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Le gouvernement du Québec a «manqué à l’honneur de la Couronne», il y a «une urgence d’agir».
Des Premières Nations se réjouissent de la décision de la Cour supérieure qui ordonne au gouvernement du Québec de mettre en place, d'ici le 30 septembre 2024, un processus distinct de consultation avec elles, afin de protéger le caribou forestier et montagnard.
Le gouvernement du Québec a «manqué à l’honneur de la Couronne», il y a «une urgence d’agir» et il aurait «dû lancer un processus de consultation il y a déjà fort longtemps», peut-on lire dans le jugement de la Cour supérieure.
La décision rendue le 21 juin dernier par la juge Marie Cossette constitue la réponse du tribunal à un recours entrepris en février 2022 par les Conseils d'Essipit et de Mashteuiatsh selon lequel Québec avait manqué à son obligation constitutionnelle de les consulter en lien avec l'élaboration d’une stratégie de protection du caribou.
«La Cour nous donne raison» et «on va espérer que le Québec s'engage à respecter cette décision et qu'il s’ajuste en conséquence en participant à un processus de consultation avec ouverture» et «à une participation sincère et honorable», a indiqué le chef du Conseil des Innus de Mashteuiatsh, Gilbert Dominique, en entrevue avec La Presse Canadienne.
Les réticences du Québec «à collaborer avec nous dans ce dossier sont inadmissibles», selon Gilbert Dominique, qui a rappelé que le gouvernement promet des mesures de protection du caribou depuis au moins 2016 dans les communautés innues d'Essipit et de Mashteuiatsh, situées sur la Côte-Nord et dans la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean.
À cette époque «on avait évoqué l'hypothèse d'être consultés dans certains processus, mais jamais ces processus n'ont été proposés formellement par le gouvernement du Québec», a indiqué le chef Dominique.
Dans son jugement, le tribunal souligne que le gouvernent a signifié plusieurs fois aux Premières Nations que leur participation à l’élaboration d’une stratégie de protection du caribou était importante.
Par exemple, le document judiciaire rappelle que le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, a maintes fois indiqué que les communautés pourraient «participer à la co-construction de la Stratégie» afin que celle-ci soit élaborée en tenant compte des leurs enjeux et de leurs préoccupations.
Ces déclarations «ont fait naître des attentes légitimes chez les demanderesses, en marge de leur droit constitutionnel à être consultées», selon le jugement.
Or, peut-on lire dans la décision, «le gouvernement a manqué à son devoir d’honneur envers les demanderesses», car il «n’a pas déclenché un tel processus» et «n’a pas donné suite aux attentes légitimes» des Premières Nations.
La juge Marie Cossette a écrit que non seulement le droit des Premières Nations à être consultées est «bafoué», mais «la situation du caribou se détériore davantage durant ce temps et le gouvernement n'est toujours pas en mesure d'indiquer au Tribunal le moment auquel la Stratégie de protection envisagée sera communiquée».
Il en résulte donc «que leurs droits et titres ancestraux sont d'autant plus menacés vu la place centrale qu'y occupe le caribou dont la condition continue de se fragiliser», a écrit la juge.
Pour éviter la disparition de l’espèce, le chef Gilbert Dominique est d’avis «qu’il faut protéger certains grands massifs qui abritent le caribou».
Mais il faut également considérer de ne plus construire de nouveaux chemins forestiers pour extraire le bois dans l'habitat de l'espèce et aussi reboiser certains chemins.
Protéger le caribou aura nécessairement des conséquences sur les emplois dans l’industrie forestière, selon le chef Dominique.
«C'est une évidence, il va y avoir des secousses, on en convient. Donc, comment est-ce qu'on peut s'assurer qu’on atténue ces conséquences-là? (…) Il faut trouver des solutions», a indiqué le chef du Conseil des Innus de Mashteuiatsh.
Le chef de la Première Nation des Innus Essipit, Martin Dufour, a écrit dans un communiqué qu’il souhaite que Québec accepte la décision de la juge et participe aux consultations «avec ouverture» et de façon «sincère et honorable».
La Presse Canadienne a demandé une réaction au cabinet du ministre de l'Environnement qui, dans un échange de courriels, a écrit ceci: «Nous avons pris connaissance de la décision rendue par la Cour supérieure, que nous allons étudier avant de commenter davantage.»