Le premier ministre du Québec assure que la multinationale Glencore ne s'apprête pas à fermer la Fonderie Horne de Rouyn-Noranda et l'affinerie CCR de Montréal-Est, mais le nouveau maire de Rouyn-Noranda est d'avis que ce scénario ne peut pas être exclu.
Selon le maire de Rouyn-Noranda, Gilles Chapadeau, Glencore a demandé aux gestionnaires québécois de la fonderie «un plan de fermeture» la semaine dernière.
«Alors, moi, ma compréhension, ce n’est pas dans l'intention de fermer, mais c'était une évaluation financière de ce que ça voudrait dire fermer une fonderie de ce type-là», a expliqué le nouvel élu.
«Est-ce que la fermeture est une option sur la table? Clairement», mais «est-ce qu'ils vont décider de la fermer, j'en douterais», a ajouté du même souffle Gilles Chapadeau, dans une entrevue avec La Presse Canadienne.
Sur la foi de deux sources au fait du dossier, Reuters a avancé lundi matin que la multinationale anglo-suisse prévoit de fermer ces deux installations, mais qu'aucune date n'a encore été fixée pour l'arrêt des activités.
Le premier ministre du Québec, François Legault, a aussi voulu être rassurant lundi matin dans ce dossier.
«Je veux rassurer la population de l’Abitibi-Témiscamingue : la Fonderie Horne ne s’apprête pas à fermer ses portes. L’entreprise a elle-même démenti les informations véhiculées et a réaffirmé sa volonté de poursuivre ses activités au Québec. Notre député Daniel Bernard et mon équipe sont en lien avec les dirigeants de la Fonderie et la Ville de Rouyn-Noranda. Nous allons continuer de suivre la situation de près. Notre objectif demeure de protéger les emplois et la santé des gens de la région», a-t-il mentionné dans une déclaration écrite transmise aux médias par son cabinet.
Un peu avant la réaction du premier ministre, Glencore Canada s'était empressée de réfuter l'information d'abord relayée par Reuters: «Actuellement, Glencore n'envisage pas la fermeture de la Fonderie Horne ou de l’affinerie CCR.»
Dans un communiqué transmis par son directeur des relations médias, Fabrice de Dongo, l'entreprise a assuré qu'elle continue à mettre en œuvre son plan de réduction des émissions «en faisant progresser les études et autres travaux».
«Nous travaillons également en étroite collaboration avec toutes les parties prenantes afin de tracer la voie à suivre pour préserver les activités de fusion actuelles de la Fonderie Horne au Canada», a écrit le porte-parole. «Cela inclut un cadre réglementaire clair et prévisible nécessaire pour garantir les investissements appropriés.»
Les problèmes environnementaux et les sommes colossales nécessaires pour moderniser le site expliqueraient la décision de Glencore de fermer la Fonderie Horne, selon les sources qui se sont confiées à Reuters.
Le directeur des relations médias de Glencore Canada a reconnu que les fonderies «font face à d'énormes pressions à travers le monde, autant sur le plan financier et réglementaire qu’opérationnel».
Il a toutefois rappelé que la Fonderie Horne et l'affinerie CCR «jouent un rôle important dans l'approvisionnement en matières premières essentielles du marché nord-américain et étranger».
La Fonderie Horne produit annuellement 210 000 tonnes de cuivre et de métaux précieux.
Cibles
La fonderie a été au cœur de plusieurs controverses dans les dernières années, notamment en raison de ses rejets de contaminants.
Elle dépasse largement la norme annuelle concernant les rejets d'arsenic, qui est de trois nanogrammes (ng) par mètre cube (m3), mais bénéficie d'ententes particulières avec le gouvernement du Québec.
En vertu de la plus récente autorisation ministérielle accordée par Québec, en 2023, la fonderie devait atteindre une cible de 45 ng/m3 en 2024 et devra respecter un objectif de 15 ng/m3 à partir de 2027.
Selon les données de l'entreprise, la concentration d’arsenic émis dans l'air en 2024 aurait atteint une moyenne de 39,1 ng/m3, en baisse par rapport à 73 ng/m3 en 2022.
Impossible de suivre les normes, selon l'entreprise
Lors d’une entrevue avec La Presse en juillet dernier, le directeur général pour la filière cuivre en Amérique du Nord de Glencore, Vincent Plante, avait indiqué que l’entreprise n’allait pas être en mesure d’atteindre la norme de 3 ng/m3 et qu’elle jugeait cette cible «techniquement impossible» à atteindre.
La Presse Canadienne a demandé au bureau du premier ministre et à celui du ministre de l'Environnement, Bernard Drainville, si le gouvernement compte toujours imposer une éventuelle cible de 3 ng/m3 à Glencore pour les rejets d'arsenic.
«La position du gouvernement demeure la même», a répondu le bureau de François Legault.
Plus tôt cet automne, la Cour supérieure a autorisé l’exercice d’une action collective contre la Fonderie Horne et le gouvernement du Québec. Les plaignants disent avoir subi des dommages de toutes sortes causés par les rejets de contaminants de l’entreprise.
Si les questions environnementales préoccupent de nombreux résidants de Rouyn-Noranda, le dossier de la Fonderie Horne est un enjeu complexe, puisque l'entreprise est un employeur important dans la région.
Duhaime dénonce «la dérive verte»
Le chef du Parti conservateur du Québec, Éric Duhaime, a réagi lundi au dossier de la fonderie Horne en interpellant le ministre de l’Environnement, Bernard Drainville, afin qu’il fasse preuve de souplesse et qu'il tienne sa promesse de «revoir la réglementation environnementale excessive».
«Le ministre Drainville doit prendre en considération la tendance à la baisse des émissions dans sa réévaluation de la réglementation. Les émissions de la Fonderie montrent une baisse depuis plusieurs années. 90 % de la région urbaine de la ville de Rouyn-Noranda présente une concentration d’arsenic inférieure à 7 ng/m³, et 99 % une concentration inférieure à 15 ng/m³», a-t-il plaidé dans un communiqué.
Selon le chef conservateur, la fermeture de la fonderie Horne, qui embauche plus de 600 employés, s’avérerait «catastrophique» pour l’économie locale.
«La solution économique et environnementale n’est pas de faire fermer une usine au Québec pour l’envoyer ailleurs dans le monde, mais plutôt de mettre le génie québécois au service de nos entreprises pour développer de nouvelles technologies qui réduisent les émissions polluantes», a-t-il affirmé.
Éric Duhaime propose la création d’une chaire en nouvelles technologies à l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue.
Avec des informations de Noovo Info.


