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Si le député de QS avait rectifié le tir au début de la crise, on ne parlerait plus de ses propos depuis longtemps.
Après une longue semaine passée à mettre son propre parti dans l’embarras sur la place publique, le député solidaire Haroun Bouazzi s’est enfin résigné à se rétracter et à présenter des excuses à l’Assemblée nationale aujourd’hui. Il était temps…
En relations publiques, on dit généralement qu’une crise bien gérée doit se résorber à l’intérieur d’une période de 48 à 72 heures. Au-delà de ça, la crise risque de laisser une empreinte indélébile dans l’esprit du grand public. Dans le cas présent, on peut affirmer sans trop se tromper que la gestion de crise à Québec Solidaire (QS) fut un échec lamentable.
Si le député de Maurice-Richard avait rectifié le tir au début de la crise il y a cinq ou six jours, quand c’était encore le temps, on ne parlerait plus de ses propos divisifs depuis longtemps déjà. Au lieu de ça, il a préféré en rajouter une couche de plus en entrevue dans les médias au lendemain de la révélation de ses propos incendiaires sur le racisme à l’Assemblée nationale.
Il aurait pourtant pu éviter de porter ombrage à la célébration de sa nouvelle coporte-parole Ruba Ghazal, lors du congrès de son parti le week-end dernier. Ironie du sort, elle devenait pas le fait même la toute première femme d’origine moyen-orientale à accéder aux plus hautes fonctions de QS, en pleine controverse sur un prétendu «système raciste» qui toucherait tous les partis politiques au Québec, du moins selon les dires du député de Maurice-Richard.
Malgré l’avis de ses collèges du caucus de Québec Solidaire, Bouazzi a préféré laisser traîner la crise jusqu’à aujourd’hui, ternissant ainsi l’image de son parti auprès d’une part importante de l’électorat québécois, et ce, alors que QS est au plus bas dans les sondages et doit tenter de bâtir des ponts en-dehors des milieux militants de gauche pour élargir sa base en vue des prochaines élections.
Il a ainsi démontré dans les derniers jours qu’il n’était tout simplement pas un joueur d’équipe.
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Soyons honnêtes: les excuses que M. Bouazzi a présentées à ses collègues parlementaires ce matin étaient tout sauf senties et sincères. On avait davantage l’impression d’assister à une opération de relations publiques qu’à un véritable acte de contrition venant du cœur.
On peut supposer qu’il n’a pas vraiment eu le choix et que cette «sortie de secours» lui a probablement été fortement recommandée (lire ici imposée) par les stratèges solidaires.
Quand ça fait une semaine que la crise perdure et qu’elle ne semble pas du tout près de s’essouffler, le leadership de QS n’aurait tôt ou tard pas eu d’autre choix que d’aller de l’avant avec des mesures plus drastiques pour «mettre le couvercle sur la marmite», si jamais il s’était entêté à refuser de collaborer pour mettre un terme à cette pénible saga.
Dans tous les cas, les événements des derniers jours ont mis au grand jour la mollesse du leadership de Gabriel Nadeau-Dubois, qui ne semble avoir aucun contrôle sur ses propres députés.
Même s’il l’a publiquement désavoué et qu’il s’est distancé des propos de Bouazzi, «GND» aura mis près d’une semaine à finalement convaincre son collègue de se rétracter publiquement.
Il faut dire que les statuts de son parti sont particuliers; le leadership de QS n’a pas le pouvoir d’expulser des élus de son caucus sans d’abord obtenir l’accord des membres du parti réunis en congrès. C’est aussi ça, avoir un parti sans véritable chef…
Pendant ce temps, Nadeau-Dubois a passé la fin de semaine à tenter de ménager la chèvre et le chou, conscient du besoin de son parti de rejoindre une plus large part de l’électorat québécois, tout en essayant de ne pas trop se mettre à dos la frange plus woke et militante de sa propre formation politique, alors réunie en congrès spécial.
Un véritable travail d’équilibriste qui, au final, ne satisfait personne, d’un côté comme de l’autre.
À seulement 13% d’intentions de vote selon le dernier sondage Léger paru la semaine dernière – à peine deux petits points devant le Parti conservateur (PCQ) d’Éric Duhaime –, QS semble actuellement incapable de sortir de son noyau dur. Dans ces circonstances, le parti de gauche pouvait-il vraiment se permettre le luxe d’une crise majeure qui risque de pousser encore plus d’électeurs à se tourner vers d’autres partis jugés moins radicaux?
Gageons que les prochains sondages viendront confirmer une nouvelle perte d’appuis pour les solidaires.
C’est bien beau présenter publiquement des excuses aujourd’hui, mais à ce point-ci, le mal est déjà fait et c’est malheureusement rendu trop peu, trop tard pour Haroun Bouazzi et Québec Solidaire.
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