet égard, le ministre de la Santé Christian Dubé en a profité pour annoncer l’ouverture bienvenue, le 25 janvier, de la plate-forme d’autodéclaration des tests rapides, ce qui permettra de corriger un peu la compréhension quant à l’évolution de la pandémie. Et comme il a invité les gens à déclarer les tests positifs des dernières semaines, on peut s’attendre à une hausse rétrospective significative des cas.
Là où le bât blesse, c’est à l’intérieur du fameux train magané, où le rythme des hospitalisations baisse moins rapidement que celui des cas, puisqu'il a diminué de 3425 dans le bilan du 18 janvier à 3278 dans celui du 25 janvier. La pression persiste sur des hôpitaux en mal de personnel avec encore 12 000 absents, mieux qu’il y a quelques semaines toutefois. Cette nécessité actuelle d’augmenter la capacité hospitalière pour être capable de vivre avec le virus demeure un défi majeur.
Suite à notre retour présumé dans la lumière, le premier ministre a évoqué la suite des choses, ne comprenant rien de moins qu’une « refondation » à moyen terme du système de santé, en mettant d’abord l’accent sur le personnel de la santé, dont les emplois futurs ont été vantés : « Il va y avoir beaucoup d’emplois de disponibles dans les prochaines années et les prochaines décennies. »
On n’en doute pas : la désaffectation ayant été marquée, en particulier dans beaucoup d’hôpitaux qui ont une grande difficulté à fonctionner adéquatement pour cette raison.
À un journaliste ayant demandé des précisions sur la nature de cette refondation, on a su que le plan devrait être déposé par le ministre de la Santé en février, la première étape ayant été apparemment d’avoir eu le « courage » de renégocier à l’automne les conventions collectives, par différentes mesures comprenant notamment la décentralisation des quarts de travail et l’accent sur le personnel à temps plein. « Préparer des horaires localement, décentraliser des décisions, se donner des incitatifs pour combler les quarts de travail qui sont plus difficiles à remplir, le soir, la nuit, la fin de semaine. »
Au-delà des infirmières, le premier ministre reconnaît qu’il « y a d’autres moyens pour améliorer le réseau de la santé » que le nombre de personnes recrutées. « Ce qui est important c’est de valoriser le jugement, l’initiative et l’autonomie des personnes qui travaillent dans le réseau de la santé. » On travaillerait sur des formations accélérées pour augmenter le support administratif, afin d’aider l’efficacité et la capacité de notre réseau.
La question de la nécessité de réinvestissement, soulevée lors de la conférence de presse, demeure cependant un enjeu majeur, tout comme la nécessité connexe de rehausser la contribution fédérale, actuellement à 22 % des coûts seulement, une idée qui fait bien entendu l’unanimité parmi les premiers ministres provinciaux, le fédéral ayant sa forte part de responsabilité dans la fragilisation du système ces dernières décennies.
Des questions importantes ont enfin été posées sur l’indépendance de la Santé publique, remise en cause par plusieurs organismes, dont le Collège des médecins du Québec.
Le premier ministre a jugé bon de rappeler que, contrairement à la perception, son indépendance serait bien réelle. Ce que le Dr Boileau a également soutenu, en se basant notamment sur son expérience de dirigeant d’instituts indépendants.
Il a toutefois annoncé dans la foulée que des points de presse autonomes seraient sur le point de se concrétiser, une nouveauté assurément bienvenue et très attendue, une sorte de déconfinement de la santé publique. Du moins en apparence.
Bref, voilà un déconfinement « mollo », « prudent et graduel » annoncé dans un calendrier à court terme assez clair, bien qu'il reste encore de l’incertitude pour d’autres activités à moyen terme et un flou certain à plus long terme et dont la clarification dépendra de l’état de nos hôpitaux maganés.
Pour garder les choses simples, comme l’a rappelé le Dr Luc Boileau « si vous voulez aider le personnel des hôpitaux, le plus important est d’aller chercher sa 3e dose. » Ce avec quoi on ne peut qu’être d’accord, et plus que mollo, compte tenu de l’état de notre train, qui n’a rien d’un TGV, comme on le sait trop.